• « J’ai pris le merlin pour la tuer et la hache pour la finir »
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    « J’ai tué ma femme. Je viens me rendre. » Il est minuit passé, dimanche 10 août 2014, lorsque Jean, 79 ans, se présente à la caserne Margueritte à Rennes. Petit, en plein pendant la Seconde Guerre mondiale, il a grandi un temps dans des baraquements non loin. C’est pour ça qu’il a choisi cette caserne, à une dizaine de kilomètres de chez lui, pour se constituer prisonnier. Margueritte, il connaît. Le retraité est si calme que les gendarmes lui font répéter. Il réclame un verre d’eau, puis s’accuse avec les mêmes mots.

    • Au quotidien, Jean, qui a « toujours été dur, très très dur », selon sa sœur Odette, n’épargne pas Yolande. Les anecdotes malheureuses se sont succédé pendant les deux jours de procès. « Il la traitait souvent de "fille de divorcée" », accuse Laurence, « la meneuse » pour son père. « Elle avait pas le droit de cueillir du persil, elle cueillait mal », hurle de douleur Claudine, la benjamine, dernier témoin de la première journée. Elle poursuit, tout essoufflée : « Quand elle allait chez le coiffeur, il lui disait qu’elle était moche. Je peux vous dire plein de choses, il n’arrêtait pas. »
      « Elle avait pas le droit »

      Le lendemain matin, c’est au tour d’Odette de déposer. Elle y va calmement, après que son frère, trop agité, a été expulsé, en vociférant jusque derrière les lourdes portes dorées. « Elle avait le droit de rien, elle n’était qu’une feignante. » Silence. « A la fin, elle n’avait plus le droit de faire ses courses, sa cuisine. Elle avait pas le droit de sortir de table avant qu’il sorte. » Silence. « Elle avait très mal aux pieds. Je lui avais dit d’aller voir la pédicure, mais mon frère ne voulait pas. » Silence. « Elle a vécu un calvaire ma belle-soeur ; un calvaire elle a vécu. Oui, on peut dire un calvaire. » Long long silence.

      Yolande n’avait pas non plus le droit de recevoir. A l’heure du thé, « il fallait ranger vite fait les tasses pour pas que monsieur se rende compte, se rappelle une voisine. Alors la plupart du temps, on allait chez moi, c’était plus pratique. » Pas le droit non plus d’utiliser l’eau comme elle voulait. Pas le droit de se doucher comme bon lui semblait. Pas de le droit de tirer la chasse, surtout pas la nuit. « Elle a été obligée de mettre un seau dans sa chambre, rage Laurence. C’est même pas des économies, c’est juste pour l’emmerder. »

      Une fois, Yolande a eu le droit. Ou plutôt le permis. « Alors le permis de conduire, c’est encore autre chose… se remémore Laurence, sur un ton blasé. Monsieur avait un cancer du rein, donc il a dit à maman de passer son permis pour l’emmener là où il voulait. Elle avait 42 ans... Elle l’a eu du premier coup. Une fois revenu de l’hôpital, il a récupéré très vite. Il l’a emmenée conduire dans les remparts de Saint-Malo. Elle a paniqué. C’était terminé. »

      #culture_du_viol #patriarcat #emprise #féminicide

    • Avec en toile de fond les acteurs et traumatisés des violences de la #guerre_d'algérie
      Est-ce qu’un jour des historiens mesureront l’impact que cette guerre a eu sur les femmes et les enfants de ces soldats ?
      Les témoignages de faits terribles ne manquent pas, violence, abandon, maltraitance et surtout, aucun remord avouable, parce qu’un soldat doit supporter l’horreur.
      #soumission_à_l'armée
      #colonisation
      #mariage

    • Mon avis que c’est plutôt son goût pour l’ordre et la domination qui l’ont fait rentrer dans l’armée, ce qu’il y a vu et fait ont mis la dernière couche.
      Il est l’exemple exacerbé et poussé jusqu’au bout de la domination masculine et du patriarcat : l’emprise sur sa femme, l’emprise sur ses filles qui n’ont droit à aucune existence en tant que telle à part le servir. Il y en a beaucoup, beaucoup d’autres que lui sans forcément le passage à l’acte final.

    • @ninachani je ne suis pas en train d’excuser ce criminel, je souligne le rôle de la guerre d’Algérie en toile de fond.

      Commettre des crimes ordonnés par un Etat légitime l’immonde et détruit toute notion d’humanité pour ériger la violence en norme. Il faut une sacré résistance pour ne pas renoncer à penser l’avenir et sombrer dans un comportement de violence.

      Vu les tabous et inconnus qui règnent encore sur cette *$# !& de guerre coloniale d’Algérie, je fais l’hypothèse que les femmes et les enfants des soldats ont payé un lourd tribu à leur retour. Cette guerre a alimenté la haine raciale et exacerbé l’idée qu’il y aurait des êtres humains indignes de vivre comme les algériens ou les femmes. Mais aussi que les hommes rentrés n’ont eu aucun soutien et que beaucoup ont ensuite menés des vies suicidaires.

      Je n’ai pas envie de noter ici les familles détruites que je connais à la suite du retour de la guerre d’Algérie, souvent il est difficile de les faire parler.

    • @touti Je n’ai pas pris ton commentaire comme une excuse de ses actes. Mais il n’était pas appelé, il était soldat de métier, et en plus dans les paras. D’où mon insistance sur sa personnalité qui l’a poussé à faire ce choix et surtout d’y rester dans l’armée.