« Si la gauche l’emporte, on verra les chars soviétiques place de la Concorde » prophétisait le député Michel Poniatowski en 1981 tandis qu’en 1986 le groupe punk Bob Radar & Les Mythes Errants, nettement plus ironique, chantait « Je veux voir les chars russes à Paris / Je veux me croire à Varsovie ». Et c’est vrai qu’un T-34 en double-file devant chez Maxim’s, ça en impose davantage qu’une Merco niveau frime. M’enfin, foin de la nostalgie des années 80, avouez que personne n’a vraiment envie de devoir apprendre le russe pour commander une vodka-orange. C’est dégueulasse la vodka-orange.
Pourtant, aujourd’hui, il y a davantage de probabilités de voir des chars russes place de la Concorde que la gauche remporter les présidentielles. À se demander d’ailleurs s’il ne faut pas carrément élire Zemmour qui, en grand admirateur de Pétain, devrait savoir négocier avec l’occupant. Quoique si Zemmour avait été à la place de Pétain en 1941, il aurait surtout négocié sa place de train…
À vrai dire, je ne comprend plus rien à la politique actuelle : tandis qu’une grande partie de ce que l’hexagone compte de fascistes revendiqués, de néonazis décomplexés et de nationalistes antisémites s’apprête à voter pour un candidat juif algérien, la candidate de la « droite patronale traditionnelle » prône la réquisition des yachts et des villas de milliardaires (russes) pour héberger des réfugiés ! Et « de l’autre côté », il suffit d’écouter 5 minutes Fabien Roussel pour se demander pourquoi on a classé sa candidature à gauche…
Oh, qu’on ne se méprenne point : même si je me résigne à titre personnel au « Plutôt Mélenchon que Macron, plutôt Poutou que Poutine », c’est pas mézigue qui vais donner des consignes électorales… D’ailleurs, tu votes, tu votes pas ; tu te vaccines, tu te vaccines pas, j’en ai strictement rien à carrer, y’a déjà assez de donneurs de leçon en liberté ! L’essentiel est de garder un stock de masques suffisant pour la prochaine charge virale ou lacrymogène. Et d’apprendre à faire des cocktails au nom russe (2 € le litre).
Bref, les peuples n’ont pas fini d’en baver – quelque soit leur nationalité – face à la rapacité des dominants. La guerre en Ukraine et l’exode forcément forcé qu’elle génère a au moins le mérite (très très relatif) de montrer que l’Europe n’est pas une forteresse… mais une boîte de nuit : tu peux pas rentrer si t’es trop basané et, à l’intérieur, t’entends que de la merde et tout est hors de prix. Le voilà le nouveau monde bipolaire à l’ère de la société spectaculaire : deux salles, deux ambiances ; deux sales ambiances.