Nous avons perdu.
La tristesse est immense car le gâchis est évident, que de temps, argent et espoirs envolés. Le choc ressentis par les forces progressistes doit être encaissé et analysé.
Pour ma part j’y vois plusieurs facteurs entremêlés qui peuvent expliquer en partie cette catastrophe.
1/ Cette campagne électorale a été la plus sale que le Chili n’ai jamais subit, même des élus du congrès aux USA ont écrit aux propriétaires des médias et réseaux sociaux pour alerter sur le taux de fake news qui circulaient.
Les médias, et les journaux répétant matin midi et soir les « mantras » de l’oligarchie qui les possède tous. Pour preuve, le vote des Chiliens à l’étranger est à plus de 65% à faveur del Apruebo.
Car oui la programmation mentale est effective, réelle et puissante car implicite.
Je pratique l’hypnose thérapeutique pour aider mes patient.e.s à changer les habitudes qui les rendent malheureuxes, je connais donc bien les effets des suggestions ciblées, répétées qui finissent par devenir des croyances, qui conditionnent les comportements. Les gens ignorent l’effet que cela a sur eux, car nous préférons penser que nous sommes maîtres de nos pensées et émotions... Mais nous les psys nous savons que ceci n’est qu’une illusion, une illusion de contrôle et de liberté... qui flatte et rassure notre ego.
2/ Le vote a été rendu obligatoire cette fois, une première au Chili, les gens contraints d’aller se prononcer alors que d’ordinaire ils sont au mieux dans une posture critique, au pire dans une dépolitisation extrême ont manifesté leur rejet des processus électoraux en disant fuck.
3/ Le racisme intrinsèque de la société chilienne, où la colonialité de l’être y est encore centrale, des générations et des générations ayant grandi avec la haine del indio, c’est à dire d’une partie d’eux même. Ce fut un des principaux enjeux de ce scrutin, la place qui fut faite aux peuples premiers par le processus constituant, fut totalement déformé par les médias et les bots. Le chilien moyen n’aime pas être associé à ses origines, car il faut quand même savoir qu’au Chili il y eu des politiques de blanchiment de la race (sic) menées par l’Etat, avec notamment l’accueil de colons européens a qui étaient données, papiers, terres, bétail, et indios... et ette générosité dura plusieurs siècles, aujourd’hui le 1% plus riche est constitué majoritairement par les descendants des colons.
4/ La dimension antipatriarcale de la proposition a effrayé, comme le racisme structurel, ces 2 pilliers de la matrice capitaliste sont bien solides, à notre grand désespoir.
5/ Si le peuple chilien a su se soulever en 2019, la pandémie et toutes ses restrictions ont impacté la dynamique insurrectionnelle, canalisée par le processus constituant qui subit d’emblée le sabotage médiatique. Les gens furent dépossédés de leur puissance d’agir, séparés, contraints de retourner chez eux et d’encaisser, le repli sur soi obligatoire finit par faire taire ce « nous avons mis tant de temps à nous retrouver, ne nous lâchons plus » qui était dit et répété durant el estallido.
J’écris car j’essaie de comprendre, et aussi de vous expliquer, vous que j’ai saoulé avec mes espoirs, je n’ai toujours pas réussi à chialer mais ça va pas tarder, car il faut là maintenant que l’on accepte cette défaite pour comprendre, sentipensar lo que pasó, el daño que le sigue haciendo a mi pueblo el empresariado, l’oligarchie chilienne n’allait quand même pas nous laisser gagner comme ça, le pays où 1% détient les 50% des richesses...
Et je ne change pas mes plans, j’ai encore plus envie d’aller sur place pour travailler auprès des gens pour faire avancer notre vision, comprendre de l’intérieur les enjeux, blocages et freins au changement, le syndrome de Stockholm monumental qui règne.
Cette proposition était beaucoup trop belle pour le sens commun chilien, imprégné par la culture de l’oligarchie, des entrepreneurs triomphant, de l’individualisme cher au liberalisme...
Certes cette proposition tombe à l’eau, tristesse absolue, mais le processus constituant continue... Sous quelle forme ? Les jours qui viennent seront déterminants, pour l’instant l’émotion est palpable, puis viendra le deuxième temps de la pensé, plus rationnel et froid...
Ce scrutin nous a été volé, le rôle des médias corrompus est central, nous en voyons ici en France aussi les effets, si les pouvoirs exécutifs et législatifs ne freinent pas ce monopole de l’influence sociale, nous sommes tous foutus, là bas et ici.