• Course poursuite entre #Sospel et #Nice : la personne blessée par le tir d’un policier est décédée (16 juin 2022)

    Une personne est décédée jeudi 16 juin après avoir été atteinte par le tir d’un policier qui a tenté de stopper la fourgonnette avec laquelle des passeurs venaient de forcer un barrage depuis l’Italie, quatre autres migrants à leur bord.

    (#paywall)
    https://www.nicematin.com/faits-divers/course-poursuite-entre-sospel-et-nice-la-personne-blessee-par-le-tir-dun-

    #Italie #France #frontière_sud-alpine #migrations #réfugiés #frontières #décès #mort #mourir_aux_frontières #Vintimille

    #Omar_El-Khoury #Omar_Elkhouli
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    ajouté au fil de discussion sur les morts à la frontière de Vintimille :
    https://seenthis.net/messages/784767

    lui-même ajouté à la métaliste sur les morts aux frontières alpines :
    https://seenthis.net/messages/758646

    • Nice : un migrant blessé par #balles lors d’une #course_poursuite de 40 kilomètres avec la police

      Le conducteur du fourgon qui transportait les deux migrants blessés cette nuit lors d’une poursuite avec la police, est en fuite ainsi que deux autres passagers.

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      Précision : dans une précédente version de cet article, nous indiquions que deux migrants avaient été blessés par balles. Mais, si les deux ont été pris en charge, seul un migrant a été touché par les tirs, l’autre a été victime d’un malaise.
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      Une personne a été blessée par balles dans la nuit du mardi 14 au mercredi 15 juin à l’issue d’une course poursuite avec la #police à Nice dans le quartier des #Moulins (Alpes-Maritimes), selon une source policière révélée par franceinfo. Touchée à la tête, elle est hospitalisée dans un état grave, précise le procureur de la République de Nice dans un communiqué.

      Il s’agit d’un migrant âgé de 35 ans et de nationalité égyptienne. Il faisait partie des passagers d’une camionette frigorifique qui a foncé sur des policiers. Avec lui, quatre autres migrants ont été interpellés. L’un d’eux a été pris en charge également, victime d’un malaise, selon des précisions apportées par France Bleu Azur. L’IGPN est saisie, a-t-on appris de source judiciaire. Trois hommes, dont le conducteur, sont en fuite.

      Selon les informations de franceinfo, tout a commencé vers deux heures du matin, lors d’une opération conjointe de police franco-italienne à la frontière sur la commune de Sospel (Alpes-Maritimes) à la frontière italienne. Le fourgon transportait cinq migrants, plus trois personnes dont le conducteur, a-t-on appris de source judiciaire. Le véhicule a d’abord refusé d’obtempérer au contrôle de la police. Une course poursuite de 40 kilomètres s’est alors engagée jusqu’à Nice, au quartier des Moulins.

      La police a tiré sur le véhicule qui les chargeait

      Le fourgon s’est arrêté avant de redémarrer et a foncé sur les policiers de la #police_aux_frontières (#PAF). Ces derniers ont fait usage de leurs #armes et ont tiré à quatre reprises. Deux personnes, des migrants, à bord du véhicule ont été blessés, l’une grièvement par balles, l’autre prise d’un malaise. Le conducteur et deux autres passagers ont réussi à s’enfuir, laissant sur place les cinq migrants.

      https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/info-franceinfo-nice-deux-migrants-blesses-par-balles-lors-d-une-course

    • La véritable histoire d’#Omar_Elkhouli, tué par un #tir policier à la frontière italienne

      Cet Égyptien a été tué par balle mi-juin après une course-poursuite entre les policiers et la camionnette où il se trouvait, avec d’autres sans-papiers. Présenté comme un « migrant », il vivait en fait en France depuis 13 ans, et s’était rendu en Italie pour tenter d’obtenir une carte de séjour.

      L’histoire d’Omar Elkhouli est emblématique de la violence aux frontières et des risques encourus par les exilé·es qui tentent d’éviter les contrôles de police. Elle est aussi symptomatique des difficultés administratives que rencontrent les étrangères et étrangers en France, en préfecture, pour obtenir des papiers.

      « Omar vivait en France depuis 13 ans », souffle Mohamed, installé dans le salon de sa maison à Carrières-sur-Seine (Yvelines). Il le connaissait à peine, mais c’est lui qui a dû rechercher les proches d’Omar en Égypte, afin de leur apprendre la nouvelle de son décès.

