• Ne laissons pas à l’extrême droite l’idée de liberté | Sergio Bologna
    https://cabrioles.substack.com/p/ne-laissons-pas-a-lextreme-droite

    Dans notre tradition d’expériences, de luttes, de raisonnements et de recherches, tant le problème de la santé publique que celui des épidémies ont été abordés et examinés en profondeur.

    Celle et ceux qui ont suivi avec un peu d’attention la présidence Trump et en particulier, dans les mois de la pandémie, la campagne électorale qui a conduit à sa défaite, auront remarqué avec quelle insistance lui et ses partisans prétendaient vouloir défendre la liberté des individus.

    Freedom, liberté, est un mantra de l’histoire américaine, évoqué à certaines époques avec plus d’insistance, à d’autres avec moins de tension. Tout au long de la confrontation avec le communisme, par exemple, le mot liberté a été utilisé pour identifier tout ce que le communisme n’était pas. La liberté du marché avant tout, le contraire du dirigisme communiste. Le concept de liberté, que la Révolution française avait érigé en valeur suprême et en principe fondamental de la civilisation, s’est transformé dès le cours du XIXe siècle en un concept de liberté comme essence d’un certain ordre économique, d’une certaine configuration institutionnelle. Elle est passée d’une valeur qui donnait une identité à une classe, la classe bourgeoise, à une valeur qui donnait une identité au capital, tandis que les classes subordonnées brandissaient en bannière la « solidarité ».

    Ce qui se passe aujourd’hui est encore différent, car l’idée de liberté que l’extrême droite met en avant - et Trump appartient à l’espace de l’extrême droite - doit pouvoir se traduire par un comportement reconnu par cette « multitude » sans connotation de classe, qui résulte à la fois de la fin de l’opposition entre le modèle de la démocratie occidentale et le modèle du régime communiste, devenue dès lors une opposition générique entre « droite » et « gauche », et de la dissolution de la classe moyenne et de la fragmentation et de l’éclatement de la classe ouvrière.

    Elle ne doit plus se présenter d’emblée comme synonyme d’un ordre social, économique et institutionnel particulier, mais comme la substance biologique, « naturelle », d’une humanité en quête de pur bien-être. Ainsi, la liberté devient simplement le droit de l’individu de faire ce qu’il veut pour son propre bénéfice, non seulement en dehors de toute règle, ordre et principe institutionnel - Trump encore, à titre d’exemple - mais aussi en dehors de toute considération pour l’autre que lui-même : l’individu a le droit de faire ce qu’il veut, sans se soucier de savoir si son action peut être à l’avantage ou au détriment des autres. Parce que l’autre n’existe que s’il lui est opposé, en tant qu’égal, exerçant le même droit à son propre son avantage. S’il n’est pas mon égal, je l’emporte ; s’il l’est, je le combats pour l’emporter. La régression est évidente : de la société de Locke, du contrat social de Rousseau et du libéralisme de Stuart Mills (l’exercice de ma liberté ne peut limiter celle des autres) à l’homo homini lupus de Hobbes et au darwinisme social intrinsèque à l’histoire des XIXe et XXe siècles du capitalisme prévaricateur, colonialiste, néolibéral et raciste.

    #vaccination #anti-vax