• La tension monte autour de France Télévisions
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    La pression sur #France_Télévisions augmente : mercredi 25 octobre, devant la commission des affaires culturelles du Sénat, la ministre de la #culture Françoise Nyssen a plaidé pour une « réforme de fond » de l’audiovisuel public, proposant trois « axes de transformation » : le périmètre des entreprises #publiques du secteur, leur financement et leur gouvernance.

    Cette volonté générale était connue, mais la ministre a davantage poussé les feux du changement. France Télévisions doit s’adapter à ce nouvel horizon, alors qu’elle est encore en train de déterminer quels postes elle va réduire pour réaliser les 50 millions d’euros d’#économies exigées par le gouvernement par rapport à son budget 2018.

    Le 17 octobre, alors que les syndicats de France Télévisions étaient en #grève, a eu lieu la première réunion du comité stratégique, l’instance du conseil d’administration de France Télévisions désignée pour réviser le budget. Selon nos informations, la direction a esquissé des pistes d’économies chiffrées : les charges hors salaires (renégociation des achats, des abonnements à la mesure d’audience Médiamétrie, des frais de diffusion…) pour environ 10 millions d’euros ; les émissions et les sports (renégociations de magazines ou jeux, réexamen des droits du tournoi de tennis de Roland Garros, de la coupe de la Ligue de football ou des Jeux olympiques…) pour 20 millions d’euros environ ; le cinéma pour environ 8 millions d’euros environ ; la création audiovisuelle (séries, téléfilms, dessins animés et documentaires) pour 12 millions d’euros environ, sachant que ce budget avait été augmenté de 20 millions d’euros pour atteindre 420 millions en 2018…
    Toutefois, les membres du comité stratégique ont estimé ne pas pouvoir valider à ce stade ces pistes. « Il y a un risque de cercle vicieux, avec une baisse de la qualité de nos antennes, une donc baisse des audiences, puis des ressources… », commente Marc Chauvelot, élu de la CGT, syndicat représenté au comité stratégique.
    Mme Nyssen veut préserver la création et le sport

    Pour la direction, la voie est très étroite : après avoir rappelé que le budget 2018 de France Télévisions restait supérieur à son budget 2016, la ministre de la culture a explicitement dit mercredi que l’entreprise devait « préserver » la création mais aussi les événements sportifs. Elle a suggéré des coupes dans « les frais de structure : technique, diffusion, frais généraux ».

    A ce bras de fer feutré s’ajoute la perspective de bouleversements à moyen terme. L’un d’eux est vu d’un bon œil par France Télévisions – la ministre veut engager en 2018 la réflexion sur la réforme de la redevance qui finance l’audiovisuel public. Les autres sont plus incertains : Mme Nyssen a choisi de « ne pas écarter » la piste de la fusion entre France Télévisions et #Radio_France, ardemment défendue par les sénateurs Jean-Pierre Leleux et André Gattolin. Jusqu’ici, le ministère avait pourtant laissé entendre qu’une « #BBC à la française » n’était pas à l’ordre du jour, préférant des synergies « par projets ».

    « Le gouvernement a demandé une intensification des coopérations sur l’offre culturelle, les réseaux locaux et les systèmes d’information, a expliqué la ministre mercredi. Il faudra ensuite dire s’il faut aller plus loin. Nous ne privilégions aucune issue. » Autre nouveauté : la ministre a suggéré d’« aligner » les dates des contrats d’objectifs et de moyens signés avec l’Etat, afin que celui de France Télévisions et celui de Radio France ne soient pas décalés, voire coïncident avec les dates des élections présidentielles. Elle a rappelé que le gouvernement voulait retirer au Conseil supérieur de l’audiovisuel la nomination des présidents d’audiovisuel public, pour la confier aux conseils d’administration des entreprises concernées. De quoi soulever quelques questions sur la fin des mandats de Delphine Ernotte et Matthieu Gallet, prévues en 2019 et 2020…
    « Un mammouth à dégraisser »

    Les réseaux régionaux de France 3 et France Bleu pourraient aussi proposer ensemble des « services en ligne » ou des « programmes communs multicanaux », a suggéré Mme Nyssen, en rappelant « qu’il y a déjà des échanges », dans l’immobilier par exemple. France Télévisions ou Radio France sont officiellement ouverts à ce type de synergies, qui rappelle leur offre d’information commune France Info. Mais en interne, on souligne que de tels projets ne dégagent pas d’économies à court terme. Une fusion supposerait par exemple d’aligner la convention des salariés de France Bleu sur celle de France 3.

    « Les contrats d’objectifs et de moyens ne devraient pas être alignés sur les alternances politiques », a lancé à la ministre le sénateur socialiste David Assouline, rappelant que le budget quinquennal signé avec l’Etat fin 2016 par France Télévisions prévoyait déjà des efforts, dont le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux (180 postes en 2018). « Avec l’équipe Macron, on sent une rupture de politique, regrette un membre de la majorité précédente. Certains sont imprégnés de la vieille culture qui voit dans l’audiovisuel public un mammouth à dégraisser. »

    L’idée d’une #privatisation de France 2 a même resurgi ces dernières semaines. Si cette idée n’est a priori pas retenue par le gouvernement, elle a ravivé en interne les craintes d’une fermeture de chaîne. Cette « rumeur » sert « allumer des contre-feux » en pleine discussion budgétaire, a dénoncé FO dans un communiqué. La ministre attend, elle, des propositions de la part des entreprises d’audiovisuel public à partir de « mi-novembre » et la réflexion sur l’avenir du secteur se poursuivra jusqu’à « début 2018 ».