• Lettre aux comités locaux, aux soutiens du mouvements, et à toutes celles et ceux qui se reconnaissent dans le mouvement contre l’aéroport et son monde - Zone A Défendre
    https://zad.nadir.org/spip.php?article5028

    Ce qu’on veut : défendre la zad pour lutter contre le monde de l’aéroport
    Alors que l’État laisse entendre qu’il pourrait abandonner le projet, des personnes plus ou moins éloignées de notre réalité dévoilent dans les médias leurs projets pour la zad. Nous ne les avons pas attendu.es pour penser notre avenir. L’État et le système qu’il défend nous emmènent droit dans le mur, et plutôt que de contribuer au désastre en cours, nous nous sentons légitimes à essayer ici de vivre différemment.

    Comme convenu avec l’ensemble du mouvement, nous voulons un gel de la situation foncière une fois les historiques revenu.es dans leurs droits , afin de créer une entité issue du mouvement qui prendra en charge ces communs. On peut souvent lire ou entendre qu’une zad d’après l’abandon reviendrait peu ou prou à sa vocation uniquement agricole d’avant le projet. Si cette lutte fut dès ses débuts une lutte pour la défense des terres, elle s’est depuis élargie, notamment avec l’arrivée des occupant.es. Des gens vivent et luttent ici, y ont développé d’autres pratiques depuis des années, et entendent bien continuer.

    N’en déplaise à ceux qui veulent nous aménager en zone pacifiée de commerce équitable, nous souhaitons continuer à produire et/ou vivre, hors cadre et hors normes. Nous voulons aussi continuer à inventer d’autres manières de partager et d’échanger en dehors du seul lien marchand, pour être moins dépendant.es de l’état et du marché, mais aussi pour nos voisin.e.s et pour soutenir d’autres luttes. Nous désirons aussi continuer à définir nos propres règles et gérer nos conflits. On n’a pas de réponse prémâchée sur comment vivre autrement dans ce monde, sur les contradictions qui nous traversent, et les compromis qu’on est prêt.es ou pas à accepter.

    Nous voulons prendre soin ensemble des espaces communs (routes, espaces boisés, prairies, lieux de réunion...) ; travailler à renforcer les liens de confiance qui nous unissent déjà à nos voisin.e.s, et à déconstruire les préjugés et les fantasmes qui nous séparent de beaucoup d’entre elleux (notamment via l’organisation d’info-tours dans les bourgs alentour, la participation à la dynamisation du bourg voisin...). Pour autant, nous ne voulons pas d’une zad où seul.e.s pourraient rester celleux qui présenteraient bien devant les journalistes, accepteraient de prendre un statut légal ou pourraient/voudraient bien payer des factures. En d’autres termes celles et ceux qui ne feraient pas tâche sur la photo de famille. Nous voulons que la zad reste diverse et surprenante, qu’y cohabitent des gens aux pratiques variées, parce qu’attaché-es à des idées politiques différentes. Nous avons défendu cette zone ensemble, nous continuerons à l’habiter ensemble. Nous voulons donc que TOUT le monde puisse rester, sans exception. Certain.es partiront peut-être, d’autres arriveront, d’autres ne feront que passer. Comme ça a toujours été le cas. Mais qu’il n’y ait ni expulsion, ni aucune forme d’intervention policière visant à réprimer certain.es d’entre nous. Nous pensons aussi à toutes celles et ceux qui ont déjà subi la répression. Nous souhaitons l’amnistie pour les personnes condamnées dans le cadre de la lutte contre l’aéroport. Nous sommes prêt.es et déterminé.es à lutter pour.

    Enfin et peut-être surtout, nous souhaitons que la zad reste une zone de lutte. Ensemble, nous avons sorti ces terres de leur destruction programmée, y avons mis en place des formes de vie qui nous correspondent, plus collectives et autonomes et ne souhaitons pas nous arrêter là. Nous luttons contre l’aéroport et son monde. Et même si le projet est abandonné, son monde continuera d’exister, et nous continuerons de le combattre de toutes les manières qui nous sembleront pertinentes. Nous continuerons à lutter contre les infrastructures et les projets d’aménagement du territoire ; contre les politiques migratoires et le racisme d’État, aux côtés de celleux qui subissent plus que nous la violence systémique. Nous continuerons à prendre la rue, à occuper des bâtiments et des places publiques avec les travailleureuses, chomeureuses, étudiantes, précaires (que nous sommes parfois) contre les politiques capitalistes qui nous mettent un peu plus à la merci de l’économie. Nous continuerons aussi le travail de déconstruction des dominations qui traversent notre société (sexisme, racisme, specisme, agisme...) en les visibilisant et en les combattant, sur la zad et en dehors.

    Alors que le mouvement envisage le triste jeu des négociations avec l’état, nous espérons réussir à préserver ensemble les espaces de liberté qui font de la zad une zone un peu plus respirable que le reste du monde. Ce pari, nous ne sommes pas du tout sûr.e.s de le gagner, mais on préfère tenter plutôt que de se laisser diviser.

    #zad #autonomie