• Une soirée difficile pour les sondeurs | Le Devoir
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    Photo : Spencer Platt Getty Images/AFP
    À Philadelphie, en Pennsylvanie, des gens ont manifesté dans les rues de la ville pour dire que « chaque vote compte » et qu’il faut « compter chaque vote ».

    Pourquoi cette difficulté à reconnaître les électeurs de Donald Trump, même après quatre ans de préparation ? « Le trumpisme est tellement mis à l’index que c’est probablement pas une position très confortable à assumer », soulève Élisabeth Vallet, directrice de l’Observatoire de géopolitique de la Chaire Raoul-Dandurand. « Dans le cas présent, soit les électeurs républicains n’ont pas répondu aux sondeurs, soit ils n’ont pas osé dire qu’ils voteraient pour Trump. »

    Mais ce n’est qu’une « fois que tous les bulletins seront rentrés qu’on pourra faire une autopsie beaucoup plus fine de ce qui s’est passé, notamment pour connaître les tranches de population qui ont été mal évaluées », dit-elle.

    Selon Tammy R. Vigil, il se peut qu’au-delà de la « gêne » à se dire trumpiste, il y ait « un phénomène qui existe où les gens se disent honnêtement qu’ils vont voter pour Joe Biden, mais qu’au moment de le faire, leur instinct leur dit autre chose — des éléments plus personnels, plus égoïstes, peuvent entrer en ligne de compte. Ce n’est pas qu’ils ont menti aux sondeurs, mais ils ne connaissaient pas bien leur propre état d’esprit avant d’arriver dans l’isoloir ». Ce qui, convient-elle, n’aide pas les sondeurs à bien décoder ce qui se passe sur le terrain.

    « Les sondeurs n’étaient pas dans le champ, mais l’écart prévu entre les candidats [entre six et huit points] ne s’est clairement pas avéré », note pour sa part Claire Durand, spécialiste des sondages (Université de Montréal) qui a observé de près l’évolution des coups de sonde au fil de la campagne américaine.

    Selon elle, ce sont surtout les sondages menés en ligne qui ont erré cette année. « Les sondages téléphoniques avaient perçu une remontée de Donald Trump, ceux automatisés aussi. Mais les sondages Web ont vraiment sous-estimé le vote Trump. »

    Au Canada, dit-elle, cette méthode de sondage a prouvé son efficacité. Le problème aux États-Unis est plutôt « dans la composition des panels Web. Les échantillons ne sont pas assez diversifiés. » Un autre élément important entre en ligne de compte : « Il y a énormément de sondeurs aux États-Unis, dont plusieurs ne sont pas établis et font des sondages avec de petits échantillons »… ce qui n’empêche pas certains agrégateurs de les prendre en compte pour établir une moyenne des sondages.

    Jean-Marc Léger,[ qui dirige la firme du même nom,] qui fonctionne avec des panels Web, ne croit pas que la méthode de sondage ait quoi que ce soit à voir avec les écarts notés. « Le problème majeur qu’il y a aux États-Unis, c’est qu’il y a des sondeurs vraiment mauvais. Et même si tu fais une moyenne des mauvais sondages, ça donne quand même une mauvaise moyenne. »

    De plus, dit-il, « il y a beaucoup de sondeurs qui sont carrément partisans, comme Rasmussen [pro-Trump]. Ils font partie de la dynamique politique, ce sont des lobbys plus que des sondeurs. »