• Les droits fondamentaux des « détenus radicalisés » ne seraient pas respectés
    https://www.la-croix.com/France/Securite/droits-fondamentaux-detenus-radicalises-seraient-pas-respectes-2020-06-10-

    Ainsi, le renseignement pénitentiaire a pris une place de plus en plus importante dans la lutte contre la radicalisation en prison. Si les surveillants pénitentiaires sont encouragés à partager leurs observations et soupçons, « on demande aujourd’hui à des psychologues, mobilisés en binôme avec des éducateurs spécialisés, d’évaluer le risque de radicalisation d’un détenu sans l’en avoir prévenu au préalable, avance Adeline Hazan. Cela pose un problème déontologique évident. »

    Est aussi particulièrement pointée du doigt la difficulté pour certains détenus en quartier évaluation de la radicalisation (QER) à lancer des recours et avoir un débat contradictoire. « Un décret du 21 décembre 2019 est tout de même venu ordonner ce débat contradictoire en présence d’un avocat », précise, comme motif de satisfaction, la contrôleur. Des détenus peuvent ainsi faire valoir des arguments pour démontrer que des soupçons de radicalisation avec risque de passage à l’acte violent ne sont pas fondés, en expliquant leur pratique de la religion, parfois rigoriste. Ceci dans le but de pas être ensuite placé en quartier de prise en charge de la radicalisation (QPR).

    La « radicalisation », un concept flou

    Autre problème, les critères pris en compte pour l’intégration de personnes détenues au sein de la catégorie « personnes radicalisées » sont décrits comme opaques et discriminants, et laissés à l’appréciation de chaque établissement. Une critique qu’entend le secrétaire national Ufap-Unsa Pénitentiaire, Wilfried Fonck, au fait des questions de radicalisation religieuse en milieu pénitentiaire. « Il existe une difficulté autour du terme « d’individu radicalisé », qui va décrire des détenus condamnés pour des faits de terrorisme mais aussi d’autres soupçonnés d’être en voie de radicalisation, détaille-t-il. Le contact entre ces deux types de population peut d’ailleurs poser le problème du prosélytisme. »

    Plus largement, c’est le concept de radicalisation qui ne semble toujours pas avoir de définition satisfaisante. « Des détenus se plaignent d’être surveillés à outrance, d’être sans arrêt stigmatisés par des surveillants qui ne font pas la différence entre un islam rigoriste et un risque de passage à l’acte violent », dénonce Adeline Hazan. Si un profil terroriste se retrouve d’emblée dans un QER, le sort d’un individu soupçonné d’être en voie de radicalisation dépend des observations des personnels pénitentiaires. Mais les critères sont multiples et variés, « pas assez fins ». « On tape large pour éviter de se retrouver, comme en 2015, avec des profils d’ex-détenus petits délinquants devenus terroristes, raconte Wilfried Fonck. C’est un épisode qui a traumatisé l’administration pénitentiaire. »

    #radicalisation #prison