Pierre Coutil

de celles et ceux qui marchent avec… (enfin qu’essayent).

  • Nouvelle rumeur mensongère sur des cours d’éducation sexuelle à l’école (Le Monde)
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/08/28/nouvelle-rumeur-mensongere-sur-des-cours-d-education-sexuelle-a-l-ecole_5346

    Une publication alarmiste, partagée des milliers de fois sur Facebook, a affirmé, à tort, dévoiler le contenu de séances d’éducation sexuelle.

    Jusqu’à 25% d’élèves absent·e·s en ce jour de rentrée : l’absentéisme habituel, les billets-retour-décalés-donc-moins-chers et surtout… cette rumeur insensée qui revient avec un impact nouveau. Des parents qui viennent mettre sous le nez des enseignant·e·s des vidéos complotistes, des familles avec qui nous avons de bons rapports d’habitude qui viennent, inquiètes vérifier que tout cela est faux, des familles qui évoquent au téléphone leur refus de remettre leur enfant à l’école dans de telles conditions et l’existence de consignes de boycott de la rentrée issues des réseaux sociaux.
    Les bras me tombent.

    #éducation #médias #réseaux_sociaux #complotisme #éducation_sexuelle #théorie_du_genre #bulshiterie

    • Tout cela est très logique étant donné la perte de confiance totale des parents des quartiers populaires vis à vis de l’école et la plupart du temps ils ont raison de s’en méfier vu le traitement discriminatoire que le système scolaire inflige à leurs enfants. C’est le cœur du problème !

    • Il me semble que cela est révélateur de plusieurs choses :
      1. La sensibilité persistante et clivante des thématiques autour de ce que les mouvements réactionnaires appellent « éducation sexuelle ». Derrière cette dénonciation récurrente d’outils pornographiques fantasmées, c’est bien l’éducation à l’égalité filles-garçons, au genre, à la sensibilisation aux violences faites aux femmes/filles qui est visée. Ainsi que les mouvements qui portent cette éducation.
      2. Les gens (de toutes classes sociales et de tous niveaux d’éducation) sont prêts à croire n’importe quoi en abdiquant tout esprit critique si ça va dans le sens de leurs peurs, de leurs angoisses, de leurs phobies. Et les réseaux sociaux en sont un terribles accélérateurs.
      3. Il y a une perte de confiance totale des familles, y compris celles qui sont au quotidien en relation avec les équipes éducatives, dans l’Institution scolaire. L’École, en tant qu’Institution, est tellement éloignée, tellement « contre » certaines populations, tellement stigmatisante ou perçue comme un outil oppressif et de contrôle que finalement il est envisageable que dans cette « boîte noire » des enseignant·e·s malveillant·e·s donnent des cours de masturbation à des gamins de 6 ans à l’aide de matériel pornographique… ce qui donne la mesure de l’éloignement de l’École et des populations dans certains quartiers, à l’heure où le ministre décline dans tous les médias son slogan de « l’École de la confiance ».

      Si sur ce dernier point, je rejoins @ninachani, je nuancerais par quelques interrogations.
      – Dans le quartier, il y a des communautés musulmanes de plusieurs origines, elles ont été réceptives à cette rumeur de manière assez différenciées et je me demande quelles sont les dynamiques spécifiques à l’œuvre.
      – Des familles avec qui nous avons des rapports de confiance, avec qui nous avons partager notre volonté d’ouvrir l’école, qui connaissent la teneur des interventions sur l’égalité filles/garçons ont quand même été inquiétées par cette rumeur.
      – Le fait que la question pornographique nous est en quelque sorte retournée puisque certaines des familles les plus véhémentes aujourd’hui sont aussi celles que nous avons pu interroger dans le passé sur l’accès de leurs garçons à du matériel pornographique ou sur des attitudes problématiques envers des filles.

    • @heautontimoroumenos Sur les différences de réaction au sein des différentes communautés, je soupçonne un rapport différent des parents eux-mêmes à l’école selon leur propre trajectoire.
      Dans mon quartier, ça ne concerne pas seulement les communautés musulmanes mais plutôt les noirs et les arabes et dans les noirs il y a beaucoup de chrétiens : les pauvres, non blancs, victimes de relégation en quelque sorte.
      Enfin, sur le rapport aux questions de genre, comment ne pas faire le lien avec l’instrumentalisation d’une pseudo politique féministe qui a pour cible unique les hommes de ces communautés. Moi j’en viens à me dire que c’est très bien joué de la part du pouvoir parce que ça diabolise ces hommes par rapport aux hommes blancs et donc ça les érige en repoussoir vis à vis des femmes blanches, et en même temps ça décrédibilise totalement le féminisme auprès de la majorité des femmes des communautés noires et arabes.
      Bingo sur tous les plans !