      Âgé de 35 ans, Omar Elkhouli a été blessé par balle à la tête dans la nuit du 14 au 15 juin, à la frontière franco-italienne, alors qu’il se trouvait dans une camionnette conduite par des passeurs. Le véhicule a d’abord été pris en chasse par la police italienne, puis par la police aux frontières (PAF) française, qui a ouvert le feu.

      Omar Elkhouli est mort mercredi 15 juin en fin de journée. « Le migrant égyptien est décédé », titrent alors des médias français. Personne n’imagine qu’il était en réalité établi en France depuis de longues années, et n’aspirait, ce soir-là, qu’à rentrer chez lui.

      « On était juste allés en Italie pour tenter d’avoir une carte de séjour », expliquent Momein et Elmatwely, deux passagers de la fourgonnette, rencontrés par Mediapart au domicile de Mohamed le 26 juin.

      « On leur rend la vie tellement impossible ici que même quand ils ont des années de présence en France, qu’ils travaillent et qu’ils ont des promesses d’embauche sérieuses, ils se retrouvent à faire appel à des entremetteurs qui proposent de leur faire des documents par le biais de trafics », surenchérit Mohamed en extirpant un épais dossier du buffet.

      Depuis 2018, Mohamed regroupe tous les documents permettant de prouver la présence de Momein en France, en vue de déposer une demande de régularisation auprès de la préfecture de Seine-Saint-Denis. « Je suis insomniaque, je me lève presque toutes les nuits pour tenter de lui trouver un rendez-vous pour le dépôt du dossier, mais il n’y en a jamais », dit-il, conscient de ce que son pays inflige aux personnes étrangères.

      Momein et Mohamed se sont rencontrés en 2016, alors que le premier réalisait des travaux chez la sœur du second – beaucoup d’exilés égyptiens travaillent dans le BTP. « On a tout de suite sympathisé, il est devenu un ami. » Un jour, Momein lui explique vouloir aller en Italie avec son ami Omar, pour rencontrer un intermédiaire, qui fournit de faux documents aux sans-papiers, afin de leur permettre d’obtenir une carte de séjour italienne.

      Mohamed les aide à acheter leur billet de train de Paris à Milan, et suit leur trajet « en direct », pour être certain que tout se passe bien. « J’ai encore le billet d’Omar dans nos échanges WhatsApp », glisse-t-il avant de cliquer sur sa photo de profil. « Il était si jeune. » Momein et Omar prennent le train samedi 11 juin au matin et parviennent à déposer leur dossier en préfecture en Italie, grâce au dossier monté par le trafiquant.
      Un rabatteur et une plongée en enfer

      Lorsqu’ils veulent rentrer en France, mardi 14 juin, où plusieurs chantiers en cours les attendent, il n’y a plus de train pour Paris depuis Vintimille. Ils sont approchés par un rabatteur, qui propose de les aider à traverser la frontière. « Il nous a dit qu’il y avait la police à la gare et que c’était risqué de rester là. On s’est dit que c’était une solution », raconte Momein, qui enchaîne les allers-retours au jardin pour griller une cigarette. « Il ne fumait que très occasionnellement avant, commente Mohamed en le voyant se lever. Mais depuis son retour, il n’arrête pas. »

      Le rabatteur trouve Elmatwely, le troisième passager égyptien, marchant sur le bord de la route tout près de la gare. Ce dernier venait d’arriver à Vintimille, il était minuit passé. « Il m’a dit qu’il y avait deux autres Égyptiens pour me mettre en confiance. Je connais bien cette frontière pour l’avoir passée plusieurs fois. Je savais que je risquais un contrôle », raconte-t-il à Mediapart.

      Elmatwely, qui s’était rendu en Italie pour renouveler son titre de séjour expiré, avait déjà été arrêté à deux reprises à la gare, et ramené en Italie. Cette fois, il marche 500 mètres avec Momein et Omar pour rejoindre un parking, où trois passeurs et un camion frigorifique les attendaient.

      « On a donné 50 euros chacun au rabatteur, et les passeurs nous ont dit qu’on les paierait 200 euros à notre arrivée à Nice », poursuit Momein.

