hubertguillaud

Journaliste et rédacteur en chef de http://www.internetactu.net - aka @iactu -, le média de la Fondation internet nouvelle génération http://www.fing.org

  • L’administration en ligne, France, 2019
    http://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/seine-saint-denis-quand-les-rendez-vous-de-la-prefecture-s-achetent-au-ma

    C’est écrit en grand sur le site de la préfecture : « ATTENTION ! Toutes les prises de rendez-vous proposées sur ce site Internet sont gratuites. Soyez très vigilants, n’acceptez aucune prise de rendez-vous en ligne payante. » Gratuites mais rarissimes. Tous les essais que nous avons tentés de jour comme de nuit ont échoué, à l’instar de ces jeunes étudiants africains de 18 et 19 ans, rencontrés à Bobigny ce mois d’avril.

    « Cette convocation, j’ai essayé de l’avoir pendant trois mois mais ça n’a jamais fonctionné, alors j’ai payé 120 € à un homme qui a réussi à prendre rendez-vous pour moi », explique ce jeune majeur, candidat à une admission exceptionnelle au séjour. C’est l’ami qui l’accompagne qui avait trouvé la combine.

    Le rendez-vous monnayé 120 €
    « Moi j’ai essayé pendant un an, le jour, la nuit, quand j’étais en stage, mais je n’y arrivais jamais, finalement j’ai découvert sur Internet qu’il existait des rendez-vous payants. J’ai pris contact par mail, j’ai dû payer avec ma bourse trimestrielle de 170 €. Le jour où je récupérais ma convocation, il y avait cinq à six personnes comme moi qui avaient aussi payé 120 €. » Le rendez-vous était bien valide puisque ces deux étudiants ont obtenu à l’issue un récépissé. « C’est pitoyable d’en arriver là, mais sans ça on ne peut rien faire », confie le plus âgé. D’après le réseau éducation sans frontière (RESF), cela fait huit mois que la prise de rendez-vous par Internet est devenue quasiment impossible.

    La préfecture indique avoir porté plainte
    La préfecture est au courant. « Cette situation nous indigne d’autant plus que nous avons fait un très gros travail interne pour résorber les stocks depuis deux ans » commentait le préfet Pierre-André Durand, juste avant son départ. Pour lui, il s’agit « de malfaisants qui ont monté un système, soit avec des robots soit avec des petites mains, qui prennent les rendez-vous puis le revendent ». Le préfet assure qu’une plainte a été déposée « il y a trois mois » et qu’une enquête administrative est en cours, en même temps qu’une parade informatique recherchée. Au parquet de Bobigny, on n’a pas trace de plainte.

    Plutôt que de déposer plainte, l’administration devrait surtout revoir son système de prise de rendez-vous : http://www.seine-saint-denis.gouv.fr/Prendre-un-rendez-vous Car le problème, comme l’explique l’article du Parisien n’est pas tant un problème de manque d’agents et de disponibilités, que le fait que le système permette d’être surveillé par des robots et que des robots puissent s’inscrire à la place d’humains au prétexte de la règle du premier arrivé, premier servit !

    Profitons-en pour signaler que ce système de prise de rendez-vous n’est pas spécifique ni à la préfecture du 93 ni à la question de la demande de titres de séjour. A Paris, pour obtenir un passeport ou faire renouveler sa carte d’identité, il faut également passer par un site de prise de rendez-vous du même acabit (les nouvelles places ou les places libérées le sont visiblement le vendredi en fin de matinée) : https://rdv-titres.apps.paris.fr/eAppointmentCNI-internet/element/jsp/appointment.jsp - Ici, l’enjeu n’est pour l’instant pas suffisant pour être monnayé... mais allez savoir.

    Il faudra un jour en tout cas que l’administration en ligne se mette un peu dans la peau de l’usager, ça lui permettrait en tout cas de ne pas créer elle-même les malfaisants qui profitent de sa propre malfaisance !