• TRISTES TERRASSES Claude Semal
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    L’exigence du “Passe sanitaire”, depuis le 9 août, dans tous les lieux publics en France, n’a pas fini de produire ses effets délétères.

    Dans le coin du Périgord, où j’ai passé une partie de l’été, ils se sont immédiatement fait sentir. Ce n’est pas une grande enquête sociologique, mais ça sent le vécu, coco.

    Dans la petite rue marchande d’Excideuil, celle qui monte vers la Place-à-la-fontaine, un resto a définitivement mis la clé sous la porte, épuisé par un an et demi de contraintes sanitaires.

    Chez les Anglais du coin, qui ne sont plus anglais, mais on ne va pas tout compliquer, on m’a demandé : “Avez-vous votre Passe ?”. J’ai répondu : “Oui, j’ai mon Passe”. Et on m’a servi un verre à table. Tremble, virus !
    (Cela m’a irrésistiblement fait penser au sketch de Francis Blanche et Pierre Dac, déguisés en voyants indous : “Pouvez-vous dire le numéro de sécurité sociale de madame ?” “Oui, je peux dire le numéro de sécurité sociale de madame”. “Il peut dire le numéro de sécurité sociale de madame !”).

    A la buvette-resto du Lac de Nantheuil, renonçant à trier sa clientèle en maillot de bain, et à vérifier son statut vaccinal avant de lui servir un rosé ou une pizza, Diego et ses collègues ont viré toutes les tables et toutes les chaises de la terrasse.

    Ils ne font plus que de la vente à emporter, qui ne répond pas aux mêmes obligations sanitaires, et qu’on peut toujours aller consommer assis dans l’herbe.

    Triste image d’une buvette au mois de novembre en plein mois d’août.

    Chez les Bretons du resto d’Anlhiac, on s’est plié avec rigueur aux nouvelles ordonnances. On scanne votre “QR code” avant même que vous soyez assis.

    Mais depuis le début de la semaine, ils ont perdu le tiers de leur clientèle, et ils ont évidemment parfois été obligés de mettre leurs futurs clients à la porte.

    Enfin, à l’Hostellerie du Fin Chapon, toujours à Excideuil, on a aussi tout “fait comme il faut”, avec chaînette qui clôture la terrasse et circuit sanitaire fléché.

    Mais il vous est toujours loisible, si vous n’avez pas votre Passe, de commander des boissons et des repas “à emporter”, et de les consommer aux tables qui traînent nonchalamment sur la placette adjacente. A malin, malin et demi.

    Ne croyez toutefois pas que j’ai passé la semaine au resto. J’en ai testé un, et pour le reste, j’ai mes propres informateurs ;-).

    Or cette exigence d’un “passe vaccinal” pour boire un verre à l’extérieur ou en terrasse, n’a pas de base médicale.


    En Belgique, on avait par exemple pris soin de distinguer, dans la restauration, le service “en salle”, où la transmission par aérosol reste possible, et le service “en terrasse”, où elle semble négligeable.

    Il ne s’agit donc plus ici de “prévenir une maladie”, mais de faire “chier les gens”, avec contrôles de police aux terrasses, pour les “contraindre” à se faire vacciner.

    Ce n’est donc plus directement un acte sanitaire, mais un acte de contrôle social.

    Version soft, apéritive et estivale de la grenade dans l’oeil chez les gilets jaunes.

    Avec cette conception bonapartiste et policière du pouvoir, “je décide seul, et je vous envoie mes chiens policiers pour le service après-vente”, qui prétend toujours contraindre plutôt que convaincre, Macron a transformé chaque bar et chaque restaurant de France en possible foyer de contestation de sa politique. Et il y en a beaucoup, des bars et des restos en France.

    Au moment où l’épidémie explose dans les territoires d’Outremer, ces confettis post coloniaux qui sont d’abord victimes de leur sous-développement économique et sanitaire, Macron a ainsi pris le risque de braquer et de cliver un peu plus l’opinion publique.

    Montrer des morgues qui débordent à la Réunion ou en Martinique, suffira sans doute pour lui à discréditer les 200.000 personnes qui ont manifesté hebdomadairement contre son “Passe sanitaire”.

    Là où une politique sanitaire conséquente et efficace devrait rassembler l’ensemble de la population, en préservant à la fois sa santé et ses libertés, il a personnalisé la question vaccinale, à coups de menton bonapartiste, jusqu’à la transformer en plébiscite “pour ou contre Macron”.

    Là où il faudrait renforcer les équipes soignantes des hôpitaux, il les affaiblit en licenciant ceux et celles qui ne sont pas vaccinés.

    Là où il faudrait prioritairement chercher à vacciner les 20% de personnes âgées qui, en France, sont actuellement passées sous les radars, il préfère aller draguer les jeunes prépubères sur Instagram.

    Or c’est un jeu risqué et dangereux, quand on est aussi aimablement détesté, de compter sur l’amour qu’on vous porte pour combattre une épidémie. Certains pourraient finir par préférer les virus.
    Claude Semal, le 20 août 2021

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