Sports virils et hommes « respectables » dans les quartiers populaires - Métropolitiques
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C’est tout l’intérêt de l’ouvrage que de faire la démonstration empirique de l’ambivalence des effets de la #socialisation sportive de cette jeunesse masculine des quartiers paupérisés et stigmatisés. En décrivant finement la manière dont « les pratiques étudiées oscillent entre #émancipation et ajustement à la position dominée » (p. 106), l’enquête menée par Akim Oualhaci montre bien qu’il existe au sein de ces espaces sportifs une tension entre la culture populaire et la culture légitime. Perçues par les enquêtés comme des « écoles de la vie », les pratiques sportives étudiées sont à la fois des « bastions de sociabilité masculine populaire au moment où le mouvement ouvrier et ses institutions se désagrègent et se “privatisent” » (p. 322) et des espaces où se desserre « l’étau d’un destin social cloisonné » (p. 9). Autrement dit, elles valorisent la force physique et les valeurs de #virilité – par ailleurs disqualifiées, voire racialisées – et, dans le même temps, elles permettent l’acculturation des pratiquants à une culture légitime par l’intériorisation de certaines normes, en introduisant notamment un nouveau rapport au corps, à la santé, à l’esthétisme des techniques et à l’avenir. Pour autant, les pratiquants se heurtent au manque de légitimité des capitaux accumulés dans les autres sphères du social, comme sur le marché de l’emploi. La socialisation sportive contribue ainsi à la construction d’un capital culturel incorporé et d’un capital social qui tend à maintenir ces jeunes sportifs à distance de la « rue » et participe de leur autonomie, tout en restant ajustée à leur « culture populaire ». En ce sens, elle favorise avant tout la « réorganisation des formes de sociabilité populaire mises à mal par la désindustrialisation » (p. 322).