Monolecte đŸ˜·đŸ€Ź

Fauteuse de merde 🐘 @Monolecte@framapiaf.org

  • « Mon voisin vote Front national », par Willy Pelletier (Le Monde diplomatique, janvier 2017)
    â–șhttp://www.monde-diplomatique.fr/2017/01/PELLETIER/56999


    Je connais le coin, c’est lĂ  qu’est nĂ© mon pĂšre, son pĂšre, le pĂšre du pĂšre de son pĂšre, etc.
    AprĂšs, des coins comme ça, il y en a plein. Comme dans mon bled, en Gascogne, mais aussi quand nous sommes allĂ©s, il y a 15 jours dans une ville coincĂ©e entre les Pays de la Loire et la Normandie : vitrines en berne, infrastructures en lente dĂ©gradation, des restos qui font cantoches et oĂč mĂȘme les petits patrons vont se rencontrer.
    Quand ils parlent de redĂ©marrage Ă©conomique, Ă  la TV, tu as l’impression qu’ils ont demandĂ© Ă  l’INSEE de ne plus compter les pĂ©riphĂ©ries, seulement les centres mĂ©tropoles et leur banlieue Ă  bureaux
 enfin, lĂ  oĂč ils sont louĂ©s


    Quant aux antagonismes exacerbĂ©s par le cirque prĂ©sidentiel, ça m’a frappĂ©e. Et puis, en rĂ©parant mon blog, je me suis tapĂ©e les vieux articles et j’ai vu que c’était la mĂȘme chose Ă  chaque Ă©lection, Ă  croire qu’elles ne servent qu’à ça, Ă  bien nous Ă©parpiller

    Merci Ă  @aude_v pour son signalement â–șhttps://seenthis.net/messages/594804#message595046

    Une fin d’aprĂšs-midi dans sa serre, l’air s’était alourdi sur la fertilitĂ© grasse du sol — mais nous avions enquillĂ© les verres —, Éric me dit : « Tu rĂ©pĂštes pas Ă  Anissa, vu que t’es parisien, elle veut pas qu’on te dise, j’ai votĂ© Marine, moi, deux fois
 Quand je l’entends, elle me fout les poils cette femme
 Je sais pas, c’est comme elle parle des Français, t’es fier
 Le parti Ă  la Marine, dans le coin, je connais des gens qu’il a bien aidĂ©s
 J’étais prĂšs de payer ma cotise et tout, mais j’ai arrĂȘtĂ©, mĂȘme de voter
 On a Ă©tĂ© fĂąchĂ©s un an pour ça avec Thierry et Marie-Paule
 Elle, c’est une rouge, elle bosse au collĂšge, Ă  la cantine
 Moi j’étais pas fĂąchĂ©, c’est une connerie
 Ils voulaient plus nous voir. Toi, tu te fĂącherais pour ça ? Tu trouves que c’est grave, toi ? »

    Je n’ai pas rĂ©pondu, j’étais ivre, et dans la senteur Ăącre, profonde, des verdures de la serre, j’étouffais. Je n’ai pas trouvĂ© ça grave non plus. Peut-ĂȘtre parce que mon existence s’était resserrĂ©e autour de ce hameau isolĂ© ? Peut-ĂȘtre parce que, depuis trois ans, des militants, je n’en vois plus autant ? De « 100 % militant », je suis devenu « militant en retrait », moins pris par les groupes auxquels j’ai donnĂ© tant. Peut-ĂȘtre parce qu’avec la reconnaissance dans le milieu restreint oĂč ma vie militante est « validĂ©e », je n’ai plus Ă  prouver que je suis un militant modĂšle ? Peut-ĂȘtre parce qu’Éric est une de ces personnes qu’on quitte en Ă©tant de meilleure humeur ?

