• Confinement pour tous… mais pas pour les chasseurs
    https://reporterre.net/Confinement-pour-tous-mais-pas-pour-les-chasseurs

    À la campagne, les fusils ne prendront pas la poussière. Malgré le confinement, les coups de feu vont à nouveau résonner dans les bois. Le week-end dernier, le puissant patron de la Fédération nationale des chasseurs (FNC), Willy Schraen, s’est félicité d’avoir obtenu gain de cause, glorifiant son entregent au sein du gouvernement. Contrairement à la population générale, qui n’a droit qu’à un accès restreint à la nature, les chasseurs pourront obtenir des dérogations pour user de la gâchette et tirer sur la faune sauvage.

    « Tout ceci ne s’est pas fait sans mal », a confié sur les réseaux sociaux le président des chasseurs avant de se réjouir : « Avec le soutien de nos amis agriculteurs, il va donc pouvoir s’ouvrir des possibilités de réguler certaines espèces dans un respect strict des gestes barrières liés au confinement ».

    Le 1er novembre, la secrétaire d’État à la biodiversité, Bérangère Abba, a écrit une circulaire à l’attention des préfets. « Dans les plus brefs délais », au cours de cette semaine, ils devront réunir les commissions départementales de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS) pour définir, en lien avec les acteurs locaux, des « objectifs de prélèvement ». « Nous nous devons d’éviter un accroissement des dégâts faits aux cultures, aux forêts et aux biens par une prolifération des populations de grand gibier comme les sangliers ou les chevreuils », a déclaré Bérangère Abba dans un communiqué.

    Cette circulaire que Reporterre a pu se procurer précise que ces « prélèvements » [les « abattages », dans le vocabulaire commun] ne pourront être effectués que par des battues et du tir à l’affût, pas par l’organisation de chasse à courre. Willy Schraen regrette que « les chasseurs de gibiers d’eau n’aient pas été reconnus dans leur pratique essentielle de sentinelles sanitaires », mais pense qu’il pourra convaincre son ministère de tutelle.
    « Je vous invite à prendre une heure de détente cynégétique autour de chez vous »

    Chose plus surprenante, il invite ses troupes, alors que le droit pour l’instant l’interdit, à prendre, dans le cadre des attestations prévues, « une heure de détente cynégétique à moins d’un kilomètre de chez soi ».

    Bien que notre secrétaire d’État nous affirme que cela n’est pas autorisé, d’autres sources aussi importantes au sein de l’État nous valident la possibilité de prendre cette heure de détente cynégétique dans le cadre légal de la chasse en vigueur. Je vais donc me référer à cette deuxième approche parce que l’activité de nature qu’est la chasse ne peut être moindre que celle des autres. Je vous souhaite donc de prendre un bol d’air à proximité de votre maison et de respecter scrupuleusement la distanciation sociale. »
    Willy Schraen

    Encore faudrait-il que les chasseurs habitent tous à l’orée des bois et non pas en centre-bourg ou en ville… Car des arrêtés préfectoraux relatifs à la sécurité publique interdisent également à toute personne placée « à portée de fusil » ou à moins de 150 mètres de tirer en direction de certaines infrastructures comme les routes, les chemins publics et les habitations.

    Les chasseurs sont empressés de reprendre les fusils. Contrairement au premier confinement, le second confinement intervient au cœur de leur saison de chasse, qui s’étend d’ordinaire de septembre à mars. « Le seul mois de novembre correspond au quart du prélèvement annuel de grands gibiers, souligne la fédération des chasseurs de la Somme. Si cette régulation n’est pas réalisée, les populations vont exploser en 2021 et les dégâts agricoles atteindront un niveau insupportable. L’impossibilité de chasser durant un mois remet en cause l’indemnisation des dégâts agricole par le monde de la chasse », ajoute-t-elle. La fédération demande déjà un « report de la fermeture au bois du lièvre et du faisan ».

