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    • « Je vais être très clair »… Probablement ignorant des logiques élémentaires du symptôme, Emmanuel Macron semble ne pas voir combien cette manière répétitive de commencer chacune de ses réponses trahit le désir profond de recouvrement qui anime toute sa campagne. « Entre le flou et le rien, continuez de baigner », voilà ce qu’il faut entendre en fait à chacune de ses promesses de clarté. À sa décharge, on admettra que déférer à l’obligation de parler quand on a surtout l’intention de ne rien dire est l’un de ces fléaux de la « démocratie » contre lequel on n’a pas encore trouvé d’antidote satisfaisant. On objectera que la plupart des candidats finissent par s’accommoder de ce long et mauvais moment à passer, et que le mensonge de campagne est un genre bien établi qui ne devrait plus rien avoir pour surprendre quiconque. Le problème pour Emmanuel Macron prend cependant des proportions inédites car il ne s’agit plus simplement de faire passer en douce une ou deux énormités, fussent-elles du calibre de « la finance, mon ennemie » : c’est sa campagne dans son intégralité, et jusqu’à sa personne même comme candidat, qui constituent une entreprise essentiellement frauduleuse...

    • http://lvsl.fr/emmanuel-macron-anatomie-dune-strategie-politique
      Emmanuel Macron et le populisme

      Le 19 mars dernier, l’ancien ministre de l’Economie déclarait au JDD : « Appelez-moi populiste si vous voulez. Mais ne m’appelez pas démagogue, car je ne flatte pas le peuple ». Le concept de « populisme », trop souvent vidé de son contenu analytique et désormais transformé en catégorie-repoussoir du débat politique, est régulièrement appliqué à Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron. Pour le candidat d’En Marche, la question est loin d’être évidente.

      Le néolibéralisme, qui constitue la clé de voûte du projet d’Emmanuel Macron, se caractérise habituellement par la recherche du dépassement des « vieux » clivages au profit d’un traitement technique, supposément « désidéologisé », des grandes questions économiques et sociales. Le candidat d’En Marche n’échappe pas à la règle, lorsqu’il relativise la pertinence de l’affrontement gauche/droite et privilégie le registre de l’expertise et de la compétence. A cet égard, il semble excessif de voir dans le macronisme le « stade suprême du populisme », comme le suggère Guillaume Bigot dans un article du Figaro. Le populisme est en effet une méthode de construction des identités politiques qui repose sur la réintroduction du conflit, par la « dichotomisation de l’espace social en deux camps antagonistes », selon Ernesto Laclau, l’un de ses principaux théoriciens. Là où le populisme cherche à réinjecter du politique, envisagé comme conflictuel par nature, l’ « esprit » du néolibéralisme tend à l’inverse à dépolitiser.

      Néanmoins, la stratégie discursive d’Emmanuel Macron que nous nous sommes attachés à présenter – nouvelle dichotomie de l’espace politique entre progressistes et conservateurs, rhétorique anti-élites et positionnement en dehors des cadres institutionnels, valorisation du renouveau – relève effectivement en partie de la construction populiste. Là où la droite républicaine présente l’austérité et les réformes structurelles comme un horizon indépassable, sur un registre fataliste en résonance avec le fameux « There is no alternative » de Margaret Thatcher, Emmanuel Macron tente de susciter un élan positif d’adhésion collective à son projet.

      Les analyses gramsciennes, développées notamment par le politiste Gaël Brustier, ou par Antoine Cargoët dans LVSL, prennent ici tout leur sens. Dans le sillage du penseur italien Antonio Gramsci, on peut considérer qu’un acteur politique détient l’hégémonie lorsqu’il réussit à donner une portée universelle à son projet, en installant la conviction que les intérêts qu’il défend sont ceux de l’ensemble de la communauté politique. Or, le néolibéralisme, en panne de récit de légitimation et incapable d’intégrer les secteurs subalternes, souffre aujourd’hui d’une profonde crise organique : son hégémonie est menacée de toute part. L’émergence du « phénomène » Macron peut dès lors être perçue comme une tentative de reprise en main des élites, à travers la formulation d’un « nouveau récit d’adhésion au libéralisme », d’après les termes de Gaël Brustier : désencombré du conservatisme des droites et des complexes des socialistes, débarrassé des appareils partisans disqualifiés, incarné par un nouveau visage plus dynamique et plus moderne, le néolibéralisme « en marche » est susceptible d’obtenir une plus large adhésion. C’est la « révolution passive ».

      Emmanuel Macron reprend donc à son compte certaines caractéristiques clés d’une stratégie populiste, saisissant la nécessité d’adapter son discours à l’état de délabrement du champ politique français, et rapprochant le libéralisme du sens commun par son association au progressisme et au renouvellement démocratique. Seulement, le « populisme » du leader d’En Marche entre en tension avec l’essence d’un projet qui réaffirme clairement le primat des décisions techniques sur la souveraineté populaire.

    • http://www.humanite.fr/nicolas-framont-se-pencher-sur-la-position-sociale-des-anti-systeme-est-ess

      Justement Macron, auteur de Révolution, avance l’idée qu’En marche ! est le fer de lance d’une vague citoyenne. Sauf que vous démontrez, dans votre ouvrage les Candidats du système , qu’il s’est lancé sur la base du système oligarchique...

      Nicolas Framont Le candidat n’a pas joué le jeu des partis politiques parce qu’il était suffisamment riche et bien entouré pour pouvoir s’en passer. Il a cette capacité de court-circuiter tout un tas de logiques qui auraient aidé à l’enfermer dans le costume de « l’héritier de Hollande ». Seulement, En marche ! est l’inverse d’une démarche citoyenne. C’est encore moins citoyen qu’un parti politique, avec une organisation encore plus verticale, à l’américaine, où les citoyens n’ont aucun rôle à jouer et où les militants sont de simples supporters. Alors que les partis politiques avaient cette capacité d’ascenseur social, En marche ! est seulement l’écurie d’un homme. Ses initiales sont révélatrices de cela (« EM » pour Emmanuel Macron et En marche ! – NDLR ). Les proches d’Emmanuel Macron, membres influents de grands ministères de la finance, ont réalisé que le bipartisme ne fonctionnait plus, que les taux d’abstention explosaient et qu’il pouvait être leur nouvelle tentative. Il a été mis en piste depuis longtemps par Attali, la banque Rothschild, puis des capitalistes influents. Le côté « renouveau », qui n’est que de la communication, s’appuie sur des moyens considérables. Et cela paie visiblement auprès des journalistes.