      Le camion démarre aux alentours de 0 h 50 et s’arrête peu de temps après, sans doute pour faire le plein d’essence, présument les deux rescapés. « La police française nous a montré une vidéo où l’on voit les trois passeurs à une station essence », précise Momein. Leur dialecte lui laisse penser qu’ils sont algériens, ce que Mediapart n’a pas pu confirmer auprès du parquet de Nice. « Ils étaient jeunes. Pas plus de 30 ans. »

      Les sirènes de la police italienne retentissent 15 minutes après leur départ. Deux Algériens sont aussi à l’arrière du véhicule, parmi les passagers clandestins.

      « On demandait aux passeurs de s’arrêter mais ils accéléraient. Ils prenaient des virages serrés, on se cognait les uns contre les autres. À un moment donné, c’était tellement agité qu’Omar s’est retrouvé à ma place [à l’arrière droite du camion] et moi à la sienne », se remémore Momein.

      La scène dure environ 45 minutes. La police italienne a-t-elle ouvert le feu ? Momein et Elmatwely ne parviennent pas à se mettre d’accord. « Non », dit l’un. « Si, rétorque l’autre, mais ils visaient le châssis de la voiture. » C’est plus tard, durant la course-poursuite avec la PAF qu’Omar reçoit une balle à l’arrière de la tête.

      « Si on n’avait pas été bousculés à l’arrière, c’est moi qui l’aurais reçue », soupire Momein, la mâchoire serrée. Pour stopper l’hémorragie, ce dernier retire sa veste et appuie sur la plaie autant qu’il le peut. Mais Omar perd trop de sang.

      « Omar était encore conscient et priait Dieu », assure Elmatwely en mimant son geste. « Mais il y avait tellement de sang… », ajoute Momein, qui s’arrête brusquement de parler pour ravaler des larmes.

      Malgré leurs supplications, les passeurs refusent de s’arrêter. « On frappait sur la paroi de séparation en hurlant que l’un de nous était blessé à la tête, mais ils continuaient à accélérer. Un des passagers algériens a même appelé le rabatteur au téléphone pour qu’il dise au conducteur de s’arrêter. On a tous cru qu’on allait mourir. »

      « Il s’agissait d’un fourgon frigorifique, il n’y avait donc pas de fenêtres ou de portes à l’arrière pour permettre aux migrants de s’échapper », complète Me Zia Oloumi, leur avocat, qui s’est battu pour obtenir leur libération, une fois le cauchemar terminé.

      À leur arrivée à Nice, vers 2 heures du matin, plusieurs véhicules de police les attendent. Les passeurs « s’évaporent dans la cité », qu’ils semblaient « bien connaître », selon Elmatwely. Une fois la portière ouverte, Momein fait une crise d’angoisse et perd connaissance.

      « Des policiers lui mettaient des coups de pied pour voir s’il réagissait. Ils ont mis 15 minutes à prendre en charge Omar, poursuit son compagnon. Une policière était en état de choc en découvrant la scène, j’ai essayé de l’interpeller en plongeant mes mains dans le sang d’Omar tant elle ne réagissait pas », poursuit-il.

      Omar, puis Momein, sont conduits à l’hôpital. Les autres sont amenés au commissariat. « Les ambulanciers avaient déchiré mes vêtements, pleins de sang, mais quand ils ont vu que je n’étais pas blessé à l’hôpital, la police est venue me chercher. Ils m’ont emmené au poste en boxer », se souvient Momein. Une humiliation.

      En état de choc, Elmatwely estime avoir été « pressé comme un citron », interrogé sans même pouvoir se concentrer, sans avoir pu se changer, ni manger ou, dans un premier temps, boire. À leur sortie du commissariat, en début de soirée le 15 juin, les passagers de la camionnette sont placés en rétention, et se voient délivrer une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Sans suivi psychologique particulier.

      Elmatwely et Momein, qui se disent aujourd’hui « liés par la mort », n’ont plus goût à la vie. « On n’arrive plus à se projeter. On est venus ici pour se construire un avenir, pas pour vivre ce genre de choses. » L’avocat Zia Oloumi a réussi à les faire sortir lundi 20 juin, grâce à une décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence au vu de leur « vulnérabilité », de leur « état psychologique » et des « circonstances particulières de l’affaire ».

      « Le premier juge des libertés et de la détention, qui a pourtant tellement l’habitude de prolonger la durée de rétention qu’on le surnomme “Bonjour 28 jours”, avait déjà considéré qu’il y avait atteinte au droit à la santé et avait demandé leur sortie de rétention, détaille l’avocat. Mais le parquet a fait appel. Le préfet s’est battu pour maintenir ces personnes en rétention malgré le drame qu’ils avaient vécus. »
      La vie tranquille d’Omar Elkhouli en région parisienne

      À leur sortie de rétention, les deux Égyptiens ont porté plainte contre X et contre la police pour « mise en danger de la vie d’autrui ».

