Disons que dans le récit initial, il y a pas mal de « minorités puissantes » : les renégats, les "bâtards", les filles révoltées, les combattantes, les handicapés, les gros. Bref tous ceux qui sont habituellement faibles dans l’espace de la fantaisie sont fort⋅e⋅s, déterminé⋅e⋅s, puissant⋅e⋅s et plus intelligent⋅e⋅s.
Ça, j’ai tout de suite beaucoup aimé. La société décrite est terriblement patriarcale et hiérarchique, mais les héros sont ceux qui sont habituellement opprimés. Les grands, beaux et puissants sont souvent des ordures ou des faibles. D’ailleurs le bellâtre de service se retrouve handicapé et l’eugéniste se fait buter par son fils le nain ! L’histoire est portée par les femmes et les éclopés.
Mais très rapidement, devant le succès populaire de la série TV, ces aspects égalitaristes sont gommés au profit d’une bonne grosse putasserie. Les personnages les plus "normaux" du livre — c’est-à-dire ceux qui sont dans les schémas habituels de domination homme/femme, mince/gros, bien-portant/pégloteux — sont très secondaires dans le bouquin et sont surdéveloppés dans la série, probablement afin de ne pas faire perdre les repères du spectateur moyen.
Par exemple, le bordel de Littlefinger a parfois une importance dans l’intrigue, mais dans la série, on en fait la base arrière du gars, parce que ça permet de montrer des nanas à poil le plus souvent possible.
De la même manière, il y a invention de personnages dans la série TV, comme Talisa Maegyr, qui n’apporte rien au récit (déjà suffisamment encombré de personnages comme ça), si ce n’est de rajouter des plombes de romance à l’eau de rose à des années-lumière du propos de la saga écrite !
Au bout d’un moment, cet effacement délibéré des femmes fortes pour des femmes décoratives, ça gave !
Et c’est d’autant plus vrai que ce n’est pas le propos de la saga originale.