Je réponds à ton message un peu tard, lors de mon retour devant l’écran.
Je pense qu’il est bon de se rappeler d’abord les courants de pensée et leurs applications historiques.
Au XIXe siècle et au début du XXe, c’est le système réglementariste qui a régit les pays occidentaux : la prostitution était autorisée à condition d’être sévèrement confinée et contrôlée par l’administration médicale et policière (dans les « maisons closes », fichage des prostitués, contrôle médical, interdiction de sorties seuls...).
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, le mouvement abolitionniste se développe sous l’impulsion de la féministe britannique Joséphine Butler. Le terme est une référence volontaire à l’esclavage : il s’agit de lutter contre la "traite des blanches". Il considère les prostitués comme victimes d’un système qui les exploitent et refuse toute pénalisation de ceux-ci. Il dénonce le fichage des prostitués qui avait lieu jusqu’alors.
Un second courant se développe, le prohibitionnisme, qui se fonde généralement sur une condamnation morale ou religieuse de la prostitution. Politiquement, il s’agit de pénaliser tous les acteurs : proxénète, client et prostitués.
Au milieu du XXe siècle, le système abolitionniste s’impose dans le monde. L’Assemblée générale des Nations unies adopte la convention de 1949. A noter cependant que c’est une pleine victoire de l’abolitionnisme et une demi-victoire du prohibitionnisme qui voudrait aller plus loin.
La France ferme les « maisons de tolérance » en 1946 avec la loi Marthe Richard. Elle ne signe cependant la convention de l’ONU qu’en 1960 à cause du maintien des lieux de prostitution dans son empire colonial. Depuis 2003, la France s’éloigne de l’abolitionnisme pour se rapprocher du prohibitionnisme.
Aujourd’hui, les termes sont toujours utilisés, mais leurs sens ont évolués. Prohibitionnistes et abolitionnistes combattent tous deux la prostitution qu’ils veulent voir disparaître. Les prohibitionnistes considèrent les prostitués comme des victimes. Les abolitionnisme comme des victimes d’une exploitation sociale. Droite, gauche, catholiques, féministes... beaucoup se retrouvent sur des positions similaires. La principale différence consiste à s’attaquer ou non aux prostitués eux-mêmes. Mais il y a un consensus fort pour aboutir idéalement à une disparition de la prostitution.
Rares sont les personnes qui ne condamnent pas la prostitution en tant que telle. Qui font la différence entre celle qui est contrainte et celle qui est volontaire. Et concernant la contrainte, le discours est à la confusion entre la contrainte violente et la contrainte financière.
En France, le Syndicat du travail sexuel (STRASS) porte un point de vue tout à fait différent. Il se présente comme "internationaliste" et évoque les pistes de "coopératives composées de travailleur.euse.s s’associant librement".
Un retour au réglementarisme tel qu’il a existé serait une absurdité historique. Celui-ci a existé dans un contexte historique où les droits sociaux étaient absents ou balbutiants. Le réglementarisme défendait deux intérêts concordants : ceux des riches et ceux de l’État. Le point de vue des travailleurs était absent.
L’autorisation de la prostitution est maintenant traversée par deux courants : le courant libéral (qui profite aux riches) et le courant social (qui défend les "travailleurs du sexe"). C’est la vraie question, je crois : libéral ou social ?
La contrainte violente est une conséquence de la prohibition/abolition qui crée de toute pièce un univers illégal et mafieux.
La traite des travailleurs est une question sociale qui peut être résolue en accordant des droits sociaux et une protection des travailleurs par l’appareil d’État contre les riches commerçants.
– Abolitionnisme (Wikipedia)
►http://fr.wikipedia.org/wiki/Abolitionnisme_%28prostitution%29
– Prohibitionnisme (Wikipedia)
►http://fr.wikipedia.org/wiki/Prohibitionnisme_%28prostitution%29
– Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui (Wikipedia)
►http://fr.wikipedia.org/wiki/Convention_pour_la_r%C3%A9pression_de_la_traite_des_%C3%AAtres_humains
– Loi Marthe Richard, France (Wikipedia)
►http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_Marthe_Richard
– Syndicat du travail sexuel (STRASS), France
►http://site.strass-syndicat.org/about
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