Trois rêves, tous notés
Une route, connue par cœur
Accueilli par les étoiles
Le silence des matins cévenols
La lumière sur la montagne
Et cet air, dont je suis déjà saoul après une nuit
Peu de choses bougent
Quelques insectes matinaux
C’est bien tout. Oublie. Sois nu
Route du contrejour vers les Vans
Plateau ardéchois comme dans mes récits
Je vis dans mes fictions
Chaque virage, chaque arbre
Chaque caillou, chaque pan de mur
Contient son souvenir, certains lointains
Chaque arbre, chaque caillou,
Chaque pan de mur, Chaque virage
Contient son souvenir, certains heureux
Chaque caillou, chaque pan de mur,
Chaque virage, chaque arbre,
Contient son souvenir, certains tristes
Chaque pan de mur, chaque virage,
Chaque arbre, chaque caillou,
Contient son souvenir, certains tendres
Assis sur la margelle
L’œil dans la vallée
Les discussions mezzo voce
Assis sur la margelle
J’ai rendez-vous
Avec une buse
Passe la buse
Passe Robert-le-Diable
Passe un Rafale
Quelques exemplaires d’ Une Fuite en Egypte
Pour les amis d’ici, dont l’apiculteur
Contre deux pots de miel, fameux troc
La maison est défigurée
Par les cris, les paroles, les balbutiements
Et les pleurs d’une petite fille, Sara
Est-ce que je peux vraiment
Être à la fois un Grand-Père, Pépé
Et un cœur brisé ?
Premier endormissement de sieste,
Le sentiment d’être un cachalot
Qui retourne au fond de la mer
Le courant d’air
Qui vient caresser tes parties nues
C’est agréable aussi
Finalement ce qui rend une caresse
Délicieuse, émouvante
C’est sa surprise !
Une sieste cévenole, la première
En pleine chaleur, peut-elle laver
À elle seule, la fatigue d’une année ?
Un rêve, B.
De la douceur
Un espoir
L’année durant tu rêves d’être assis
À cette table sur ce vieux fauteuil
À cette fenêtre, et écrire
Tes vieux pieds nus
Sur le plancher,
Noirs de poussière, heureux !
Ce moment de l’après-midi
Quand la chaleur prend
Le pouvoir en silence
Tu entres dans la vieillesse
Malgré tout, bien malgré toi
Redresse-toi, sois digne !
Ne pense plus
Écris
N’y pense plus
Ne pense plus
Ne pense plus à elle
N’y pense plus
Trente pages de Chevillard et ça repart !
Minuit ne me doit rien
Pour ce beau slogan publicitaire
Puis ce sont les bourdons
Et les gros coléoptères
Qui prennent le pouvoir
Puis les cigales qui ne le lâcheront plus
Jusqu’au soir, quand elles seront renversées
Par les étoiles et les chauves-souris
Plus une seule distraction
Et quelle ardeur au travail
À écrire !
Ça y est j’ai fini
De me récurer le nez pour l’été
L’air d’ici va le garder propre un mois
Dans l’ancienne armoire
Les jeux de société des années septante
Un jour je serai seul à en connaître les règles
J’installe une partie d’échecs
Pour Émile qui busille dans le jardin
En pleine chaleur, je prends les noirs
Mon unique sténopé, au-dessus du lit
Une nuit, la lune dessine une courbe
Qui sort du cadre pour y retourner
Parfois je ne crois pas mon correcteur
Et je vérifie dans le dictionnaire papier
Je suis bien du millénaire précédent, 1964
Sténopé
Et non sténopée
Comme lycée
Cherchant sténopé
Je tombe sur sucer
Soupir
Va donc te jeter
Dans l’eau froide
De la Cèze !
Dans le Rapport sexuel existe
La dernière date est celle du 12 juillet
Nous sommes le 13, changeons d’héroïne !
Dans les Cévennes
La seule application qui fonctionne
C’est le traitement de texte
C’est comme si
J’avais emporté
Une machine à écrire
Dans le gourd
L’eau fraîche
S’y jeter sans réserve
Immuable trou d’eau
Immuable caresse de cette eau douce
Immuables lumières de fin de jour
Mais cette année
Moins qu’une autre
L’immuable ne me guérit de rien
Voisinage bruyant d’une famille
Incapable d’assister au spectacle
Si médiocre soit-il, sans parler
À chaque feu d’artifice
Je pense à la faune alentour
Terrorisée
Mouvement de foule, Marseillaise
Après le feu d’artifice, en route vers le bal
Tous ces électeurs ! Tous ces veaux
Pendant le bal
J’observe le ciel
Qui se repeuple
Après les grands effets décoratifs
Le placement sûr, discret et parfait
Des étoiles dans le ciel
Je me demande quel genre de retraite
Coulent les musiciens de bal
Qui m’ont fait danser ici adolescent
Il n’y a plus de filtre à café
L’immuable ne guérit pas tout
La Marseillaise des veaux