Je ne suis pas une balance, mes agresseurs ne sont pas des porcs. | Entre les lignes entre les mots
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Il y a quarante ans, un vent de liberté de parole a soufflé sur les victimes d’agressions sexistes et sexuelles. Des dizaines d’entre elles ont témoigné en s’appropriant les médias de l’époque : les plateaux de télévision, les livres. Est ainsi paru, aux États-Unis, The courage to heal, un recueil décapant de témoignages de femmes victimes de viol pendant l’enfance. Les femmes de cette génération ont dit que la violence sexiste s’arrêtait ici et maintenant, que c’en était fini du patriarcat. Des lois ont été votées, telle, en France, en 1980, la première loi faisant du viol un crime passible de quinze ans de réclusion criminelle. Puis des associations qui préfiguraient l’actuel SOS Papa sont apparues, et avec elles la théorie anti-scientifique des faux souvenirs. La chape est retombée, les victimes de viol se sont tues.
Il y a vingt ans, un vent de liberté de parole a soufflé sur les victimes d’agressions sexistes et sexuelles. Des centaines d’entre elles ont témoigné en s’appropriant les nouveaux médias de cette nouvelle époque : les forums sur internet. Sur l’ancien site web des Chiennes de garde, par exemple, s’est constitué le fil de discussion « banalités des violences sexuelles » au long duquel, en quelques semaines à peine, plus de six cents femmes ont décrit les violences qu’elles avaient subi, et les symptômes dont elles souffraient encore. J’avais vingt-cinq ans. J’ai expliqué à mes aînées que ce qu’elles n’avaient pas réussi à déclencher à la génération précédente allait enfin se produire, que la violence sexiste s’arrêtait ici et maintenant, que c’en était fini du patriarcat. En France, la notion de viol s’est élargie pour inclure celle du viol sur mineur de quinze ans et aussi celle, encore balbutiante (le consentement des deux époux étant présumé jusqu’à preuve du contraire), du viol conjugal. Puis l’affaire d’Outreau a déporté les projecteurs des victimes de viol vers les dérives judiciaires (tout le monde a oublié aujourd’hui que, dans cette affaire, même si l’on a désigné de faux coupables, de vrais enfants ont été violés pour de vrai). La chape est retombée, les victimes de viol se sont tues.
Aujourd’hui, une fois encore, les victimes de la nouvelle génération entendent souffler le vent de la liberté de parole. Par milliers, elles s’approprient les réseaux sociaux : de « je connais un violeur » sur Tumblr à #balancetonporc. L’actrice américaine Alyssa Milano, qui a relancé le mouvement #metoo, a récemment expliqué dans une interview que la violence sexiste doit s’arrêter ici et maintenant, qu’on doit en finir avec le patriarcat.Le gouvernement français prépare un texte qui inscrira dans la loi le non-consentement présumé de l’enfant (à l’heure où j’écris ces lignes, l’absence de consentement doit être établie au cas par cas, indépendamment de l’âge de la victime) et, en 2010, a enfin disparu de la loi le consentement présumé des deux époux (autrement dit, se marier n’équivaut plus à consentir a priori à tout acte sexuel voulu par le conjoint). J’espère que la chape ne retombera pas. Mais…