« Nous avons besoin de politiques incitatives pour aider les agriculteurs à remettre des haies, laisser les bords de chemins intacts pour favoriser le retour des insectes, on est très preneurs car la biodiversité est essentielle pour produire », concède Hervé Lapie, président de la Fédération régionale des syndicats des exploitants agricoles du Grand Est, branche locale de la #FNSEA, le principal et très productiviste syndicat agricole. S’il estime qu’il faut « mettre les agriculteurs en mode projet sur ce sujet », « pas question » pour autant de changer de modèle agricole et de se passer des pesticides : « On sort à la FNSEA un contrat de solutions pour réduire les produits de santé végétale [autrement dit, les pesticides, ndlr]. Mais quand j’ai un enfant malade, je le soigne. Si je ne protège pas mon blé de la fusariose ou de l’ergot, il est inconsommable car dangereux pour la santé humaine. »
Pour lui, « si on n’utilise plus de pesticides, il faut craindre pour la santé des Français, ce serait une catastrophe sanitaire ». Plutôt que de changer de modèle, il préfère parler d’« évolution » et assure avoir réduit de 35 % depuis 1992 la quantité de matière active de « produits de santé végétale » utilisés sur son exploitation. Hervé Lapie préside par ailleurs l’association « Symbiose, pour des paysages de biodiversité », créé « avec des chasseurs et des apiculteurs pour lesquels les néonicotinoïdes utilisés en traitement de semences de mes betteraves ne posent pas de problèmes ». Association dont le comité de pilotage comprend, entre autres, la firme BASF, qui produit ce type de pesticides dits « tueurs d’abeilles »…
De son côté, le président de la Ligue pour la protection des oiseaux, Allain Bougrain-Dubourg, enrage de constater que l’alouette est encore piégeable et chassable alors qu’elle est désormais en danger critique. Et estime que l’alerte des chercheurs « n’est tristement pas un scoop : l’hémorragie de la biodiversité se confirme jour après jour. Nous payons notre indifférence face à ce sujet qui n’est pas entré dans les consciences, contrairement au climat. Et ne rien faire pour l’enrayer d’urgence s’apparente à un crime contre l’humanité, car on n’a pas compris que l’effondrement du vivant concerne l’homme, au moins autant que le changement climatique ».