      Contacté par Mediapart, le parquet de Nice indique que deux enquêtes sont ouvertes : l’une, contre X, confiée à un juge d’instruction, pour les chefs « d’aide à l’entrée et à la circulation en France d’étrangers en situation irrégulière dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine », « refus d’obtempérer aggravé par la mise en danger d’autrui », « tentative d’homicide sur personne dépositaire de l’autorité publique » ; l’autre, sous l’autorité du parquet, confiée à l’IGPN (Inspection générale de la police nationale), des chefs « d’homicide volontaire » concernant la victime du tir policier. Selon nos informations, le corps d’Omar Elkhouli devait être rapatrié en Égypte vendredi 1er juillet.

      Depuis Paris, Mohamed a activé son réseau pour retrouver la famille d’Omar dans la région de Gharbeya. Il est finalement parvenu à joindre un de ses cousins vivant en France, auquel il a demandé de se manifester au plus vite auprès de la justice pour permettre le rapatriement du corps.

      Ce cousin s’est aussi rendu au domicile d’Omar en région parisienne, pour récupérer son passeport égyptien et d’autres documents nécessaires aux démarches. Ses colocataires, Ibrahim, Mahmoud et Rezk, que Mediapart a retrouvés, n’arrivent toujours pas à y croire Omar vivait là depuis quatre ans, après avoir vécu avec Ibrahim dans un autre logement à Aubervilliers.

      « On a passé dix ans ensemble, jour et nuit. C’était mon frère », dit ce dernier lorsque nous les rencontrons dans leur appartement à Sarcelles (Val-d’Oise), lundi 27 juin. Les trois colocataires ont laissé sa chambre telle quelle : un lit, un canapé et une armoire occupent l’espace, des calligraphies coraniques décorent les murs ; le tapis sur lequel Omar priait repose encore sur son lit.

      « Omar était quelqu’un de pieux », appuient-ils. Il était aussi passionné d’haltérophilie, entretenant un compte TikTok où il publiait pléthore de vidéos où l’on peut le voir s’entraîner ou coacher des adhérents. Ibrahim se souvient de leur première rencontre, à son arrivée en France dix ans plus tôt.

      « Je suis arrivé sans rien. Je venais de traverser la mer et j’avais des claquettes aux pieds. Un ami en Égypte m’a donné son contact en me disant qu’il pourrait peut-être m’aider. Il m’a hébergé, m’a trouvé du boulot et m’a prêté 100 euros. » À vrai dire, il les a tous aidés. Mahmoud, qui errait dans les rues de Paris sans aucun contact en arrivant en France, a fini par être mis en relation avec lui.

      « Nos propres frères ne nous ont pas aidés comme il l’a fait », résument-ils, ajoutant qu’il organisait aussi des collectes d’argent pour les personnes endeuillées et dans le besoin en Égypte. « On veut que le monde entier sache qu’il n’était pas un “migrant”. Il vivait en France, il n’avait jamais eu d’ennuis avec la police. Il ne méritait pas de mourir ainsi. » Grâce à ses chantiers dans le BTP, Omar envoyait de l’argent à ses proches restés en Égypte chaque mois. Avant cela, il avait vécu deux ans à Dubaï, où il était cuisinier.

      « Pourquoi on nous traite comme ça ? Parce qu’on est des Arabes ? Dites-moi qui veut se lever tous les jours à 5 heures du matin pour aller travailler sur les chantiers ! », clame Mahmoud. « Omar avait des rêves d’Europe et avait choisi de rejoindre un pays de liberté », souligne Ibrahim. Mais après treize années de présence en France, Omar s’est trouvé face à un mur administratif.

      « Il savait qu’il serait impossible de prouver son existence sur treize ans. Mais surtout, il savait qu’il était impossible d’avoir un simple rendez-vous en préfecture. Un de mes amis, Égyptien également, travaille en étant déclaré et a accumulé plus de 40 fiches de paie. Cela fait trois ans qu’il n’arrive pas à prendre rendez-vous en préfecture. En entendant cette histoire, Omar a été totalement découragé », relate Ibrahim.