    Leur lobbying est intense. Willy Schraen affirme que le temps presse. « Rien que pour les sangliers, on doit en tuer 500.000 avant la fin de l’année, prévient-il. Vous imaginez les conséquences si on ne va pas à la chasse ! » Il semblerait que le patron des chasseurs ait gagné les arbitrages. La circulaire du ministère mentionne un chiffre identique et parle de « mission d’intérêt général ».

    La situation serait même déjà « irrémédiable » pour le patron des chasseurs :« L’ajout d’une période de chasse complémentaire au-delà de la date de fermeture officielle ne permettra pas de rattraper le retard car les conditions d’exercice de la chasse sont nettement moins favorables au printemps qu’en automne et hiver », dit-il alors que la chasse n’a été arrêtée que depuis cinq jours.

    Au niveau local, les chasseurs se félicitent des futures consultations avec la préfecture. En Meurthe-et-Moselle, la fédération départementale a informé, dimanche, ses adhérents qu’elle avait « l’assurance » que « les battues allaient reprendre d’ici une semaine maximum ». Le répit pour la faune sera donc de courte durée. « Gardez-vous en pleine forme et profitez bien de ce dernier week-end sans chasse ! » avertissait par courriel le directeur départemental, Roméo Rieder.

    D’ailleurs, les dérogations ne concerneront pas seulement le gros gibier mais aussi d’autres espèces classées « nuisibles », comme les renards et les pigeons ramiers. Mais cela ne leur suffit pas encore. Certains chasseurs demandent de pouvoir bénéficier d’une dérogation pour nourrir les appelants détenus dans des parcs hors domicile. D’autres exigent le remboursement de leur permis de chasse pour cette saison. « Il n’y aucune raison de le payer si nous sommes privés de notre loisir favori », déclarent-ils dans le magazine Chasse passion.

    Chez les naturalistes, l’heure est à l’incompréhension et à la colère. « C’est une forme d’indécence, s’emporte le président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), Allain Bougrain-Dubourg, contacté par Reporterre. Alors qu’à nouveau le drame du confinement s’installe en France, on voit les chasseurs négocier dans l’antichambre du pouvoir, dans les ministères et sûrement à l’Élysée, le droit à tirer toujours davantage. »

    Les chiffres avancés par la circulaire sont en effet troublants. Le nombre de 500.000 sangliers correspond au nombre de sangliers tués chaque année au cours de toute la saison de chasse — de septembre à mars — et non pendant un mois. Pourquoi le ministère a-t-il repris le chiffrage des chasseurs dans sa circulaire ? Contacté par Reporterre, le ministère n’a pas donné suite à nos demandes de précision dans les délais impartis.

    Pour Allain Bougrain-Dubourg, les justifications des chasseurs ne tiennent pas. « Ils disent que c’est pour limiter les dégâts dans les cultures. Mais en réalité, ce sont des pompiers pyromanes, dénonce-t-il : Ce sont les chasseurs qui ont très mal géré les populations de sangliers et qui ont favorisé leur développement. Avant de sortir les armes, il faudrait commencer par arrêter l’agrainage, fermer tous les élevages de sangliers et arrêter d’importer des sangliers des pays de l’Est, qui pèsent plus lourd et se vendent mieux dans les chasses commerciales.

    Chez les écologistes, on critique aussi « une différence de traitement parmi les usagers de la nature », « un privilège » octroyé par le pouvoir. « Finalement, ce sont les personnes armées et dangereuses qui ont le droit d’aller dehors », s’insurge Madline Rubin, la directrice de l’Aspas (Association pour la protection des animaux sauvages) :

    Cela nous paraît complètement injuste. Pourquoi un vététiste ou un photographe animalier ne pourraient-ils, pas eux, se promener ? Pour profiter de la nature pendant le confinement, faut-il devoir lui tirer dessus ? Il est temps de séparer la chasse du gouvernement comme on a, il y a des années, séparé l’Église de l’État.