    À chaque aller-retour Ă  Leclerc ou Carrefour, je croise des gens sans le sou, abandonnĂ©s. Alentour, des routes au goudron trouĂ©, des dĂ©partementales parfois fermĂ©es
 Dans les bourgs traversĂ©s, il n’y a plus ni bureau de poste, ni mĂ©decins, ni infirmiĂšres, ni pharmacie, quasiment plus de bistrots, pas d’accĂšs Internet, mais des magasins clos et parfois, aux fenĂȘtres, des drapeaux bleu, blanc, rouge. Des classes de primaire et des Ă©glises ferment. Les associations de sport mettent la clĂ© sous la porte. Les sociĂ©tĂ©s de chasse et les majorettes se renouvellent mal. Le volume des impayĂ©s EDF (5) explose. Les jeunes s’enfuient dĂšs qu’ils peuvent. Les dĂ©nonciations de voisins au centre des impĂŽts augmentent, les violences intrafamiliales et les « dragues » des filles Ă  la limite de l’agression aussi. Pas d’emplois. Dans chaque village, des maisons anciennes et dĂ©tĂ©riorĂ©es, en vente. À Noyon, Chauny, CompiĂšgne, Soissons, hiver aprĂšs hiver, des trains sont supprimĂ©s. Dans la campagne, les cars circulent de moins en moins.
    Les lieux de rencontre se disloquent

    Et puis, Ă  l’entrĂ©e des bourgs, des panneaux jaune vif, un Ɠil (iris bleu ciel) au centre, avec l’avertissement « Voisins vigilants » (les cambriolages sont pourtant exceptionnels). Ici, tout se dĂ©grade continuellement depuis vingt ans. Ce ne sont pas seulement les lieux de rencontre qui se disloquent (faute de gens pour s’en occuper) ; les moyens d’y accĂ©der disparaissent eux aussi : les routes, l’argent, les rĂ©seaux d’accĂšs. Les communes entre Chauny, Soissons, Noyon, Vic (sauf rares ghettos de riches) sont quasi ruinĂ©es. Les anciens sont trop pauvres pour secourir leurs enfants, et les enfants sont trop pauvres pour secourir leurs parents. C’est dans ce contexte que le FN rĂ©alise des scores Ă©levĂ©s (6).

    • DĂ©s qu’il s’agit d’électeurs du FN c’est de suite la descente dans une certaine France profonde et cerise sur le gĂąteau Anissa qui vient du Maroc. Tous les poncifs Ă©lectoraux sont dĂ©foncĂ©s. Que serait l’analyse trumpiste sans un ou deux rednecks ?
      Je trouve ca toujours un peu débectant.
      Et mon voisin cadre qui a fait des Ă©tudes, qui vit bien ça vie je peux lui en balancer une ?
      Je ne dis pas que l’article est sans qualitĂ©s, mais c’est tout Ă  fait l’exemple de pourquoi je ne lis plus le diplo.

    • Lui parle de ce qu’il connait
 dans d’autres classes sociales, on sait tenir sa langue et se serre les coudes, mais oui, j’en connais Ă  tous Ă©tages et pour des tas de motifs diffĂ©rents.
      Le racisme bourgeois passe d’autant mieux qu’il se fait feutrĂ© et pontifiant, qu’il est souvent Ă  mille lieux de Dupont Lajoie auquel on pense toujours !

    • Je ne sais plus si c’est un texte de Baldwin ou de Zinn qui centre l’image raciste du petit blanc et qui dĂ©roule tout autour la litanie des lois sĂ©grĂ©gatives et violentes votĂ©es par
      le gouvernement américain et les élites politiques et économiques de chaque état.
      Lu sur twitt : Ce n’est pas que les francais ne soient pas racistes, homophobes et sexistes mais c’est qu’ils ne l’assument pas dans le vote.
      Tout le monde crie au fascisme mais le racisme passe Ă  la trappe, ce n’est plus une donnĂ©e repoussoir.
      Ce n’est pas dĂ©bectant quant Ă  l’auteur mais ca l’est quant au diplo.

    • Oui et non, on a vu avec les chiffres, les analyses dĂ©mographiques, par exemple dans l’émission avec Emmanuel Todd, que oui, il y a bien des cadres, des riches, qui votent FN, mais pas tant que ça. Par rapport Ă  d’autres partis, c’est trĂšs faible, et par rapport Ă  leur Ă©lectorat ouvriers+employĂ©s c’est faible aussi. Donc, bah si, ya bien raison de parler de ce gros morceau de leur Ă©lectorat.