• Le problème de la #criminalité_en_col_blanc
    https://champpenal.revues.org/8534

    Le second rapport sous lequel les explications conventionnelles du comportement criminel sont invalides vient du fait qu’elles s’appuient sur des statistiques biaisées. Ceci sous deux angles : (a) les individus appartenant aux classes socio-économiques supérieures sont plus puissants politiquement et financièrement, et échappent aux arrestations et aux condamnations à un degré plus important que les personnes qui sont dépourvues d’un tel pouvoir. Les gens aisés peuvent embaucher des avocats expérimentés et peuvent par ailleurs influer sur l’administration judiciaire en leur faveur plus efficacement que ceux qui appartiennent aux classes socio-économiques inférieures. Même des criminels professionnels ayant du pouvoir financier et politique échappent aux arrestations et aux condamnations plus efficacement que des criminels amateurs, occasionnels, qui ont peu de pouvoir financier ou politique8. Ce biais, quoique indubitable, est négligé du point de vue théorique.

    (b) Le biais que comporte le fonctionnement de la justice criminelle, relativement à des lois qui s’appliquent exclusivement aux milieux d’affaires et aux professions légitimes et bien établies, et qui par conséquent ne concernent que les classes socio-économiques supérieures, est plus important encore. Les individus qui enfreignent les lois relatives aux limitations commerciales, à la publicité, aux normes alimentaires et pharmaceutiques [pure food and drugs9], et autres pratiques des milieux d’affaires, ne sont pas arrêtés par des policiers en uniforme, ni jugés au pénal, ni incarcérés ; leur comportement illégal reçoit l’attention de commissions administratives et de tribunaux civils ou de juridictions spéciales10. De ce fait, de telles violations du droit ne sont pas incluses dans les statistiques pénales, ni les cas individuels portés à l’attention des universitaires qui écrivent des théories du comportement criminel.

    L’échantillon du comportement criminel sur lequel ces théories se fondent est biaisé sur le plan de la position socio-économique, puisqu’il exclut ces hommes des milieux d’affaires et des professions respectables [business and professional men]. Le biais est aussi flagrant que si les universitaires avaient, dans le cadre d’une étude, sélectionné uniquement des délinquants roux, pour ensuite conclure que la rousseur des cheveux était la cause du crime.