    Pour l’instant, aucun naturaliste n’a reçu de dérogation pour aller dans des espaces naturels. L’occasion est pourtant « historique », juge Allain Bougrain-Dubourg. « Ce serait intéressant de profiter de ce répit pour voir comment des espèces fragiles comme le gibier d’eau se comportent et s’épanouit sans la chasse ».

    Les associations environnementales sont sur le pied de guerre. Elles se disent prêtes à déposer des recours contre les arrêtés préfectoraux de dérogation. De son côté, Madline Rubin ne se fait guère d’illusions. Lors du premier confinement, déjà, 60 départements avaient pris des arrêtés de dérogation. Dans les commissions départementales de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS), on compte en moyenne deux représentants d’associations écologistes pour une trentaine de membres. Ils sont marginalisés. « Je n’imagine pas un préfet résister aux chasseurs au niveau local, ils ont trop de pression. Seul le ministère aurait pu », dit-elle. Peine perdue.

    Ces dérogations clivent la société française. Plusieurs pétitions circulent en ce moment et recueillent des dizaines de milliers de signatures. Pour Allain Bougrain-Dubourg, « les chasseurs sont en train de se tirer une balle dans le pied, l’opinion publique n’est plus dupe, il n’y a plus de rationalité, il n’y a qu’une excitation, un goût du sang ».

    • le nouveau visage de la chasse
      www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/societe/johanna-clermont-la-chasseresse-lere-des-reseaux-sociaux-124223
      https://www.valeursactuelles.com/sites/default/files/styles/970x470/public/2020-10/000_8PL6LN.jpg?itok=eGwH6_Lw

      « On parle beaucoup de bien-être animal, mais la souffrance ou l’absence de souffrance sont liées à un état de vie, cela n’a aucun rapport avec la chasse… Et puis quand vous avez vu à quoi ressemble la mort dans le monde animal, vous vous dites qu’une balle, c’est une fin clémente. » Johanna Clermont

      #galinette_cendrée

    • Reconfinement : la chasse au gros gibier autorisée en Ille-et-Vilaine
      https://www.francebleu.fr/infos/agriculture-peche/la-chasse-au-gros-gibier-autorisee-en-ille-et-vilaine-1604659544

      https://www.youtube.com/watch?v=CPydESmbDqo

      Même pendant cette période de confinement, les chasseurs vont pouvoir sortir en Ille-et-Vilaine, dès ce vendredi 6 novembre. La préfecture vient de les y autoriser indiquant que « certaines activités d’intérêt général doivent être maintenues ». Et la chasse au gros gibier en fait partie. La préfecture estime qu’il s’agit « d’éviter un accroissement des dégâts causés aux cultures, aux forêts et aux biens ».

      Les sangliers sont chaque année à l’origine de gros dégâts dans les cultures. « L’an dernier, les seuls dégâts agricoles ont atteint 620 000 euros en Ille-et-Vilaine et près de 80 millions d’euros à l’échelle nationale », précise la préfecture d’Ille-et-Vilaine. Or, le confinement intervient en pleine période de chasse.
      Sangliers mais aussi cerfs, pies bavardes et fouines

      Avec la dérogation prise par la préfecture d’Ille-et-Vilaine, il est possible dès ce vendredi 6 novembre de chasser le grand gibier (sanglier, chevreuil, cerf) mais dans des conditions précises : à l’affût ou en battue dans la limite de deux par semaine et par territoire de chasse (six tireurs minimum, 40 personnes maximum, toutes titulaires du permis de chasser). D’autres espèces nuisibles peuvent également être chassées : il s’agit du corbeau freux, de la corneille noire, la pie bavarde, le renard, la fouine, le ragondin, le rat musqué, le chien viverrin, le raton laveur et le vison d’Amérique . Toute autre activité de chasse reste suspendue. Ces mesures feront l’objet de contrôles, précise encore la Préfecture.

