Pendant ce temps, au Chili ...
La Convention constitutionnelle tente de renforcer les droits de la nature face aux intérêts privés. Carolina Vilches, géographe et militante pour le droit à l’eau, siège dans la commission sur l’environnement. Elle explique les résistances qu’elle rencontre.
par Mathieu Dejean / Mediapart
Nous travaillons de la manière la plus ouverte possible, en essayant d’articuler les forces politiques et les mouvements sociaux qui cohabitent dans la Convention. C’est important de comprendre que ce processus est inédit. Nous avons réussi à faire en sorte que les mouvements sociaux débattent à égalité avec les partis politiques, et ça prend du temps, car ils n’avaient jamais eu d’espace de discussion pour arriver au consensus auparavant. Cette Convention est pensée pour qu’aucune force ne puisse s’imposer aux autres. C’est pourquoi il faut un quorum très majoritaire [des deux tiers de l’assemblée plénière – ndlr] pour valider une norme. La possibilité de reconstruire les normes tous ensemble permet d’arriver au consensus.
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De manière générale, les médias de masse ont été très superficiels et confus. Les discours qu’ils ont tenus sur la validation des normes correspondent à une construction erronée de ce qui se passe en réalité. Par exemple, quand la commission parlait de mettre en place des autorisations pour l’usage de l’eau, les médias disaient que la Convention voulait exproprier les petits paysans et priver l’agriculture familiale paysanne d’accès à l’eau. En cela, ils ne faisaient que répéter les mots du patronat.
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La nouvelle Constitution doit être approuvée le 4 septembre. N’est-ce pas court comme délai, pour un travail aussi ambitieux ?
Sans doute, le délai est court. Les temps de la Convention sont dignes de marathons. Le 5 juillet, le brouillon de la Convention doit être entre les mains du président du Chili. Mais même si c’est court, nous sommes 154 – moins une trentaine – déterminés à mettre toutes nos connaissances et nos compétences pour respecter les délais et remplir le mandat populaire confié par les communautés à travers le Chili.
L’arrivée de Gabriel Boric au pouvoir, et celle de Maisa Rojas au ministère de l’environnement, ont-ils changé quelque chose pour vous ?
Je pense qu’il est encore trop tôt pour évaluer les changements provoqués par l’arrivée de Boric. La Convention est un organe autonome. C’est une conquête du peuple chilien. Et pas nécessairement d’une administration gouvernementale, même si, en l’occurrence, nous savons que nous pouvons compter sur le soutien de celle-ci.
►https://www.mediapart.fr/journal/international/120422/le-difficile-chemin-du-chili-vers-une-constitution-ecologique