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L’émission « Offensive Sonore » est diffusée un vendredi sur deux sur Radio Libertaire de 21h-22h30 (89,4 Mhz)

  • En fait, c’est Facebook qui nous déprime

    https://www.franceculture.fr/emissions/la-vie-numerique/en-fait-cest-facebook-qui-nous-deprime

    L’usage de Facebook est-il déprimant ?

    Voici comment deux chercheurs - l’un de l’Université de San Diego, l’autre de Yale - exposent leur réponse. Depuis 13 ans que Facebook existe, expliquent-ils, nombre d’études se sont penchées sur la question. Certaines ont montré que l’usage des réseaux sociaux pouvait diminuer les interactions physiques, qu’il pouvait détourner de certaines activités de la vie hors ligne ou qu’il pouvait accroître la sédentarité en augmentant le temps passé devant les écrans. Mais voilà, ajoutent les chercheurs, il reste des sceptiques pour se demander si cet effet globalement négatif des réseaux sociaux n’est pas dû au simple fait qu’ils attirent les gens les plus sujets au mal être. D’autant que d’autres études ont montré qu’ils pouvaient avoir un effet positif en renforçant par exemple le soutien entre pairs et même les relations dans le monde physique. Bref, on ne savait que conclure…..

    Jusqu’à cette étude donc. Une étude qui avance son sérieux, pour des raisons méthodologiques que je vous épargne, mais qui tiennent en gros au corpus massif, au temps que couvrent ces données (qui permet de voir les évolutions), et au fait qu’elle prend en compte interactions en ligne et hors ligne. Et cette étude conclut donc à une baisse globale du bien-être à la fréquentation de Facebook. Oui, Facebook nous déprime. Cette baisse du bien être, les chercheurs l’attribuent à un phénomène en particulier : Facebook nous incite à nous comparer aux autres, mais à des autres qui mettent en scène leur vie sous le jour le plus favorable. D’où une érosion de notre estime de soi, qui produit une forme de mal être.

    Mais, ajoutent les chercheurs, ce constat n’explique pas pourquoi ce processus a lieu. Par exemple, ils n’ont pas observé de grandes différences entre les trois actes numériques de Facebook (le fait de poster, de liker ou de cliquer sur un lien). Ce qui est intéressant, car intuitivement, ils pensaient que le fait de liker le contenu de quelqu’un était plus déprimant que le fait de poster un contenu soi-même. Eh bien non, poster aussi, c’est déprimant (parce que selon eux, ce qu’on poste est aussi le résultat d’une comparaison). Les chercheurs en concluent que ce qui importe, c’est la quantité de l’usage plus que sa qualité. C’es trop fréquenter Facebook qui déprime, quoiqu’on y fasse. Ils sont donc tentés d’étendre leur conclusion au-delà de Facebook à tous les réseaux sociaux qui nous exposent à une vie des autres mise en scène, et qui pourraient nous inciter à nous comparer (dans le viseur, Instagram, par exemple, dans lequel c’est essentiellement par l’image que se fait la comparaison). Ils ajoutent que le problème des réseaux sociaux est qu’ils font passer le temps devant l’écran pour de la socialisation, alors qu’ils ne substituent pas, au regard de notre bien être, à des relations physiques.

    Bon. D’accord. Mais j’ai 3 remarques

    La première touche à cette question de la comparaison, manifestement centrale. Quand en plein de mois de février, on tombe sur des photos de gens beaux, qui font des fêtes de ouf dans des paysages de rêve et qu’on s’aperçoit que ce sont les vacances de Beyoncé et Jay Z chez Rihanna à la Barbade, c’est pas marrant mais on se dit “bon, c’est normal” ; quand il s’agit des photos de vacances d’une vieille copine ou son voisin de bureau, c’est vraiment dur. Oui, la comparaison entre pair peut être cruelle. Pour ça, je ne vois que des solutions très pragmatiques : “unfriender” ses amis trop beaux, trop riches, trop bons photographes ou trop heureux (de toute façon, je ne crois pas qu’on y gagne beaucoup à trop fréquenter des gens heureux). Personnellement, j’adopte une autre solution, je me trouve super (avec un peu de déni et de mauvaise foi, ça marche très bien).

    Sur l’aspect quantitatif, essentielle selon l’étude, j’ai une question : quelle activité solitaire, pratiquée dès le matin dans son lit et un peu toute la journée, ne serait pas déprimante à force ? Je pense évidemment à plein d’activités… Rappelons-nous les parents du jeune Balzac qui s’inquiétaient de leur ado de fils passant des heures dans son lit à lire des romans…Tout le 19ème siècle s’est effrayé de l’apathie et de la désocialisation entraînées par la lecture de roman… Heureusement, la télévision est arrivée… Puis Internet aujourd’hui… Gageons qu’une autre activité solitaire viendra vite remplacer Facebook dans nos vies. pour nous apporter encore plus de mal être.
    Enfin, peut-on mesurer le bien être d’une population d’une population pendant un temps long en isolant une activité de l’état général du monde (surtout quand cette activité est sociale et engage des conversations) ? Car dans nos échanges Facebook, nous ne parlons pas seulement de nous, nous parlons aussi du monde. C’est aussi le monde qui arrive dans Facebook. Et on peut se demander si dans le mal être qu’entraîne la fréquentation de Facebook il n’y a pas aussi le reflet du mal être du monde. Or le monde est va-t-il de mieux en mieux ? Je me pose la question.

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