      La préfecture précise que « les regroupements, notamment les moments de convivialité, sont interdits ». Ces actions de chasse exceptionnelles seront réalisées dans le strict respect des règles sanitaires. Seuls les chasseurs et actionnaires des chasses privées résidant en Ille-et-Vilaine ou dans un département limitrophe sont autorisés à participer à ces opérations. Ils devront être munis d’une attestation de déplacement dérogatoire (participation à des missions d’intérêt général sur demande de l’autorité administrative), de la copie de l’arrêté en annexe et d’un justificatif du titulaire du droit de chasse ou de destruction.

      ça commence aujourd’hui jusqu’à ce que mort s’en suive de tout ce qui bouge !

      https://seenthis.net/messages/565920#message569100

      #taïaut_taïaut !

    • Ah ah, les regroupements de chasseurs interdits ? c’est du grand n’importe quoi. Quand une fois mort il faut trainer le sanglier ensanglanté, soulever ce gros gibier dans la voiture, le sortir et l’accrocher à la potence, lui vider le bide, découper les morceaux et les répartir, ça ne se fait pas seul·e parce que c’est juste impossible vu le poids et l’ampleur de la tâche quand il y a plusieurs bêtes à dépecer. Depuis toujours, c’est évidemment l’occasion pour les chasseurs de se raconter leur vie de chasseurs un verre à la main en regardant couler le sang et la merde. C’est toujours l’odeur de merde la plus prégnante et c’est important de le savoir, la tradition de chasse au gros gibier ça pue vraiment.
      Les chasseurs viennent défoncer les chemins avec leur 4/4 qui transportent des chiens affamés, arrivent de loin sans connaitre les lieux, et viennent pour « s’amuser », c’est à dire gueuletonner avec leurs congénères avant/après/pendant la tuerie, c’est une activité assez répugnante avec mise à l’épreuve de celleux qui doivent supporter ce spectacle affligeant.

      #merde_française

    • Un chasseur blessé volontairement lors d’une battue en Ariège
      https://www.leparisien.fr/faits-divers/un-chasseur-blesse-volontairement-lors-d-une-battue-en-ariege-20-12-2020-

      Le président d’une association de chasse a essuyé les tirs d’une carabine à plomb appartenant au propriétaire d’une maison toute proche. Il a été atteint au visage.

      [...]« Il y a un différend, certes, mais là, on voit quelqu’un près de chez soi et on lui tire dessus, c’est l’anarchie complète. Il y a un moment où il faut que ça s’arrête, là on met de l’huile sur le feu plutôt que d’apaiser les tensions », a regretté l’élu local. Le tireur a été arrêté par les gendarmes, immédiatement prévenus de son geste par les chasseurs témoins de la scène, qui ont été depuis auditionnés. Une enquête a été ouverte, son domicile perquisitionné et il a été placé en garde à vue. La pratique de la chasse a, quant à elle, été suspendue sur la commune.

    • @colporteur Sur cette histoire il y aurait comme une histoire de violation de propriété, des faits assez courants chez les chasseurs qui pensent détenir tous les droits comme celui d’être partout chez eux, vu qu’ils sont armés ça aide.

      https://www.ladepeche.fr/2020/12/19/ariege-un-chasseur-blesse-au-visage-apres-un-tir-de-carabine-a-plomb-92674

      Un différend plus ancien  ?
      Le différend entre ce propriétaire terrien et l’association communale de chasse agrée ne semble pas dater d’hier. À l’entrée de sa propriété, l’homme, âgé d’une soixantaine d’années, avait apposé pas moins de trois panneaux interdisant l’accès aux chasseurs. Le plus gros d’entre eux avait été réalisé à la main et indiquait en gros « braconage ailleurs svp ». De nombreuses questions se posent donc aujourd’hui. Les chasseurs étaient-ils présents sur sa propriété au moment des faits ? Ou la situation a-t-elle dégénéré à cause de ce contentieux ancien ? Le travail des enquêteurs devra le déterminer.