• Orientation scolaire et filières professionnelles : la paille dans l’œil des élèves, la poutre dans l’œil des élites | A Contrario
    http://www.acontrario.fr/2016/09/09/orientation-scolaire-filiere-professionnelle-elitisme-devalorisation

    Je n’apprendrai rien à personne en disant que les filières générales sont les plus valorisées, tandis que les filières professionnelles sont dévalorisées. On note d’ailleurs, et à juste titre, une abondance de contenus indignés sur le sujet depuis des années, y compris de la part des pouvoirs publics qui, dans une vertueuse démarche de propagande feignent encore de croire que la dévalorisation des filières pro est à corréler aux résultats et aux débouchés, et qui proposent donc comme solution une meilleure connexion entre ces filières et le monde de l’entreprise.

    Ailleurs, on va un peu plus loin dans le raisonnement en osant aborder le récurrent problème de la perception de ces filières, et on émet – il était temps – l’idée que l’orientation en filière professionnelle est devenu une sorte de pis aller pour les élèves dont les notes ne permettent pas d’entrer en seconde générale. On déplore aussi la reproduction des schémas professionnels inter-générationnels – les enfants d’ouvriers en filière pro, les enfants de cadres en filière générale – et la « non correction » de ces schémas par le corps enseignant, qui entraîne de fait une consolidation des inégalités sociales.

    Tout ceci marque d’évidentes bonnes intentions, sauf dans le cas des pouvoirs publics, chez qui on constate toujours la même et désolante déconnexion de certaines réalités de terrain. Mais globalement, on a bien compris que les filières professionnelles sont dévalorisées et que c’est moche. Il faut faire quelque chose et en premier lieu permettre à toutes et tous de faire de vrais choix. C’est beau comme un poney à qui on fait une tresse.

    Le problème, c’est que dans la perception collective de ce qu’on nomme un « vrai choix », on ne va pas jusqu’à questionner la hiérarchisation implicite et systémique des orientations, à travers l’axe de classe sociale. Si la notion d’élitisme est parfois abordée dans certains contenus, on se garde bien d’aller gratter au-delà d’une indignation de surface pour interroger vraiment ce que cet élitisme implique et de quoi il découle.

    Pour ancrer ce propos dans la réalité, je poserai donc une question concrète : au vu de l’état actuel de l’organisation des études en filières professionnelles, des moyens dont elles disposent, des formations proposées et du statut social « tracé » des élèves qui en sortiront diplômés, combien de parents, profs, penseurs et indignés parmi ceux qui s’indignent de la dévalorisation des filières professionnelles y enverraient leur enfant avec le sourire au cas où celui-ci aurait 16 de moyenne générale ?

    Bien. Ceci posé, on peut commencer à réfléchir.

    #classisme #éducation #travail