      Lorsqu’il apprend, en même temps que Momein, qu’un intermédiaire peut aider à obtenir une carte de séjour en Italie, Omar se raccroche à cette hypothèse. « Il voulait juste pouvoir retourner en Égypte voir ses proches. Notre hantise est de ne pas les revoir avant qu’ils ne décèdent », confie Ibrahim, qui n’a jamais revu ses parents et son épouse, aujourd’hui décédés. Et d’ajouter : « Omar voulait se fiancer. Il voulait pouvoir faire des allers-retours librement. » La phrase résonne dans la chambre du défunt, résumant à elle seule les conséquences de politiques migratoires injustes et mortifères.

      Le drame a bousculé Rezk, dont la décision est prise. Il rentrera en Égypte dès cet été. « Je ne peux plus rester ici », souffle cet ancien artisan du marbre, qui n’avait pas pour objectif l’Europe : lui et Ibrahim s’étaient d’abord exilés en Libye, où ils travaillaient et gagnaient « bien mieux », mais la guerre les a ensuite poussés au départ.

      Omar était aussi très impliqué dans la vie de son quartier, allant régulièrement rendre visite à deux personnes âgées vivant non loin de là. « Il avait même les clés de l’appartement de l’une d’elles et ses enfants l’appelaient pour prendre des nouvelles de leur mère », complète Ibrahim, qui vient tout juste de reprendre le travail tant la nouvelle l’a affecté. « J’ai voulu aller à la salle de sport où on allait ensemble tous les soirs, mais je me suis arrêté net devant la porte sans pouvoir entrer. »

      Avec qui ira-t-il au travail, au marché ou à la poste ?, énumère-t-il à l’entrée de leur immeuble, en montrant le nom d’Omar sur la boîte aux lettres. Un voisin lui présente ses condoléances. Le bail de location et les factures d’électricité, qui étaient à son nom, devront être modifiés. « Les choses ne seront plus jamais comme avant. On ne va rien faire de sa chambre pour l’instant, on verra plus tard, dit Ibrahim. On sait qu’on ne rencontrera plus jamais quelqu’un comme lui. »

      https://www.mediapart.fr/journal/france/030722/la-veritable-histoire-d-omar-elkhouli-tue-par-un-tir-policier-la-frontiere

    • Nice : un migrant blessé par balle par la police

      Un migrant a été grièvement blessé dans la nuit de mardi à mercredi à Nice. L’homme se trouvait dans un fourgon dont le conducteur avait forcé un premier barrage de police à Sospel, à la frontière franco-italienne, avant d’engager une course-poursuite jusqu’à Nice. Les forces de l’ordre ont alors ouvert le feu.

      Vers 2h du matin dans la nuit de mardi 14 à mercredi 15 juin, un fourgon transportant plusieurs migrants a forcé un barrage dans la commune de Sospel, située près de la frontière franco-italienne, dans la vallée de la Roya.

      Une course-poursuite s’est alors engagée sur 40 km jusqu’à Nice. Selon France Bleu Azur, la voiture se serait alors arrêtée avant de redémarrer et de foncer sur des agents de la police aux frontières (PAF), dans le quartier niçois sensible des Moulins.

      Le conducteur et ses deux acolytes auraient ensuite pris la fuite à pied, abandonnant les cinq exilés à bord. Les policiers ont fait usage de leurs armes et ont tiré à quatre reprises.
      L’IGPN a été saisie

      Parmi les cinq migrants découverts dans le fourgon, un a été blessé par balle et son « pronostic vital était engagé dans la nuit », a précisé la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP) à l’AFP. Un autre a été pris en charge par les secours pour un malaise.

      L’inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie de ce dossier, comme c’est systématiquement le cas lorsqu’un policier fait usage de son arme de service, a indiqué le procureur de la République de Nice.

      https://twitter.com/cestrosi/status/1537022125906722816

      Le maire de la ville, Christian Estrosi, proche du parti présidentiel, a apporté sur Twitter son soutien aux forces de l’ordre. « Je déplore bien évidemment les blessures occasionnées dans le fourgon mais elles sont le résultat d’un acte criminel auquel il était nécessaire de mettre un terme pour la sécurité de nos policiers et gendarmes afin d’éviter d’autres drames », a-t-il écrit.
      Au moins 30 morts à la frontière depuis 2015

      Des milliers de migrants tentent chaque année de franchir la frontière franco-italienne pour pénétrer sur le sol français, au péril de leur vie. Les exilés prennent tous les risques pour essayer de traverser la frontière, très surveillée. Ils montent sur le toit des trains ou empruntent des sentiers dangereux à travers la montagne pour éviter d’être repérés par les forces de l’ordre.

