Enki Bilal : « L’autofiction sociétale ne m’intéresse pas »
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Dans quelle époque vivons-nous ?
Dans une époque d’oxymores multiples. D’un côté le monde progresse à vitesse grand V, de l’autre il régresse comme jamais. Une énorme faille s’est créée : le déficit de #transmission. Je suis favorable au progrès. Il a littéralement explosé avec les avancées du monde numérique, qui sont sans doute plus importantes que celles engendrées par Gutenberg avec l’invention de l’imprimerie. Le problème est que cette révolution a complètement stoppé la transmission d’un certain nombre d’éléments historiques et culturels, comme si l’accélération des choses n’avait pas permis de les digérer. Prenez l’exemple de la Shoah : il y a toute une génération qui ne sait pas ce que c’est aujourd’hui. Ce n’est la faute de personne, c’est ainsi. Ce défaut de mémoire est arrivé brutalement, comme un AVC. Un fossé s’est creusé avec ceux qui ont un accès parcellaire à la culture. Cette régression se fait également sur le plan moral. L’obscurantisme est de retour. Dans le même temps, l’homme envisage d’aller sur Mars. L’oxymore absolu.