• Logement et racisme : un an d’enquête sur les discriminations - Le Parisien
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    Pour obtenir un logement en Ile-de-France, tous les candidats ne partent pas à armes égales : « Un profil asiatique a 15 % de chance en moins d’avoir un logement qu’une personne d’origine française ancienne, une personne d’origine maghrébine a 28 % de chance en moins et une personne ultramarine ou d’Afrique subsaharienne a 38 % de chance en moins ».Ce triste constat est l’un des principaux enseignements de l’enquête menée par SOS Racisme et qui sera dévoilée ce mardi lors du colloque « Discriminations raciales au logement : ça suffit ! ». « Quand on connaît les tensions sur le marché de la location en Ile-de-France, partir avec un handicap de près de 40 % c’est énorme », souligne Dominique Sopo, le président de l’association.

    Pendant un an, les équipes de l’association antiraciste ont effectué une opération de testing de grande ampleur. « La discrimination raciale est une infraction très insidieuse. Les victimes ont rarement conscience d’en avoir fait l’objet, rappelle Julia Levivier, la responsable du pôle juridique de l’association. Les preuves manquent et le testing est bien souvent la seule manière d’objectiver le phénomène. » Le cas échéant, les résultats peuvent également être produits devant un tribunal pour obtenir une condamnation.

    Concrètement, les auteurs de l’étude ont répondu à 775 annonces immobilières de location dans tous les départements d’Ile-de-France : avec les mêmes informations mais une seule variable, la consonance du nom de famille. 192 tests se sont avérés exploitables et les résultats obtenus sont édifiants. « C’est le profil ayant des origines françaises anciennes qui a obtenu le plus de retours positifs (proposition de rendez-vous ou demande de pièces complémentaires afin d’accéder au rendez-vous) avec 17 % de retours positifs, le profil asiatique a reçu 15 % de retours positifs, le profil maghrébin a reçu 12 % de retours positifs et les profils d’Afrique subsaharien et ultramarin tous deux 11 % de retours positifs », synthétise le rapport.

    Le prix du loyer n’a pas d’impact sur les discriminations. En revanche, l’influence du bailleur est beaucoup plus significative. Le taux de discrimination pour les logements mis en location par les particuliers se monte à 87 % quand il est de 68 % pour les biens proposés par des réseaux d’agence. « Ce n’est pas surprenant car les professionnels sont davantage sensibilisés à cette question et sont censés connaître le droit. Ceci étant dit, ce taux reste spectaculairement élevé de la part d’acteurs dont on attendrait qu’ils remplissent correctement leur rôle », s’alarme Dominique Sopo.
    L’association dénonce au passage la suppression, en novembre dernier, de la fonction disciplinaire de l’organe chargé de régir le fonctionnement des professions immobilières. « Un indéniable recul », tacle SOS.

    Face à un tel constat, l’association réclame le lancement d’une grande campagne de sensibilisation sur les discriminations. « On ne peut pas se contenter des déclarations ponctuelles de tel ou tel responsable politique, insiste Dominique Sopo. Si on veut faire évoluer les consciences, il faut s’en donner les moyens. On a besoin de mesures concrètes. »

    L’étude réalisée par SOS Racisme intervient à une période où, selon les études d’opinion, la pensée raciste est en recul. « Tout d’abord, le mécanisme des discriminations renvoie aux préjugés inconscients des individus […] – les personnes pouvant être amenées à discriminer sans nécessairement s’en rendre compte », avance le rapport en guise de première explication. « Ensuite, poursuit le texte, les condamnations juridiques et morales du racisme permettent d’en empêcher l’expression directe par les individus. De ce fait, les discriminations résultent également d’un racisme conscient mais non assumé. »

    #discrimination #racisme #logement