Mais les tĂȘtes dâĆufs nâont pas fait dâHistoire dans leurs Ă©tudes. Ni de littĂ©rature. Ils ont fait des Ă©tudes dâĂ©conomie sans sociologie. De finance et de commerce sans anthropologie. De mathĂ©matiques sans philosophie. Les tĂȘtes dâĆufs sont des ĂȘtres humains inachevĂ©s. Pour eux, un voyageur est un consommateur de marchandises. Il doit ĂȘtre mis en file devant des sollicitations marchandes aprĂšs que sa dignitĂ© et sa volontĂ© aient Ă©tĂ© brisĂ©e par un parcours dâapproche humiliant. De toute façon, le client ne peut se dĂ©sintĂ©resser des performances de la sociĂ©tĂ© qui le transporte, « Ă lâheure de la mondialisation et des parts de marchĂ©s Ă gagner pour survivre par la performance, lâinnovation et lâagilitĂ©, en libĂ©rant les Ă©nergies » ! Ils doivent ĂȘtre empilĂ©s avec soin et gain dâespace, puisquâil est malheureusement impossible de les suspendre comme les carcasses dans un vrai compartiment frigorifique. Mais ça viendra.
Jâai connu la pĂ©riode de la sĂ©paration du train national en deux entitĂ©s, lâune pour le train proprement dit, lâautre pour les infrastructures. CâĂ©tait un ministre communiste qui se chargeait de lâaffaire et un communiste qui pris la tĂȘte de la sociĂ©tĂ© vouĂ©e au rail. SĂ©nateur socialiste, je ne votai pourtant rien de tout cela. Puis jâai votĂ© au Parlement europĂ©en contre les « paquets ferroviaires » adoptĂ©s Ă lâunisson par la droite, les EELV et les PS. Cela signifie que lâopĂ©ration actuelle vient de loin. La privatisation qui arrive est la phase finale dâun long cycle. Elle a Ă©tĂ© mĂ©thodiquement planifiĂ©e et conduite avec patience depuis plus de deux dĂ©cennies. Personne nâest pris par surprise. La seule surprise, câest que rien nâait Ă©tĂ© organisĂ© pour rĂ©sister ou allumer des contre-feux. Rien de plus que les manifestations dans chaque pays Ă un jour diffĂ©rent, les dĂ©lĂ©gations ou les rassemblement auxquels jâai participĂ© de façon solidaire et disciplinĂ©e.
Entre deux dĂ©cisions bruxelloises il y avait un Ă©pisode français de rĂ©pression des cheminots qui luttaient contre. Avec Ă chaque Ă©pisode les mĂȘmes calomnies, les mĂȘmes bobards sur la « prime charbon » (supprimĂ©e depuis 1970), le privilĂšge des vacances des cheminots (un jour de repos compensateur de plus quâun salariĂ© du privĂ© aux mĂȘmes horaires). Les mĂȘmes omissions, les mĂȘmes mensonges sur la vie rĂ©elle des cheminots, sur leurs astreintes, sur leurs responsabilitĂ©s sous payĂ©es et ainsi de suite. Tous les torchons de presse papier et audiovisuelle ont donc recommencĂ© leur sale besogne pour exciter les uns contre les autres. Encore une fois le prĂ©tendu « service public de lâinfo » et ses stars gorgĂ©es dâargent et de privilĂšges vont plaindre les passagers « pris en otages » par les « privilĂ©giĂ©s » du rail et ainsi de suite. La mĂȘme comĂ©die depuis plus de vingt ans. Pendant ce temps, plus les rĂ©formes sâappliquaient plus tout allait de mal en pis pour tout le monde, cheminots usagers et finances publiques. Les dĂ©ficits et les dettes se sont accumulĂ©s mais les patrons nâont jamais Ă©tĂ© punis de leur bilan, ni les ministres. Au contraire. Plus ils ont dĂ©truit, plus ils ont Ă©tĂ© cĂŽtĂ©s, plus les « journalistes » Ă gage ont Ă©tĂ© payĂ©s plus cher.
Dans tous les pays du monde dĂ©vastĂ©s par les trouvailles des nĂ©olibĂ©raux, on doit recrĂ©er des voies de chemin de fer. Des rĂ©gions renaissent alors grĂące au dĂ©senclavement et aux emplois ainsi crĂ©Ă©s. En France, des incapables qui ont tout ruinĂ© vont encore supprimer 9000 km de voies, augmenter le prix des billets et ainsi de suite. RevoilĂ le vol en rĂ©union qui se reproduit. Avec les mĂȘmes refrains de « modernitĂ© », « courage », « rĂ©formes » et « lutte contre les privilĂšges ».
JusquâĂ lâabsurde le plus ridicule comme lorsquâon lit sur BFM « la SNCF coute 1000 euros Ă chaque Français mĂȘme sâil ne prend pas le train ». Outre que câest faux puisque aucun dâentre vous ne se souvient quâon lui ait demandĂ© 1000 euros pour la SNCF, la remarque est aussi absurde que celle qui chiffrerait le coĂ»t par Français de chaque enfant en classe primaire « mĂȘme sâil nâa pas dâenfant ». Ces gens lĂ ont oubliĂ© jusquâau souvenir de la dĂ©finition du service public. Pourtant, certains dâentre eux, les journalistes en particulier, coutent des milliers dâeuros Ă chaque Français. Car les Français paient Ă leur place, non seulement le prix de leurs mensonges, mais aussi celui des millions dâaide Ă la presse et les millions de leurs dĂ©grĂšvements dâimpĂŽts sur le revenu ! Sans aucune justification ni utilitĂ© sociale.
Jlm