Vanderling

La conversation n’est féconde qu’entre esprits attachés à consolider leurs perplexités.

  • Ratcharge (2004-2014) était un #fanzine qui disséquait le quotidien avec le même acharnement que la #musique. Au fil de ses trente-quatre numéros, il a montré ce que pouvait être la #littérature_punk : pas de nostalgie, une démarche autonome de A à Z et des récits directement tirés du vécu, couchés sur le papier comme trois accords plaqués dans un fracas de larsens. Errances urbaines, squats, dérives sous acide, apnées salariales, guerre contre l’ennui : une littérature brute, héritière bâtarde de la contreculture américaine et du vide existentiel de la banlieue parisienne.

    http://www.la-petroleuse.com/punk-rock/4442-entre-un-neant-et-un-autre-ratcharge.html


    Extrait (p.102) :

    « La question, c’était de savoir pourquoi je n’arrivais pas à me débarrasser de cette dépression chronique que je me traînais depuis une dizaine d’années. Pourquoi la lose était partout, sur chaque trottoir, sous chaque tapis, dans chaque bouffée de nicotine et chaque gorgée de vodka, chaque baiser et chaque opportunité. Pourquoi les nouvelles étaient toujours mauvaises. Pourquoi je me sentais aussi seul, et pourquoi j’avais tant l’impression d’être déjà mort. Lors des jours les plus sombres, le scénario paraissait plausible – on était déjà tous crevés, tous ensemble en enfer. La délivrance n’arriverait pas, elle avait loupé sa correspondance et s’était allongée sur les rails du métro, nue, fermant les yeux jusqu’à ce que le vrombissement touche le bord de son crâne et fasse cesser la douleur. Ces jours-là, je regardais le tableau de Jésus-Christ sur le chauffage glacial de ma cuisine et j’implorais son pardon pour avoir commis le péché ultime, celui de ne pas croire en lui, ni aux autres, ni à moi. La vie n’existait pas, j’étais perdu, c’était clair, net, et Tony était encore plus foutu que moi, sauf que lui, par un tour de passe-passe qui m’était alors inexplicable, semblait presque se réjouir de cette situation. « C’est moi qui fait chier ? Tu t’arranges pas Alex, j’essaye juste de t’aider… Ton problème c’est que tu prends tout trop dramatiquement, t’es une vraie diva et t’appelles « dépression » ce que la plupart des gens appellent juste la vie. Tu sais ce que tu devrais faire ? Accepte ton sort. Tout est de la merde, OK, la belle affaire ! Fais avec, comme tout le monde. Arrête de te débattre et accepte la noirceur, serre-la dans tes bras, arrête de faire du sur-place, accepte les ténèbres. Putain me regarde pas comme ça, tu vois d’autres solutions, toi ? T’as déjà tenté tout le reste non ? »

    + d’extraits par Mat Von Petrolo :
    http://www.la-petroleuse.com/blog/entre-un-neant-et-un-autre