      En février, le corps carbonisé d’un homme avait été retrouvé sur le toit d’un train régional qui reliait la ville italienne de Vintimille à la France. En novembre, le cadavre d’un migrant africain, en état de décomposition avancée, avait été découvert dans une gorge, non loin de Vintimille. La personne avait probablement chuté en tentant de rejoindre la France.

      Selon les associations, au moins 30 exilés sont décédés à la frontière franco-italienne depuis 2015.

      https://www.infomigrants.net/en/post/41219/nice--un-migrant-blesse-par-balle-par-la-police

    • Un autre meurtre par la police, une autre violence pour la frontière.

      Le 16 juin 2022, un homme est décédé des suites d’une blessure à la tête causée par un tir policier. La raison sous-jacente est que, dans le véhicule, il y avait des personnes sans papiers et que le conducteur a refusé d’obtempérer.

      La police tue, la frontière aussi

      Le 16 juin 2022, un homme est décédé des suites d’une blessure à la tête causée par un tir policier. A part quelques articles de presse , ce qu’il s’est produit à la frontière franco-italienne le 15 juin 2022 est passé inaperçu. Pourtant, cela s’inscrit dans dans la continuité d’une série d’épisodes similaires et dans le débat qu’ils ont suscités sur l’usage de la violence par la police face à des refus d’obtempérer face à des automobilistes.

      Ce que l’on sait :

      Selon le communiqué du procureur de la République de Nice, la PAF aurait reçu de la part de ses homologues italiens le signalement d’une camionnette transportant des personnes en situation irrégulière, se dirigeant de la Vallée de la Roya vers Nice, en passant par Fanghetto (Italie) et Sospel (France). C’est l’une des voies de passage bien connues de la zone. Dans le PV de l’enquête (que nous avons pu consulter), la PAF admet que le contrôle effectué cette nuit là s’est effectué dans le cadre de la réintroduction des contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen (cf. infra). Repérée en amont, la camionnette aurait donc refusé d’obtempérer une première fois entre Fanghetto et Sospel, dans une route de col en lacet. S’enclanche alors une course-poursuite de 40 kilomètres sur des routes de montagne sinueuses. A Cantaron, dans les hauteurs de Nice la police aurait de nouveau tenté de bloquer la route, et c’est là que, le conducteur forçant de nouveau le passage, la police aurait tiré à 4 reprises en justifiant d’une situation de légitime défense. L’une des personnes qui était à l’arrière du camion a alors reçu une balle à la tête. La camionnette a continué sa fuite, suivie jusqu’au quartier des Moulins à Nice (une vingtaine de kilomètres plus loin par l’autoroute)où le véhicule aurait été abandonné et le conducteur ainsi que 2 personnes assises a l’avant auraient pris la fuite. Le blessé et 4 autres passagers auraient été retrouvés sur place par la police. 2 impacts de balles au niveau des feux avant et des roues ont été constatés par le procureur, l’un ayant transpercé la carrosserie. Suite à cela le blessé grave (et un autre blessé léger en état de choc) a été transporté à l’hôpital où il a succombé à ses blessures le lendemain. Alors que le blessé agonisait à l’hôpital, les autres passagers, ont été arrêtés puis conduits au Centre de Rétention Administrative (CRA) de Nice.
      Le lendemain, le 17 juin 2022, malgré la décision de libération prise par le Juge des Libertés et de la Détention (JLD), le Procureur s’acharne et s’obstine en faisant appel de la décision, prolongeant ainsi la double-peine infligée aux victimes, encore sous le choc. Celles-ci risquent désormais un mois de détention suivi d’un éloignement du territoire.

      La frontière tue

      En 2015 la France suspend unilatéralement l’application du Code Frontière Schengen d’abord pour cause formelle de COP21, puis d’antiterrorisme (suite au bataclan). Depuis 2020, le coronavirus est le dernier argument en date venu renforcer encore plus le mythe d’une frontière étanche à tous les maux du monde. Mais en réalité, les habitants du territoire savent très bien que le dispositif cible bien autre chose que le terrorisme ou le Covid. Dans la pratique, il cible les exilé.e.s arrivant d’Italie. C’est d’ailleurs ce qui force ces derniers à trouver d’autres voies de passage plus dangereuses ou coûteuses, et ce qui explique la prolifération des passeurs depuis lors à la frontière franco-italienne. Bien que le code frontières Schengen autorise les Etats-membres à réintroduire des contrôles systématiques à leurs frontières intérieures, cette mesure ne peut en aucun cas dépasser un délai de 2 ans selon ce même code. Or, la France a maintenu ces contrôles de 2015 à aujourd’hui. Le dispositif dans lequel s’inscrit l’opération ayant conduit à la mort d’un migrant est donc illégal au regard du droit européen, comme l’a encore rappelé la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) le 26 avril dernier.

