La numérisation du quotidien, une violence inouïe et ordinaire
Par #Célia_Izoard
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Mais les discours misérabilistes sur la « fracture numérique » ignorent un point essentiel : c’est le fait que parmi ces treize millions d’individus, une bonne partie pense peut-être que l’État ne devrait pas pouvoir exiger d’eux qu’ils achètent un ordinateur, un smartphone, une imprimante, un scanneur et un abonnement internet (le parc électronique de base) ; qu’ils aident des entreprises privées à faire du data mining ; qu’ils transforment leur vie pour se consacrer à ces systèmes addictifs et envahissants ; qu’ils contribuent à la suppression des fonctionnaires et aux licenciements induits par la numérisation. Une partie d’entre eux pense aussi qu’on ne peut pas les obliger à polluer en achetant toutes ces machines « dématérialisantes ». Qu’on veuille les aider ou leur botter les fesses, on présente toujours ceux et celles qui répugnent à numériser leur vie comme des gens qui n’ont pas encore compris, alors que, bien au contraire, ils ont souvent très bien compris. La question n’est pas celle de l’aptitude personnelle mais celle de la liberté.