kaparia

animateur d’un espace de création dans le quartier de Kypseli, Athènes

  • On viendra vous faire la guerre avec la parole poudrière
    GAËL FAYE - IRRUPTION

    On sort en trombe, en nombre, on se déverse en plaine,
    En centaines, en millions, en milliards ou en millièmes
    De quelques simples gouttes à des marées humaines
    Des jaillissements d’aurore pour éclairer des emblèmes
    Des lanternes dans la tête si l’on plonge dans les ténèbres
    On nous appelle PD, blancos, bougnoules ou bien nègres
    On vit dans la riposte, on réfléchit après-coup
    On vit extra-muros donc on arrive par vos égouts
    Nous sommes des cargaisons de femmes voilées et des youyous stridents
    Des rastas, des casquettes tournées, des voyous prudents
    Des espoirs accrochés, des paradis assassinés
    Des parents épuisés enfantant des gosses méprisés
    De la marmaille bruyante, des petits morveux frisés
    Engraissés d’allocations qui donnent des prétextes à voter
    Trouver des bouc-émissaires, les égorger pour l’Aïd
    Mourir dans une clairière sans treillis pour ce pays
    L’affiche est couleur sang et Manouchian vient pas d’Auvergne
    Le tirailleur t’emmerde, il a fécondé ta grand-mère
    On investit Brongniart, le dos au mur comme Jean-Pierre Thorn
    On s’en fout du grand soir parce que la nuit, c’est bien trop morne
    On veut même pas de soleil mais des éclipses pour faire l’amour
    Pour que l’instant soit bref, intense comme un fruit qu’on savoure
    Aux armes miraculeuses on a lu Césaire et Prévert
    On viendra vous faire la guerre avec la parole poudrière
    On désigne plus l’ennemi parce qu’il est partout même en nous
    On va mourir debout parce qu’on a vécu à genoux
    On est sourds aux slogans élimés par trop de manifs
    On devient arrogants on veut rimer comme des canifs
    On n’a plus 20 ans mais on en n’aura jamais 60
    Car on bouffe du Bisphénol à l’heure d’une planète suffocante
    On fait de nous des enfants pour nous interdire des luttes
    Donc nous on pend Peter-Pan on va redevenir adultes
    On a coincé nos rages entre le mérite et l’héritage
    Et les puissants confisquent ce que les pauvres se partagent
    À leurs chaises musicales, personne ne joue, personne s’assoit
    On occupe du terrain, être indigné ça va de soi
    Angela ké fend’tchou aw pendant que ton papa est bien là
    On va ouvrir les portes de Soledad ou Attica
    Pharmaco-dépendants des OGM pour nous doper
    J’ai recraché l’assiette, monté le cheval et galopé
    Braqué un RER-dilligence. L’Apache de Belleville
    Viendra crier vengeance comme Balavoine arrive en ville
    Ils veulent nous assigner des places et nous faire saigner
    Les amoureux aux bancs publics n’arrêteront jamais de s’aimer
    Depuis que nos checks ressemblent à des poignées de main de Montoire
    On ne laissera personne parler au nom de nos espoirs
    On n’est pas des victimes, encore moins des condamnés
    On arrivera de l’aube en irruption spontanée.

    https://www.youtube.com/watch?time_continue=110&v=2CT2p4adHXA