      Vu qu’il perdure depuis 5 ans, rien d’étonnant à ce que ce type de contrôle, pourtant illégal au regard du droit européen, reste indiscuté dans l’opinion publique. De même, rien d’étonnant à ce que le degré de violence dont la PAF ait fait preuve ne soit pas mesuré à l’aune du délit initial dont ils ont été averti dès le début par leur homologues italiens : l’aide à l’entrée et au séjour irrégulier. Pour un délit toute somme « banal », la police a donc fait usage d’armes à feu au moins à quatre reprises.

      Faut-il s’étonner qu’une telle violence à nos frontière ne choque personne ? Ce n’est pas la première fois qu’un exilé meurt des balles de la police à cette frontière. En 1995 déjà,Todor, un enfant bosniaque, fut tué, toujours à Sospel et dans des conditions similaires. A l’époque, cela avait suscité un vif émoi. Si c’est la seconde fois qu’un.e exilé.e.s meurt directement des balles de la police, ce sont pas moins de 47 personnes qui ont péri en tentant de franchir la frontière franco-italienne depuis 2015. Alors oui, il semble ce qui choquait hier s’est banalisé.

      La police tue

      Ce drame vient, encore une fois, rappeler que la police tue, et qu’elle tue en toute impunité. Les parallèles avec la succession d’affaires récentes impliquant l’usage d’armes à feu face à des refus d’obtempérer est évidente. On pense à l’affaire du pont neuf, le meurtre de Souheil en août dernier dans le 3ème arrondissement de Marseille, celui tout récent de Raiana, ou encore ce qu’il s’est encore reproduit dans le même quartier du 18ème arrondissement de Paris le 17 juin.
      Dans tous ces cas, le refus d’obtempérer de la part d’un chauffeur semble avoir été suffisant pour justifier, aux yeux des tireurs, de la justice, de la presse et d’une part de l’opinion publique, l’usage « proportionné » de la force : une salve ininterrompue de tirs à balle réelle. Dans tous ces cas, on ne comprend donc pas bien comment les conducteurs aient pu à la fois « foncer sur le véhicule de police » et « prendre la fuite ». Soit le véhicule de police aurait du être percuté, soit en cas de fuite, la légitime défense ne se justifie pas. En d’autres termes, les témoignages des policiers se contredisent eux-mêmes. Dans tous ces cas, on ne comprend pas bien, vu que le conducteur cherchait à contourner le contrôle, son intérêt à braquer son volant sur les policiers. En revanche, on peut très bien imaginer l’intérêt des forces de l’ordre d’établir une telle version, de sorte à pouvoir plaider la légitime défense.

      Pour revenir à ce qu’il s’est passé dans les Alpes Maritimes, le communiqué de presse du Procureur nous apprend que deux enquêtes auraient été ouvertes. L’une contre les conducteurs/passeurs, pour aide à l’entrée et au séjour irréguliers, refus d’obtempérer "aggravé par la mise en danger d’autrui", et tentative d’homicide sur PDAP. L’autre, auprès de l’IGPN, contre les flics meurtriers, pour « violences volontaires avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique suivie d’une incapacité supérieure à 8 jours ». Nous parlons ici d’un homme, simple passager, décédé d’une blessure à la tête des suites d’un tir policier. Et le Procureur parle d’une ITT de 8 jours. Tentative d’homicide volontaire pour un homme qui de toute vraisemblance a cherché à contourner (et non pas écraser) un barrage de police, violence volontaire ayant entraîné 8 jours d’ITT pour l’homme qui a porté le coup fatal et qui est sorti libre après quelques heures de garde à vue. Deux poids deux mesures.

