• « On remet la photo choc à sa bonne place »
    Entretien avec Valentina Camu et Yann Levy, de la revue photographique États d’urgence

    Par Ferdinand Cazalis

    http://jefklak.org/?p=4242

    (via CQFD )

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    La nouvelle revue États d’urgence regroupe six professionnel.le.s de la « photographie sociale ». Tous les ans, 128 pages de regards au long cours sur nos urgences quotidiennes : casse sociale, crise migratoire, violence d’État, catastrophe écologique… Entretien à deux voix pour interroger le rôle de la photo dans les luttes : l’histoire est-elle soluble dans l’esthétique ?

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    Prendre une bonne « photographie sociale », comme vous dîtes, est-ce aussi prendre une belle photo ?

    Y. L. : Prenons un exemple : depuis un certain temps, les médias se focalisent sur l’esthétique de l’émeute, avec les affrontements de personnes habillées de noir et en cagoule. Et nous, en tant que photographes, on voit bien que photographier cela est plus vendeur. Mais on perd du même coup toutes les autres réalités qui font une manifestation. On se retrouve donc avec 50 photographes autour de 10 ou 15 personnes qui lancent un pauvre cocktail Molotov : l’info est réduite à cela. Et ils essaieront tous de vendre la même photo du CRS en flammes, car ils savent que c’est ce que veulent les rédactions en termes de « belle photo » : du spectaculaire et de l’effrayant. Alors qu’au même moment, il se passe plein de belles choses parmi les milliers de personnes présentes.