lundimatin

lundimatin paraît toutes les semaines.

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      C’est la libération ? Non monsieur. C’est la Révolution ? Pas plus madame. Mais alors qu’est ce qui peut bien expliquer ce qui relève tout à la fois de l’émeute, du délire collectif, de l’éruption volcanique et du grand carnaval ? Les esprits raisonnables s’interrogent, les autres suivent bêtement la masse docile, conditionnée, abrutie par tous les médias qui veulent leur grande célébration.

      C’est donc la libération de toutes les frustrations, la porte ouverte à tous les abus. La police ferme les yeux et évacue l’idée qu’on a voulu nous enfoncer dans le crâne que nous étions en guerre contre des ennemis de l’intérieur, sournois, violents, sanguinaires et prêts à tout pour nous abattre. Car voyez-vous, il en aurait suffit d’un, la mitraillette en bandoulière, pour faire le plus grand carton de l’histoire. À moins que pour les intégristes islamiques aussi, le football relève du sacré.

      Quant aux racailles qui ont joyeusement profité de la pagaille ambiante pour se livrer à leurs méfaits habituels, ils ne sont que la partie infime, la concession qu’il faut bien accepter à la mansuétude générale des forces de l’ordre. Ils ne sont rien puisque notre bon président, debout sur sa tribune, ne les a pas vus venir ni n’a même songé à prendre en compte le plan Banlieue. Pour lui tout va bien puisqu’en France, la fraternité se manifeste dans la liesse, les hurlements, les coups de klaxon et pourquoi pas le pillage et la caillassage. Il faut bien que jeunesse se passe !

      C’est donc nous, les rabat-joies, les tristes grognons, les imbéciles fuyant la foule beuglante, qui n’avons rien compris au sens, éminemment politique de cette double invasion des Champs-Élysées et de nos villes. Nous ne pouvons comprendre car nous raisonnons, faculté dont il faut désormais se priver pour être pleinement de cette société. J’en veux pour preuve ce moment de télévision hallucinant quand un prétendu journaliste tend le microphone à l’un des héros de la plus grande victoire qui soit. Antoine Griezmann, lucide, se lance alors dans une réponse intelligente, expliquant que malgré le succès, la maîtrise de la rencontre tout comme la prestation collective n’avaient pas été parfaites.

      L’homme des médias alors de l’interrompre bien vite et de dire cette phrase ô combien symptomatique de l’esprit de la maison Bouygues : « Nous ne sommes pas là, pour l’analyse ». L’aveu est éloquent, la profession a donc changé de nature et se contente d’accompagner le délire, de le favoriser, d’entretenir l’illusion d’un succès éclatant, d’un triomphe fabuleux. Ce n’est qu’un vendeur de rêves qui déshonore le noble métier qui devrait être le sien.

      Cet épisode lamentable atteste bien que priver le peuple de réflexion est le point commun entre ceux qui gouvernent et ceux qui amusent, les uns et les autres évitant soigneusement d’informer et de mettre en perspective ce qui se passe. Le futile, l’insignifiant, le dérisoire sont bien plus essentiels au maintien de leurs places et de leur pouvoir que le sérieux, le solide, le fondé...

      https://blogs.mediapart.fr/c-est-nabum/blog/080818/hysteriser-une-nation