• Soixante-dix ans de chansons pour la Palestine –
    Par Emmanuel Dror
    CONTRETEMPS
    http://www.contretemps.eu/chansons-palestine

    Si la chanson est reconnue depuis longtemps comme un écho des opinions populaires, voire comme un instrument de ralliement derrière une cause, dans le cas de la Palestine elle joue un rôle supplémentaire. Ce n’est pas un mystère : l’entreprise de colonisation du territoire palestinien s’est très tôt accompagnée d’une colonisation culturelle qui a entravé, menacé de disparition, voire totalement nié la culture palestinienne. Dans un tel contexte, les chansons palestiniennes, ou même celles qui « parlent de Palestine », en plus de participer à la lutte proprement dite, constituent en elles-mêmes des actes de résistance, des « preuves de vie », des preuves de créativité d’une population qui ne se laisse pas détruire. C’est cette histoire que nous allons explorer ici.

     

    L’article qui fait autorité sur l’histoire récente de la Palestine à travers la musique est celui de Joseph Massad, publié en anglais en 2003[1]. C’est à partir de cet article que je propose ici une approche similaire, en français, complétée par une mise à jour rendue nécessaire notamment par l’arrivée massive du rap dans les années 2000. Cette approche sera également étendue aux musiciens occidentaux qui, depuis les années 1980, contribuent à la mise en musique d’une histoire palestinienne, y compris depuis 2005, à travers leur participation à la composante culturelle de la campagne internationale de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) lancée contre l’État israélien. Néanmoins, comme Massad, je ne rechercherai pas l’exhaustivité, mais à souligner comment la musique d’une époque réagit à l’actualité, comment elle exprime les sentiments populaires, parfois en contradiction avec les discours officiels, mais aussi comment elle mobilise les populations selon des registres « de leur temps ».