Merci @yohooo.
1. Justement, sur ce message précis, mon sujet est la « taxe Google » prenant la forme d’une extension des droits d’auteurs. Et en l’occurence, comme à chaque fois qu’on est confronté à des acteurs de la mafia du copyright, les arguments « nobles » (faire vivre une presse de qualité, la pluralité, etc.) sont à bannir absolument de la discussion, parce que ces gens sont de toute façon des escrocs. Donc la question de « faire vivre » une presse de qualité et tout ça, je pense que ça n’est pas directement le moment, parce que sinon on retombe toujours dans les arguments de la mafia d’en face.
Je le dis dans ma première phrase : la question de « comment financer une presse de qualité », ici je m’en fous. Ce que j’aimerais qu’on rappelle ici, c’est que cette proposition de la presse est antagonique avec la liberté d’expression, et que c’est à chaque fois comme ça avec la presse (qui est donc toujours dans le camp ennemi, ici la mafia du copyright).
2. L’exemple du reportage de guerre me semble, justement, le pire contre-exemple qu’on puisse choisir pour défendre une presse professionnelle. Si, même, on parvient à trouver quelques journalistes de qualité, il faut bien constater qu’il faut, dans le système capitaliste, mettre 1000 crétins pour sortir 1 info.
Et surtout : justement, l’information de guerre est très très très largement fournie par des intervenants qui sont :
– les armées en conflit,
– tous les services des gouvernements concernés de près ou de loin,
– les « activistes » sur le terrain (avec aujourd’hui des vidéos sur Youtube, des « témoignages » sur Facebook, etc.).
Les infos et les images « sorties » par des reporters de guerre sont très très peu nombreuses. Et les « reporters » qui consacrent beaucoup de temps à un sujet ne publient généralement pas leurs infos dans « la presse », mais sur d’autres supports. La presse n’est pas le support privilégié des grandes enquêtes.
De plus, historiquement, confier les journaux à des « journalistes professionnels » est une évolution très récente. Aucune plume connue n’a jamais étudié dans une école de journaliste et, si on veut retrouver les grands « journalistes » qui ont eu un impact, par leur témoignage, sur les conflits, ils n’étaient généralement pas journalistes, mais écrivains ou intellectuels (donc, exactement ce qu’on dénonce comme impossible : des gens qui ont un autre métier).
2b. Et je le répète, parce que vraiment c’est un piège logique systématique : il ne s’agit pas d’opposer « les blogueurs » isolés et amateurs aux journaux. L’information n’est déjà pas produite par les journaux (mais par les gouvernements, les institutions, les associations plus ou moins professionnelles, les entreprises…). Je répète, Chomsky a donné des chiffres depuis plus de 20 ans, et ils sont très clairs : l’information n’est pas produite par les journalistes, mais par des sources auxquelles ont totalement accès « les blogueurs » et, surtout, des sources qui peuvent déjà directement diffuser leur contenu. Les associations font déjà un travail incroyable, et rien n’interdit de participer à des associations qui fabriquent du contenu pertinent et peuvent désormais le diffuser à grande échelle. Sur tout sujet sérieux, les sources aujourd’hui sont les associations militantes, les universitaires engagés, les médias alternatifs… Si tu veux causer des pauvres, et abandonnés, de ceux qui ont du mal à s’exprimer, à se connecter, etc., tu peux bien compter qu’il y a des associations qui sont parfaitement capables de transmettre un message à leur sujet ; et cela sans doute bien plus efficacement que le désintérêt total des journaux pour les pauvres déconnectés.
3. OK, mais j’ai milité pour l’expression publique (de qualité, évidemment) des citoyens sur l’internet depuis 15 ans. J’ai fait les premières versions de SPIP, avec uZine comme démonstration, dans le but justement de faire un système de travail éditorial collectif (pas juste un machin technique, mais un outil qui promeut certaines formes de travail éditorial collaboratif), en pensant que c’est la collaboration qui permet de faire progresser tout le monde et de dépasser les limites du site individuel. Et Seenthis est à nouveau conçu dans une optique éditoriale similaire : pas pour que chacun fasse son petit personal branding dans son coin, mais pour qu’un travail collectif/collaboratif se mette en place pour favoriser la qualité.
Donc, non, je ne crois pas être à ronchonner sans rien proposer. Et sinon, ça tombe bien, je trouve l’article de Halimi particulièrement à côté de la plaque (ou « ronchon », si tu veux).