L’OCLCTIC se refuse à la moindre explication
Le post Google+ remonte au 14 décembre 2018, et la demande de retrait au 14 janvier 2019. Contacté, l’office s’est cependant refusé à tout commentaire sur ses motivations, notamment s’agissant des bases légales de son retrait. Outrage au chef de l’État ? Atteinte au droit à l’image ?
Faute d’explications, on ne sait pas davantage qui, en amont de l’office, est à l’origine de cette demande. De même, on comprend encore mal que cet organisme dédié à la lutte contre la cybercriminalité déploie ses compétences pour traquer une photo détournée, représentant son supérieur, le ministre de l’Intérieur, outre le Premier ministre et le président de la République.
La célèbre photo a en tout cas inspiré un internaute cette fois sur Twitter, avec une version un peu différente, agrémentée du slogan « LA DICTATURE EN MARCHE ». Sauf erreur, ce fichier n’a pas fait l’objet d’une procédure similaire.
En haut de la pile, le terrorisme et la lutte contre la pédopornographie
Ce n’est en tout cas pas la première fois que l’OCLCTIC émet des demandes de retrait, comme on peut le voir dans cet inventaire sur Lumen. Cependant, les procédures concernent habituellement des faits de « provocation à des actes de terrorisme ou apologie de tels actes ».
Elle a par exemple sollicité la suppression d’un site WordPress au motif qu’il diffusait la vidéo de la décapitation de James Foley, en contravention avec l’article 227-24 du Code pénal.
Le terrorisme est d’ailleurs l’une des justifications principales selon nos constatations, avec la lutte contre la pédopornographie. Les messages adressés aux hébergeurs sont parfois accompagnés de voyants rouges, en lettres capitales : « EMERGENCY - EMERGENCY - EMERGENCY - EMERGENCY - EMERGENCY - EMERGENCY - EMERGENCY »
En haut de la pile de ses compétences, on trouve justement la lutte contre le terrorisme et la pédopornographie. En témoigne, l’article 6-1 de la loi sur la confiance dans l’économie numérique, revu et corrigé en 2014, qui lui permet, sous le contrôle d’une autorité issue de la CNIL, d’adresser des demandes de suppression d’accès ou de déréférencement administratif de ces contenus, sans intervention préalable d’un juge.
Dans les étages en dessous, se trouvent la contrefaçon de carte bancaire, le piratage informatique, outre les messages discriminatoires dénoncés par les internautes via la plateforme Pharos, mais pas nécessairement les atteintes au droit à l’image présidentielle ou gouvernementale.
Lumen Database, un listing d’URL dénoncé par les ayants droit
Les ayants droit ont de longue date critiqué le site Lumen DataBase, et son ancêtre Chillings Effects. En 2013, la Fox avait été jusqu’à réclamer le déréférencement d’une demande de déréférencement répertoriée par cette base. En 2014, une représentante de la Copyright Alliance avait considéré que ce site représentait tout simplement la plus grande base de données de contenus contrefaisants.
La raison est simple : les demandes sont le plus souvent accompagnées des URL litigieuses. Lorsque Google opère un déréférencement, les liens sont certes retirés du moteur, mais les sites identifiés sur Lumen restent accessibles lorsque l’hébergeur est introuvable ou non coopérant.
Publiée le 29 janvier 2019 à 11:47 Par Marc Rees