Demandes d’asile rejetées, rapatriements et réunifications familiales à la traîne : le désarroi des Afghans de France
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Les premières décisions de rejet de demandes d’asile d’Afghans sont tombées. En parallèle, les demandes de réunification familiale ou de rapatriement formulées par des réfugiés déjà protégés en France n’aboutissent pas, laissant les requérants imaginer le pire pour leurs proches restés dans le pays.
Depuis la chute de Kaboul et la prise de pouvoir par les talibans en Afghanistan en août dernier, certains organismes – français et internationaux - estiment qu’il n’y a plus de conflit armé, réduisant ainsi les chances pour les Afghans d’obtenir une protection.
Au lendemain d’un attentat revendiqué par l’État islamique le 26 août, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), chargée d’étudier les recours des personnes ayant vu leur demande d’asile rejetée en premier lieu par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), suggérait ainsi aux juges de réduire la protection des Afghans, considérant qu’il était « permis de conclure à la cessation du conflit armé ».
« À cet égard, les deux attentats revendiqués par l’organisation État islamique le jeudi 26 août ne remettent pas en cause cet état de fait », pouvait-on lire dans un mail interne que s’était procuré Mediapart fin août (lire notre enquête). Dans les semaines qui suivent, les premiers rejets pour des demandes d’asile formulées par des requérants afghans tombent.
Mediapart a pu consulter une quinzaine de décisions de la CNDA, datées entre le 15 septembre et le 3 décembre, dans lesquelles la cour évoque des déclarations « très peu circonstanciées ou personnalisées », « confuses ou incohérentes », « lacunaires », « sommaires et peu substantielles » ou encore des propos « superficiels ».
Une décision de rejet de la CNDA concernant un demandeur d’asile afghan. © Capture d’écran.
La plupart du temps, la cour souligne que les déclarations du requérant « n’ont pas permis d’établir la réalité des faits à l’origine de son départ d’Afghanistan ni d’établir le bien-fondé et l’actualité de ses craintes en cas de retour dans son pays d’origine ». En balayant ainsi les craintes de persécutions ou de menaces graves – pouvant émaner d’une opposition d’ordre politique ou religieux, par exemple –, les juges de l’asile refusent d’accorder le statut de réfugié au requérant.
À chaque fois, ils reconnaissent toutefois que « les talibans contrôlent aujourd’hui la quasi-totalité du territoire afghan », mais estiment que la situation prévalant dans ce pays, et notamment dans la province du requérant, « ne peut plus être regardée comme une situation de conflit armé caractérisée par une violence aveugle ». Autrement dit, le degré de violence n’est pas suffisant pour justifier une protection pour les requérants afghans, qui n’encourent, selon les juges, plus de risques en cas de retour sur place.