• Îles Salomon : la Chine en toile de fond des émeutes
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    En octobre 2019, le Premier ministre des îles Salomon, Manasseh Sogavare, avait été reçu en grande pompe à Pékin par le Premier ministre chinois, Li Keqiang
    © Mark Schiefelbein, AP

    Les émeutes qui secouent Honiara, la capitale des îles Salomon, depuis mercredi sont en partie dues à un changement d’alignement diplomatique en faveur de Pékin qui remonte à 2019. Explications.

    Trois jours d’émeutes, un couvre-feu reconduit pour un durée indéterminée à Honiara, la capitale des Îles Salomon, vendredi 26 novembre, et l’armée australienne appelée en renfort pour ramener l’ordre sur place.

    Des milliers de manifestants appellent depuis mercredi à la démission de Manasseh Sogavare, le Premier ministre. Ils ont même tenté de s’introduire, vendredi, dans sa résidence personnelle après avoir essayé de prendre d’assaut le bâtiment du parlement deux jours plus tôt. 

    La question chinoise a « rendu la situation explosive »
    Et l’intervention des forces de l’ordre, qui ont procédé à plusieurs tirs de sommation ces derniers jours, n’a pas calmé les esprits. Les débordements violents des manifestants ont continué et plusieurs magasins ont été incendiés. Pas n’importe où : la plupart des bâtiments attaqués se trouvent dans le quartier chinois d’Honiara.

    Ce n’est pas un hasard. En effet, l’ombre de la Chine et la lutte d’influence que Pékin livre aux autres puissances occidentales dans le Pacifique pèsent sur ce mouvement de protestation. Une part importante des manifestants vient de l’île de Malaita, la province la plus peuplée du pays et où une majorité des habitants, y compris le gouvernement local, n’a pas pardonné à Manasseh Sogavare d’avoir opéré un virage diplomatique à 180 degrés en 2019 pour se rapprocher de Pékin au détriment de Taïwan.

    Alors certes, « les bras de fer géopolitiques dans la région ne sont pas à proprement parler à l’origine de ces émeutes », analyse Mihai Sora, un ancien diplomate australien qui a été en poste dans les îles Salomon, interrogé par le New York Times. Le mouvement s’explique aussi par un profond malaise économique et social des habitants de Malaita, qui reprochent au gouvernement « une distribution injuste des ressources naturelles du pays qui ont fait de Malaita la région la moins développée de l’archipel », rappelle The Diplomat, un site spécialisé dans l’actualité de la zone asiatique.

    Néanmoins, « les controverses autour de l’influence chinoise ont fragilisé la cohésion sociale dans l’archipel, rendant la situation d’autant plus explosive », ajoute Mihai Sora. En ce sens, les îles Salomon illustrent très concrètement à quel point les tensions géopolitiques toujours plus fortes entre les États-Unis et ses alliés d’un côté, et la Chine de l’autre peuvent déstabiliser des territoires entiers. D’où l’intérêt médiatique international suscité par un mouvement social dans un territoire qui ne compte, au total, que 668 000 habitants.