En finir avec le temps
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Loin de se limiter aux sphères de la physique et la métaphysique, cette conception du temps a trouvé une traduction matérielle dans le champ socioéconomique et s’est imposée par le perfectionnement de l’horloge mécanique et sa fulgurante entrée dans les usines. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la propagation de l’horloge mécanique est contemporaine aux grandes conquêtes du capitalisme industriel. Dans son opuscule Temps, discipline du travail et capitalisme industriel, Edward Palmer Thompson appréhende « la révolution industrielle comme une révolution temporelle en étudiant les progrès de l’horlogerie et ses usages ». Ce faisant, il remarque que « vers 1790, les montres et horloges sont très répandues ; c’est aussi à cette époque qu’elles cessent d’être des objets de luxe pour devenir des articles de nécessité. […] De fait, et ce n’est pas surprenant, les horloges et les montres se généralisent au moment précis où la révolution industrielle exige une meilleure synchronisation du travail ». D’aucuns iront jusqu’à mettre l’horloge au cœur de la transition vers le capitalisme industriel. C’est le cas notamment de Lewis Mumford, qui estime que « la machine-clé de l’âge industriel moderne, ce n’est pas la machine à vapeur, c’est l’horloge ».