• Les accords d’Israël avec le Golfe sont un désastre pour l’Égypte | Middle East Eye édition française
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    Commençons par le péril à long terme. Un oléoduc dans le désert qui était autrefois exploité comme une joint-venture secrète par l’Iran du shah et Israël pourrait jouer un grand rôle dans la connexion du réseau de pipelines arabes à la Méditerranée. Le réseau de la société Europe Asia Pipeline Company, qui s’étend sur 254 kilomètres, relie la mer Rouge au port israélien d’Ashkelon.

    Parallèlement au pipeline, DP World, propriété de l’État de Dubaï, s’est associée à DoverTower d’Israël pour développer les ports et zones franches d’Israël et ouvrir une ligne de navigation directe entre le port israélien d’Eilat sur la mer Rouge et celui de Jebel Ali à Dubaï.

    Ni le pipeline ni ce raccordement de ports ne constituent de bonnes nouvelles pour le canal de Suez, dont l’élargissement vient de coûter au président égyptien Abdel Fattah al-Sissi 8 milliards de dollars. Ceci inclut l’argent qu’il a forcé des hommes d’affaires égyptiens et des actionnaires ordinaires à investir dans ce projet voué à l’échec. Du jour au lendemain, le canal de Sissi sera dépassé par un moyen moins coûteux d’acheminer le pétrole de la mer Rouge à la Méditerranée.

    Le régime égyptien fait face à d’autres périls plus immédiats. Avec l’accord de normalisation, Le Caire perd le rôle de médiateur entre les États arabes et Israël qu’il a joué pendant des décennies.

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    « Tout au long des années de confrontation avec Israël, l’Égypte a joué le rôle principal dans la détermination des réactions arabes malgré ses désaccords avec tel ou tel État arabe. Cependant, cette situation ne continuera pas. Israël aspire à remplacer l’Égypte et à diriger la région arabe selon de nouvelles équations qui feront tomber toutes les institutions de l’action arabe commune, au premier rang desquelles se trouve la Ligue arabe elle-même. »

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    L’Égypte ne peut plus supporter autant de mauvaise gestion et de corruption, et bientôt viendra le temps où la colère populaire se retournera contre le régime lui-même. Beaucoup de ces villageois sont, par tradition, armés – et ils agiront selon les codes tribaux de la vengeance si l’armée ou la police leur tire dessus. Leurs manifestations, jusqu’à présent, ont été pacifiques.

    Ce régime militaire brutal, cruel et néfaste a été installé par les familles royales émiratie et saoudienne. Sissi n’aurait pas rompu les rangs et trahi le président Mohamed Morsi, qui l’avait choisi comme ministre de la Défense, sans l’argent que Riyad et Abou Dabi lui avaient promis.

    S’ils perdent Sissi et l’Égypte dans son ensemble, les plans de domination régionale d’Abou Dabi et Riyad s’effondreront rapidement. Alors, la région atteindrait effectivement un tournant – mais pas celui que Mohammed ben Zayed et le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou avaient prévu.