Sombre

“When all are guilty, no one is; confessions of collective guilt are the best possible safeguard against the discovery of culprits, and the very magnitude of the crime the best excuse for doing nothing.” (Hannah Arendt) Laŭ la krio de la koko tuj spirito ĉiu, kie ajn li vagas, rapidas hejmen (L.L. Zamenhof)

  • De Tchernobyl aux dystopies post-apocalyptiques en passant par Detroit et les friches industrielles, Diane Scott convoque les psychanalystes pour disséquer le regain d’engouement pour « l’esthétique des ruines ». Et si le pouvoir politique qui n’arrive plus à masquer sa nudité agitait ce fétiche pour mieux oblitérer la ruine sociale qu’il met en œuvre ?

    Ruine, Macron, fétiche - Les habits de l’empereur
    https://lundi.am/Ruine-Macron-fetiche-Les-habits-de-l-empereur

    On s’est interrogé ce mois-ci sur le succès de la série américaine et britannique Chernobyl, « un immense succès surprise » (Télérama), en l’associant à la question climatique, aux fake news ou à qualité artistique de la série. On n’a pas eu la malice d’y lire un reliquat de guerre froide et cette sorte de « plaisir d’offrir » qui n’a pourtant pas manqué de faire mouche côté russe. Plus généralement, il me semble que Tchernobyl est l’un des noms les plus courants d’un engouement de l’époque pour un objet à l’histoire pluriséculaire mais à l’actualisation contemporaine tout à fait remarquable : la ruine. Detroit, Pripiat, les « friches », l’île de Hashima, Mad Max, l’Europe de l’Est via la photographie des années 1990, le cinéma catastrophe récent, le mobilier postindustriel forment une seule et même nébuleuse d’objets et d’images dont je pose qu’elle s’éclaire d’être saisie depuis cette catégorie de la ruine. J’ai essayé d’entrer dans le détail de cet amour, qui se distingue nettement de la tradition de la ruine antique, dans un petit essai : Ruine. Invention d’un objet critique paru aux éditions Amsterdam en mai. À la lumière de ce désir de ruines, le succès de Chernobyl n’est pas une surprise.

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    Dans le mutisme de ces espaces déserts et somptueux, dans cette matité souveraine de la ruine industrielle, il y a une dimension de savoir coagulé, homologue au silence qui entoure le vacarme des noces répétées du capitalisme et de l’extrême-droite.