      Les quatre personnes arrêtées ont été libérées suite à une audience le lundi 21 juin devant la Cour d’appel d’Aix.

      https://mars-infos.org/un-autre-meurtre-par-la-police-une-6421

    • "On veut que le monde entier sache qu’il n’était pas un « migrant »" : l’histoire d’Omar, tué par la police après une #course-poursuite entre Sospel et Nice

      Omar Elkhouli, un sans-papier égyptien, est décédé le 16 juin après avoir été atteint par le tir d’un policier, à la suite d’une course-poursuite entre Sospel et Nice. Ses proches, rencontrés par Mediapart, racontent son histoire.

      « On sait qu’on ne rencontrera plus jamais quelqu’un comme lui. » Les colocataires d’Omar Elkhouli pleurent la disparition de leur ami, survenue le 16 juin.

      Ce jour-là, Omar essaye de rentrer en France après s’être rendu en Italie pour obtenir une carte de séjour. Il est approché par un rabatteur, qui lui propose de lui faire passer la frontière dans un camion frigorifique avec d’autres personnes sans-papiers, dont l’un de ses amis, Momein.

      « On a donné 50 euros chacun au rabatteur et les passeurs nous ont dit qu’on les paierait 200 euros à notre arrivée à Nice », raconte l’Egyptien à Mediapart.
      « On demandait aux passeurs de s’arrêter »

      Dans le camion, se trouvent trois passeurs et cinq migrants. Une quinzaine de minutes après leur départ, la police italienne les repère.

      « On demandait aux passeurs de s’arrêter mais ils accéléraient, se souvient Momein. Ils prenaient des virages serrés, on se cognait les uns contre les autres. À un moment donné, c’était tellement agité qu’Omar s’est retrouvé à ma place [à l’arrière droite du camion] et moi à la sienne. »

      La police italienne aurait ouvert le feu, en visant le châssis de la voiture, puis la police aux frontières (PAF) française prend le relais. C’est là qu’Omar reçoit une balle à l’arrière du crâne.

      « On frappait sur la paroi de séparation en hurlant que l’un de nous était blessé à la tête mais ils [les passeurs] continuaient à accélérer. Un des passagers algériens a même appelé le rabatteur au téléphone pour qu’il dise au conducteur de s’arrêter. On a tous cru qu’on allait mourir. »

      En arrivant à Nice, dans le quartier des Moulins, les passeurs arrêtent la camionnette et s’enfuient. Les cinq passagers clandestins sont directement interpellés par la police.

      « Des policiers mettaient des coups de pied [à Omar] pour voir s’il réagissait », raconte à Mediapart un des migrants. « Ils ont mis 15 minutes à le prendre en charge », poursuit Momein.

      Omar est finalement conduit à l’hôpital, où il décède quelques heures après des suites de ses blessures, tandis que les autres migrants sont placés en rétention avant d’être relâchés le 20 juin, grâce à une décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, en raison de leur « vulnérabilité », « état psychologique » et des « circonstances particulières de l’affaire ».
      Il travaillait et vivait en France depuis 13 ans

      Omar, 35 ans, vivait en France depuis 13 ans, selon ses proches, retrouvés par Mediapart. Depuis quatre ans, il logeait à Sarcelles, dans une colocation avec trois autres hommes.

      « Omar était quelqu’un de pieux. Nos propres frères ne nous ont pas aidés comme il l’a fait », assurent-ils. L’Egyptien travaillait sur des chantiers dans le BTP, il envoyait de l’argent tous les mois à ses proches restés en Égypte.

      Il était très impliqué dans la vie de son quartier, où il rendait régulièrement visite à deux personnes âgées. Le soir, Omar allait à la salle de sport, où il se filmait pour son compte TikTok.

      « Il savait qu’il serait impossible de prouver son existence sur 13 ans. Mais surtout, il savait qu’il était impossible d’avoir un simple rendez-vous en préfecture. Un de mes amis, Égyptien également, travaille en étant déclaré et a accumulé plus de 40 fiches de paie. Cela fait trois ans qu’il n’arrive pas à prendre rendez-vous en préfecture. En entendant cette histoire, Omar a été totalement découragé », relate Ibrahim, un de ses colocataires, très impacté par la mort de son ami.

      "On veut que le monde entier sache qu’il n’était pas un « migrant ». Il vivait en France, il n’avait jamais eu d’ennuis avec la police. Il ne méritait pas de mourir ainsi."

      (#paywall)
      https://www.nicematin.com/faits-de-societe/on-veut-que-le-monde-entier-sache-quil-netait-pas-un-migrant-lhistoire-do