Lukas Stella

INTOXICATION MENTALE, Représentation, confusion, aliénation et servitude, Éditions L’Harmattan, 2018. — L’INVENTION DE LA CRISE, 
Escroquerie sur un futur en perdition, Éditions L’Harmattan, 2012. — STRATAGÈMES DU CHANGEMENT De l’illusion de l’invraisemblable à l’invention des possibles Éditions Libertaires, 2009. — ABORDAGES INFORMATIQUES (La machine à réduire) Croyances informatisées dans l’ordre des choses marchandes, Éditions du Monde libertaire - Alternative Libertaire, 2002 — http://inventin.lautre.net/linvecris.html

  • RÉFORME ET CONTRE-RÉFORME
    DANS LE POUVOIR BUREAUCRATIQUE
    (...)
    La restauration du stalinisme montre définitivement le caractère illusoire de tout réformisme bureaucratique, et l’impossibilité congénitale pour la bureaucratie de « libéraliser » sa gestion de la société. Son prétendu « socialisme humain » n’est autre que l’introduction de quelques concessions « bourgeoises » dans son monde totalitaire ; et déjà ces concessions la ruinent. La seule humanisation possible du « socialisme bureaucratique » est sa suppression par le prolétariat révolutionnaire, non par une prétendue « révolution politique » mais par la subversion totale des conditions existantes, et la dissolution pratique de l’internationale bureaucratique.

    Les émeutes du 21 août 1969 ont montré à quel point le stalinisme ordinaire est rétabli en Tchécoslovaquie, et aussi à quel point il est menacé par la critique prolétarienne : dix morts, 2000 arrestations, et les menaces d’exclusion ou de procès contre le fantoche Dubcek n’arrêtent pas la grève perlée à l’échelle nationale, par laquelle les ouvriers tchèques mettent en péril la survie du système économique de leurs exploiteurs, indigènes et russes.

    L’intervention russe, si elle a pu freiner le processus objectif de transformation en Tchécoslovaquie, a été chèrement payée par le stalinisme international. Les pouvoirs bureaucratiques de Cuba et de Hanoi, directement dépendants de l’État dit soviétique, n’ont pu qu’applaudir - à la grande honte de leurs admirateurs trotskistes et surréalistes, et des belles âmes de gauche - à l’intervention de leurs maîtres.

    Castro, avec un cynisme particulier, a longuement justifié l’intervention militaire, nécessitée selon lui par les menaces d’une restauration du capitalisme, démasquant par là la vérité de son propre « socialisme ».

    (...)
    La crise tchécoslovaque n’a fait que confirmer la décomposition avancée du stalinisme. Jamais celui-ci n’aurait pu jouer un si grand rôle partout dans l’écrasement du mouvement ouvrier, si le modèle bureaucratique totalitaire russe n’avait été apparenté, à la fois à la bureaucratisation du vieux mouvement réformiste (social-démocratie allemande et IIe Internationale), et à l’organisation de plus en plus bureaucratique de la production capitaliste moderne. Mais maintenant, et après plus de quarante ans d’histoire contre-révolutionnaire, la révolution renaît partout, et fait trembler les maîtres de l’Est comme ceux de l’Ouest, attaqués à la fois dans leurs différences et dans leur profonde parenté. Les courageuses protestations isolées qui ont été émises à Moscou après le 21 août annoncent la révolution qui ne manquera pas d’éclater bientôt en Russie même. Le mouvement révolutionnaire connaît désormais ses ennemis véritables, et aucune des aliénations produites par les deux capitalismes, bourgeois privé et bureaucratique d’État, ne peut plus échapper à sa critique. Face aux immenses tâches qui l’attendent, il ne s’emploiera plus à combattre les fantômes ni à soutenir les illusions.

    Internationale Situationniste 12