marielle 🐱

« vivere vuol dire essere partigiani » Antonio Gramsci

    • L’idĂ©e de cĂ©lĂ©brer le cinquantiĂšme anniversaire de Mai-68 avait, paraĂźt-il, traversĂ© l’esprit imaginatif d’Emmanuel Macron. On sait que son proche entourage l’en a finalement dissuadĂ©. La rĂ©cupĂ©ration Ă©tait un peu trop grossiĂšre pour abuser les plus candides de nos concitoyens. Mais voilĂ  que l’hypothĂšse d’une « cĂ©lĂ©bration » ressurgit. Pas exactement telle que la rĂȘvait le prĂ©sident de la RĂ©publique, mais cette fois Ă  son corps dĂ©fendant. Car, si l’hypothĂšse d’une grĂšve gĂ©nĂ©rale du cĂŽtĂ© du mois de mai 2018 est loin d’ĂȘtre la plus probable, celle d’un conflit d’ampleur n’est plus Ă  Ă©carter. Le PrĂ©sident, en tout cas, en prend le risque. En ajoutant le trĂšs impopulaire recours aux ordonnances Ă  une dĂ©jĂ  dĂ©licate rĂ©forme de la SNCF, il met les syndicats au pied du mur. La CGT, en particulier, va jouer sa peau dans un affrontement Ă  peu prĂšs inĂ©vitable, quelle qu’en soit la forme. Mais, plus incomprĂ©hensible encore, il renvoie la CFDT, d’ordinaire si facile Ă  circonvenir, dans le camp d’en face. L’annonce par le Premier ministre du recours aux ordonnances a Ă©tĂ© reçue comme une vĂ©ritable « humiliation » – c’est le mot d’un de ses porte-parole – par la confĂ©dĂ©ration de Laurent Berger.

      IncomprĂ©hensible, disais-je, pas tout Ă  fait. On a l’impression qu’Emmanuel Macron joue beaucoup plus dans cette affaire que le sort de la seule SNCF. Il vise l’affaiblissement durable du mouvement syndical. Il y a du « thatchĂ©risme » dans son attitude. Reste Ă  savoir si l’objectif politique du prĂ©sident de la RĂ©publique n’est pas au-dessus de ses moyens. Entendons-nous bien, je ne suis pas un fĂ©tichiste de Mai-68 et je ne crois pas que l’histoire se rĂ©pĂšte. Pour reprendre l’expression du sociologue Geoffroy de Lagasnerie, il faut cesser de guetter le « moment total », celui de la convergence des luttes.

      L’implosion des grandes concentrations ouvriĂšres rend dĂ©sormais improbables de vastes mobilisations qui rĂ©pondent Ă  une unitĂ© de temps et de lieu. Mais s’il existe encore une catĂ©gorie professionnelle qui a cette capacitĂ© de rĂ©sistance, et cette force d’entraĂźnement, c’est bien les cheminots. L’enjeu du bras de fer qui se prĂ©pare est donc double. Il en va Ă  la fois bien sĂ»r du sort de la SNCF et de tout ce qu’elle symbolise de service public, et de la redĂ©finition du rapport de force social pour de longues annĂ©es.

      Emmanuel Macron spĂ©cule sur une opinion publique lasse des conservatismes et de l’immobilisme. Depuis huit mois, il parvient avec un certain bonheur Ă  incarner le « mouvement ». Sa chance est de venir aprĂšs une drĂŽle de dynastie : un « roi fainĂ©ant », un matamore et un tartuffe se sont succĂ©dĂ© Ă  l’ÉlysĂ©e
 La question est de savoir si la sociĂ©tĂ© est Ă  ce point avide de changement qu’elle est prĂȘte Ă  tout accepter. C’est le grand dĂ©fi des syndicats que de montrer dans quelle sorte de changement veut nous entraĂźner Emmanuel Macron. L’enjeu, on l’a dit, c’est l’affaiblissement des corps intermĂ©diaires, et la relĂ©gation de la reprĂ©sentation parlementaire, court-circuitĂ©e par les ordonnances. Et c’est la liquidation de l’idĂ©e mĂȘme de service public. La rĂ©forme proposĂ©e par Jean-Cyril Spinetta est vertĂ©brĂ©e par deux principes exclusifs : la rentabilitĂ© et la concurrence. D’oĂč une privatisation rampante dans un secteur d’activitĂ© qui s’apparente Ă  ce qu’on appelle un monopole naturel. Autrement dit, qui ne peut s’accommoder ni de la concurrence ni de la recherche de profits.

      Tout opĂ©rateur privĂ© arrivant sur ce marchĂ© aura en effet tendance Ă  s’emparer des segments les plus rentables en dĂ©laissant les autres (l’entretien du rĂ©seau par exemple), et Ă  se payer sur la bĂȘte, en l’occurrence l’usager, pour rĂ©aliser ses profits. Au cƓur du conflit qui se profile, il y a Ă©videmment le statut des cheminots, qui correspond exactement Ă  ces notions de monopole naturel et de service public. L’offensive gouvernementale est malsaine en ce qu’elle cherche Ă  diviser nos concitoyens. On l’a bien vu lorsqu’au Salon de l’agriculture Emmanuel Macron a opposĂ© la situation des cheminots au sort des agriculteurs privĂ©s de retraites.

      Aujourd’hui, apparemment, ce discours dĂ©magogique fonctionne : 69 % des Français seraient favorables Ă  la suppression du statut [2]. A-t-on conscience que des opĂ©rateurs privĂ©s se comporteront ici comme ailleurs, en pratiquant la mise en concurrence salariale, la prĂ©carisation, et feront de la condition des futurs cheminots une variable d’ajustement budgĂ©taire ? Ce qui n’est rassurant pour personne. En attendant, beaucoup de commentateurs tombent en pĂąmoison devant le sens tactique de Macron. La Blitz Krieg engagĂ©e par l’exĂ©cutif force leur admiration. Mais les enjeux ont une tout autre dimension. Aux syndicats et Ă  la gauche politique d’en convaincre une opinion gavĂ©e de discours gestionnaires.

      Denis Sieffert - Politis

    • Autre Ă©mission avec #Olivier_Besancenot dans « On n’est pas couchĂ© », et vu les Ă©chos sur les rĂ©seaux sociaux, c’est impressionnant toutes les personnes qui encensent sa luciditĂ© (ou Ă  d’autres moments celle de #Philippe_Poutou, et autres) ... T’imagines, si y’avait autant de monde dans la rue qu’à dire qu’ils ont raison, ce serait dĂ©jĂ  un bon dĂ©but !
      ▻https://youtu.be/hKhfRIHhL7I