• Au Québec, en matière d’adoption, il y a eu la génération des « fillettes chinoises ». Énormément de jeunes filles asiatiques qui ont aujourd’hui entre vingt-cinq et trente-cinq ans ont grandi dans coins reculés du Québec au milieu de gens qui demandaient à leurs parents, devant elles : « et alors, vous êtes allés la chercher où ? Elle ne vous a pas coûté trop cher ? ». Parce que c’est ça, ce qu’il se passe. Les gens n’ont aucun filtre ! Donc il faut être capable de répondre et de soutenir son enfant dans ces cas-là. Il faut être prêt à accueillir un enfant d’une autre couleur, d’une autre culture…

      Ça fait tellement écho à ce que vit une copine adoptée en Inde par ses parents blancs catholiques français (et très travaillée par la question de ses origines)... à qui sa mère a sorti un jour, quand elle était ado « non mais estime-toi heureuse, si tu étais resté là-bas, tu serais déjà mariée, à assumer plein de tâches domestiques pénibles ».

    • @raspa
      Ça me rappelle une conversation trèèèèèèèès récente !

      Que peut-on faire pour la cause afroféministe quand on n’est pas femme ou pas noire ou ni l’un ni l’autre ? Comment peut-on être un-e bon-ne allié-e ?

      Amandine Gay : En conscientisant les personnes blanches sur leur propre privilège blanc. Le grand travail des allié-e-s, quels qu’ils soient, doit se faire dans leur communauté.
      [...] Pour nous, c’est très fatigant de devoir toujours faire de la pédagogie. En plus, cela nous met tout de suite dans une situation confrontationnelle : notre interlocuteur n’entend pas que son propos est problématique ou raciste mais qu’on l’a traité, lui, de raciste ! Et là, il n’y a plus de discussion possible. Alors que lorsque cela vient d’un pair, en général, la remise en question est plus facile.

      Donc pour moi, les allié-e-s, si ils et elles ont compris ce qu’il se passe, doivent faire comprendre à plus de gens qui leur ressemblent qu’il y a un problème. Parce que nous, personnes racisées, on le sait déjà et on est fatiguées de devoir faire de l’éducation gratuitement, sur notre temps libre, alors qu’on on est déjà discriminées.

    • @georgia oui :D

      J’en profite pour souligner que c’est plus facile à dire qu’à faire... quand justement il y a aussi des injonctions contraires, selon lesquels il ne faut pas prendre la place, parler au nom, attirer l’attention au détriment des premiers et premières concernées.

      Et je pense aussi que selon les situations, une parole rapportée, portée par ces fameux allié-e-s, pourra manquer de connaissance, d’authenticité, de légitimité.

      A poursuivre.

    • @raspa
      Encore et toujours sur notre sujet :

      Harvey Weinstein et les hommes qui savent. - Crêpe Georgette
      http://www.crepegeorgette.com/2017/10/13/harvey-weinstein

      La parole masculine compte dans des cas de violences sexuelles contre les femmes. Elle compte davantage que celles des femmes victimes. On ne vous dira pas que vous avez vos règles, que vous vous habillez trop court, que vous vous faites des idées, que vous cherchez les histoires, que vous avez un passé douteux, que vous êtes frustrée, que vous êtes lesbienne, que vous êtes hystérique, que vous êtes en pré ménopause, que vous mentez, que vous êtes vénale, que vous êtes trop sexy, que vous êtes trop moche, que vous vous faites un monde de rien, que vous exagérez tout, que vous n’avez pas d’humour, que vous êtes coincée, que vous devriez vivre sur une île déserte, que vous êtes une salope, que vous l’avez un peu cherché, que vous avez mal interprété, que vous êtes une pute, que vous êtes frustrée, que vous aimeriez bien que ca vous arrive.
      Vous êtes le neutre, l’objectivité, la mesure, la tempérance.

      Mais aussi :

      Les hommes ont des agendas pour savoir quand on doit parler et de quoi on doit parler. [...]
      Un agenda et une balance pour peser les crimes sexuels.

      Nous nous retrouvons, nous femmes, à la merci des hommes. De ceux qui violent et de ceux qui regardent. De ceux qui comptent les points. De ceux qui établissent des agendas avec les bonnes dates pour porter plainte. De ceux qui recensent les vraies agressions des fausses. De ceux qui analysent posément. De ceux qui feignent de s’étonner. De ceux qui protègent des agresseurs, des harceleurs, des violeurs, des voyeurs. J’aimerais dire que la parole des femmes est libératrice, qu’elle va lever la chape de plomb sur les violences sexuelles que nous subissons. Cela se fera selon un agenda décidé par des hommes. Ils nous croiront peut-être ou pas. Maintenant ou dans dix ans. Ils décideront ce qui est grave ou pas, ce qui vaut la peine ou pas.

      (Bon, évidemment, je t’invite à lire l’article en entier. Mais je trouve que ces deux extraits montrent bien le côté ambivalent de cette affaire d’engagement des privilégié⋅e⋅s).

    • @raspa
      Ça fait du lien, et en plus, c’est Nicolas Haeringer ;-)
      Ouvrir les yeux, puis nettoyer la porcherie | Le Club de Mediapart
      https://blogs.mediapart.fr/nicolas-haeringer/blog/161017/ouvrir-les-yeux-puis-nettoyer-la-porcherie

      La lecture des témoignages sous le #BalanceTonPorc (et la masse des #MeToo), par lequel des victimes de harcèlement se signalent, brisent le silence et donnent à voir le mal que les hommes cis font poser de nombreuses questions aux hommes cis qui se pensent solidaires : comment, justement, être réellement solidaire ? Comment être un allié réel ? Comment contribuer à briser notre part du silence ?