Philippe De Jonckheere

(1964 - 2064)

  • C’est nu que j’écris
    Les récits
    Des Anguilles

    Je pisse
    Je me pèse (121,4 kg !)
    J’écris

    Dans mon rêve de ce matin
    Mes voisins cévenols ourdissent
    Un traquenard pour me tuer !

    Je découvre son dernier mail
    Qui répond sans répondre
    Cette femme est une artiste

    En revanche
    Je le lis dans les lignes
    Elle ne reviendra jamais

    Où je découvre
    À 52 ans, il serait temps
    Le sentiment de la jalousie

    Matins d’été
    Aller au travail
    Rues peu animées

    En revanche
    Peu de compagnie
    Au bistro

    Travailleurs détachés :
    Macron déclenche
    Une crise diplomatique avec la Pologne

    La Pologne
    Fustige
    L’arrogance de Macron

    Harvey
    Pire ouragan depuis Katrina
    S’abat sur les côtes du Texas

    Trump gracie
    Le très controversé
    Shérif Arpaio

    Et finalement
    Après m’être curé le nez
    Je lui envoie un long mail

    Allemagne :
    Un infirmier soupçonné
    D’au moins 90 meurtres

    Ma cheffe : «  ? tout ce qui ne nous tue pas
    Nous rend plus fort
    Moi : ? jusqu’à ce que quelque chose nous tue »

    Même au café
    On trouve
    Des tire-aux-flancs !

    J’assemble les récits
    Qu’on me confie
    Avec ceux que j’imagine

    Les fictions
    Mes vraies boussoles
    Parfaitement détraquées

    Longtemps que j’ai perdu
    Toute illusion
    De m’orienter

    Tu as rendu arables des terrains trop vastes
    Désormais tu creuses des sillons profonds
    Dans ton minuscule jardinet

    Tu avais des prétentions d’empereur
    Tu as revu tout à la baisse
    Désormais tu vis dans une cabane

    Dans le café trois auteurs
    Ecrivent et s’observent
    Quelle est le plus inspirée des trois ?

    Ce n’est même plus du bruit au café
    Un vacarme. Tu décides
    De l’accepter. Pour voir. Pour entendre

    Au BDP je suis assis à la table
    Sur laquelle est née Ursula
    Pierre Hanau s’en souvient peut-être

    Quand j’écris au stylographe
    Je perds tout repère
    Et je perds le rythme !

    Et de douze
    Petits poèmes
    Écrits au café !

    Certains jours d’été
    Te rappellent
    Tous les étés !

    Sur un chantier des radiateurs
    Que l’on hisse à de hautes fenêtres
    En peine canicule

    Au restaurant d’entreprise
    Tu accuses un découvert
    De 0,64 euros

    De retour au café, les deux auteures
    Que tu avais laissées loin derrière
    Font leur retard, et elles sont trois maintenant

    Tu croises Julien
    En chemin vers son atelier
    De bandes dessinées

    Vous parlez d’un roman en cours
    Il y est question de l’île de Pitcairn
    Voir l’Atlas des îles abandonnées

    Tu remontes dans ton open space
    Et ce n’est plus la même limonade
    L’île de Pitcairn est repassée de l’autre côté

    Poème écrit avec les mains
    Qui dérapent sur le clavier
    (De sueur)

    Et tout d’un coup
    La chambre de Zoé
    Est rangée (et propre)

    Ce n’est pas tous les jours
    Que l’on atteint
    Un Everest personnel

    Un coup de téléphone de Sarah
    Me rappelle utilement
    Que je suis le père de quelques enfants

    Des fois je n’écris pas si bien
    Et mes fictions sont faibles
    Me dis-je en ne recevant pas de réponse

    Commençant le travail de relecture
    Des Anguilles les mains mouillées
    Je me souviens à nouveau de mes rêves

    Et puis je les oublie
    À nouveau
    Jusqu’à la prochaine relecture

    Modifiant telle ou telle phrase
    Des Anguilles les mains mouillées
    Je fais attention de ne pas toucher au rêve

    Le garagiste t’a soulagé de la moitié
    De tes économies, constates-tu
    Sur tes comptes bancaires en ligne

    Coup de téléphone à mon cousin Raymond (47’)
    Coup de téléphone de mon voisin cévenol (13’)
    Coup de téléphone de B. (une petite heure)

    Voilà bien la fiction : le traquenard
    De mes voisins cévenols en rêve, dans la réalité
    Mon voisin Georges prend de mes nouvelles !

    Et la semaine prochaine
    L’apiculteur qui monte à Paris
    Me livre mon miel à domicile !

    #mon_oiseau_bleu