• @raspa
    On veut contraindre nos vieux militants à respecter les procédures de parole... c’est sans doute pas gagné ! :-D
    (article de 2 de mes anciennes profs de fac sur l’arrivée de nouvelles élues au Conseil régional d’Ile de France dans les années 2000. Par ailleurs super intéressant sur l’analyse de l’origine des difficultés rencontrées : ce qui relève du genre, ce qui relève du premier mandat, ce qui relève des capitaux scolaires, militants, politiques, professionnels (ou de leur absence)).

    Comment devenir un(e) professionnel(le) de la politique ? | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2007-2-page-251.htm#re12no12

    Nos observations font tout d’abord apparaître que, quel que soit leur capital politique, et à rebours des stéréotypes genrés, les hommes bavardent beaucoup plus que les femmes avec leurs voisins lorsque les autres « commissionnaires » s’expriment. Certains, les plus aguerris, se lèvent même pour pouvoir parler avec un camarade assis plus loin – alors qu’aucune femme ne s’autorise à le faire. Si l’on ajoute à cela que les hommes coupent beaucoup plus souvent la parole que les femmes et qu’ils la prennent davantage avant qu’on ne la leur ait donnée (même si les moins expérimentés d’entre eux sont plus respectueux des règles de procédure), on constate que les hommes, notamment les plus dotés en capital politique, manifestent comme un droit « naturel » à s’exprimer en commission. Tout dans leur comportement révélant combien il leur est plus difficile qu’aux femmes de respecter le cadre contraignant et artificiel des règles de procédures relatives à la distribution de la parole.

    Inversement, tout dans le comportement des femmes (a fortiori des nouvelles élues) manifeste leur sentiment d’illégitimité à s’exprimer dans ce type d’enceinte. D’abord, elles renoncent beaucoup plus facilement que les hommes à prendre la parole, après l’avoir demandée, au motif qu’un intervenant précédent aurait déjà dit ce qu’elles avaient à dire. Leurs interventions, ensuite, sont beaucoup plus courtes que celles des hommes, et ce parce qu’elles posent plus de questions qu’elles n’expriment une opinion. Leurs prises de parole visent, en effet, beaucoup plus souvent que celles des hommes, à obtenir des précisions, des informations, voire des confirmations. Et à l’inverse, même lorsqu’ils posent des questions, les hommes ne manquent jamais de faire précéder leur intervention d’une analyse qui, au fond, affirme, rappelle et pour tout dire consolide avant tout leur propre position politique.

    • Effectivement on a du boulot.
      Pendant ma dernière formation, j’ai constaté qu’il y aussi un gros fossé générationnel. Les plus âgé.e.s, aussi bien les hommes que les femmes, sont plus enclin.e.s à couper la parole et à répondre en ping-pong dans des débats de groupe. Ils.elles ne semblent tout simplement pas comprendre la logique de telles discussions. Ce sont les plus réfractaires aussi quand on propose la mise en place de règles de distribution de la parole, même de très simples (ne parlons même pas d’une alternance f/h). Et quand ces règles sont posées, elles peuvent ne pas suffire. Il y aura toujours cette prétention que « mais il faut bien que je réponde » ou « ce que j’ai à dire est vraiment important ».
      En revanche, tout pareil pour le contenu de la prise de parole. Ca m’avait jamais frappé avec autant d’évidence.
      Dans un groupe auquel je participais au Québec (tu sais de quoi je parle...), on avait fait intervenir un observateur qui a comptabilisé nos prises de parole, la répartition, la distribution compte-tenu du temps et du nombre de personnes, la longueur de certaines interventions, leur utilité relative... le simple énoncé de ces statistiques avait fait changer pas mal de choses dans les têtes (en tout cas dans la mienne) et c’est par la suite qu’on a mis en place des règles plus rigoureuse de distribution de la parole. Et après quelques rounds de mise en place, c’était mieux pour tout le monde et le niveau des discussions (selon l’avis général) était nettement plus élevé. Nos réunions étaient plus efficaces.
      Du coup, à mon avis, si ce n’est pas déjà acquis par les membres d’un groupe dès le début, c’est sur la longue durée qu’il faut espérer faire changer des pratiques. Imposer des règles de distribution de la parole sans constater et exposer le problèmes ne suffit pas et ça laissera toujours certain.e.s penser que « les règles, c’est bien joli, ça les amuse, mais j’ai quelque chose d’important à dire. »
      Je vais essayer de lire l’article en entier (un jour)

    • @raspa Dans ce que tu dis, la raison d’être des règles de prise de parole (au-delà de limiter le bordel), à savoir laisser potentiellement à chacun⋅e la place de s’exprimer parce que quand c’est en mode foire d’empoigne, ça laisse les plus faibles / timides / discriminé⋅e⋅s sur le carreau, n’est en fait vraiment pas une évidence pour tout le monde... Ça me fait cogiter sur la façon dont je présente les règles d’animation lors d’une intervention (et quand tu es intervenant⋅e externe sur demande du groupe, l’avantage est que les règles posées sont globalement pas si mal respectées... Ou alors on fait particulièrement peur pour les faire respecter :-D )

      Votre observation québécois, il venait d’une asso ? Il avait des grilles d’observation qui sont trouvables quelque part ? Parce que ça peut être drôlement intéressant à reproduire ce genre de choses, soit pour des collectifs auxquels je participe, soit que j’accompagne.