• CEDH et BDS : titres particulièrement pudiques au Télégramme


    Deux articles pour commenter la même décision à 8 heures d’intervalle. La version courte, la première, est parue dans le journal papier de ce jour. La longue est complétée par les réactions et commentaires.

    La France condamnée par la CEDH pour avoir sanctionné des militants pro-Palestine - France - Le Télégramme - 11/06/2020 11h23
    https://www.letelegramme.fr/france/la-france-condamnee-par-la-cedh-pour-avoir-sanctionne-des-militants-pro

    En 2009-2010, des militants avaient appelé au boycott de produits israéliens, une action condamnée par la justice française. La Cour européenne des droits de l’Homme a à son tour condamné la France.

    La Cour européenne des droits de l’Homme a condamné ce jeudi la France pour violation de la liberté d’expression de militants pro-Palestine, qui avaient été condamnés pour leur appel au boycott de produits importés d’Israël. « La Cour constate que les actions et les propos reprochés aux requérants relevaient de l’expression politique et militante et concernaient un sujet d’intérêt général » et considère que leur condamnation en 2013 par la cour d’appel de Colmar « n’a pas reposé sur des motifs pertinents et suffisants », argumente le bras juridique du Conseil de l’Europe.

    La CEDH avait été saisie en 2016 par onze membres du Collectif Palestine 68. Relayant dans le Haut-Rhin la campagne internationale d’ONG palestiniennes « Boycott, désinvestissement et sanctions », les requérants ont participé en 2009 et 2010 à des actions dans un hypermarché d’Illzach, à côté de Mulhouse, pour appeler les clients à boycotter les produits israéliens. « Par nature, le discours politique est souvent virulent et source de polémiques. Il n’en demeure pas moins d’intérêt public, sauf s’il dégénère en un appel à la violence, à la haine ou à l’intolérance », a souligné la CEDH dans un communiqué sur sa décision.

    La France déjà condamnée la semaine dernière
    « L’appel au boycott est reconnu comme droit citoyen ! », s’est réjouie l’association France-Palestine dans un communiqué. En revanche, la cour a considéré que l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme (« pas de peine sans loi ») n’avait lui pas été violé par la justice française.

    Selon la décision de la CEDH, la France doit verser à chacun des requérants « 380 euros pour dommage matériel, 7 000 euros pour dommage moral, et aux requérants ensemble 20 000 euros pour frais et dépens ».

    La semaine passée, la CEDH avait déjà condamné la France pour ne pas avoir pris de mesures suffisantes pour protéger Marina, une petite fille de 8 ans morte en 2009 sous les coups de ses parents.

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    La CEDH condamne la France pour violation de la liberté d’expression de militants pro-Palestine - France - Le Télégramme - 11/06/2020 19h28
    https://www.letelegramme.fr/france/la-cedh-condamne-la-france-pour-violation-de-la-liberte-d-expression-de

    Pour la deuxième fois en une semaine, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a condamné la France, considérant, jeudi, que la justice avait violé la liberté d’expression de militants pro-Palestine en les condamnant pour leur appel au boycott de produits importés d’Israël.

    « La Cour constate que les actions et les propos reprochés aux requérants relevaient de l’expression politique et militante et concernaient un sujet d’intérêt général ». Leur condamnation, en 2013, par la cour d’appel de Colmar « n’a pas reposé sur des motifs pertinents et suffisants », a argumenté le bras juridique du Conseil de l’Europe basé à Strasbourg.

    Les sept juges de la cour ont estimé, à l’unanimité, qu’il y avait violation de l’article 10 de la convention européenne des droits de l’Homme portant sur la liberté d’expression.

    Cette condamnation est la deuxième de la France en quelques jours. Le 4 juin, la CEDH avait estimé que les services sociaux et la justice du pays n’avaient pas pris de mesures suffisantes pour protéger Marina, 8 ans, morte en 2009 sous les coups de ses parents.

    Concernant l’arrêt rendu jeudi, la CEDH avait été saisie, en 2016, par onze membres du « Collectif Palestine 68 ». Relayant, dans le Haut-Rhin, la campagne internationale d’ONG palestiniennes « Boycott, Désinvestissement et Sanctions » (BDS), les requérants ont participé, en 2009 et 2010, à des actions dans un hypermarché près de Mulhouse pour appeler au boycott des produits israéliens. Ils montraient ces produits, distribuaient des tracts et faisaient signer une pétition demandant leur retrait des rayons.

    Discours d’intérêt public
    Relaxés, en 2011, par le tribunal correctionnel de Mulhouse, ils avaient été, en 2013, déclarés coupables en appel « du délit de provocation à la discrimination » et leurs pourvois en Cassation furent rejetés, rappelle la CEDH, saisie quand tout recours au niveau national a été épuisé.

    « Par nature, le discours politique est souvent virulent et source de polémiques. Il n’en demeure pas moins d’intérêt public, sauf s’il dégénère en un appel à la violence, à la haine ou à l’intolérance », souligne la CEDH.

    « Toutefois, inciter à traiter différemment ne revient pas nécessairement à inciter à discriminer », poursuit l’institution, soulignant que les militants agissaient en tant que « simples citoyens » et n’ont causé «  ni violence ni dégât ».

    En 2009, la CEDH avait à l’inverse estimé que le droit à la liberté d’expression de Jean-Claude Willem, alors maire de Seclin, n’avait pas été violé quand il avait été condamné pour avoir voulu demander aux services municipaux de boycotter les produits israéliens. « Jean-Claude Willem avait agi en sa qualité de maire et avait usé de pouvoirs attachés à celle-ci au mépris de la neutralité et du devoir de réserve qu’elle lui imposait », argumente la CEDH pour distinguer ces deux affaires.

    Le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) a noté « avec regret » que l’arrêt de 2020 « contredise celui de 2009 ».

    « Un précédent important »
    « L’appel au boycott est reconnu comme un droit citoyen ! », a, au contraire, réagi l’association France Palestine Solidarité. Son président, Bertrand Heilbronn, s’est réjoui d’« une juste victoire de la liberté d’expression et d’action citoyenne », appelant à poursuivre la campagne BDS.

    De son côté, Marco Perolini d’Amnesty International a considéré que cette décision marquait « un précédent important qui devrait empêcher l’utilisation abusive des lois contre la discrimination pour cibler des militants faisant campagne contre les atteintes aux droits humains commises par Israël contre les Palestiniens ».

    « Cela met un terme définitif aux tentatives d’empêcher la libre action citoyenne et non-violente en défense des droits des Palestiniens », a renchéri le Mrap qui demande au gouvernement de « cesser de menacer et de poursuivre pour antisémitisme les militants qui critiquent la politique israélienne » à travers la campagne BDS.

    La France doit verser à chacun des requérants « 380 euros pour dommage matériel, 7 000 euros pour dommage moral, et aux requérants ensemble 20 000 euros pour frais et dépens ».