L’ancien maire de Riace avait décidé de repeupler son village calabrais grâce aux migrants. Cela lui a valu les foudres de l’extrême droite italienne. Poursuivi en justice, il risque entre dix et treize ans de prison.
Domenico Lucano dit Mimmo Lucano est l’ancien maire de Riace en Calabre. Cet ancien militant des droits de l’homme, s’est fait connaitre par ses prises de positions favorables à l’accueil des migrants.
Mimmo Lucano avait redonné vie à son village grâce aux « extracomunitari »
Ce sympathisant communiste avait notamment favorisé leur implantation à Riace afin de redonner vie au village. En 2018, il avait en effet accueilli 600 extracomunitari comme on dit en Italie, qui étaient venus revivifier cette bourgade de 2000 habitants. Le village avait été frappé depuis plus d’un siècle par l’exode de sa population vers les villes industrielles du nord de la péninsule. Avec l’arrivée de ces nouveaux habitants, Riace avait connu un certain renouveau avec la restauration de maisons, la réouverture de commerces et même de l’école du village, mais en 2018, Mimmo Lucano s’était vu couper les aides économiques du Centre d’accueil extraordinaire (CAS) au moment de l’arrivée au pouvoir de Matteo Salvini.
Son engagement lui a causé de nombreux problèmes
Pour protester contre ces coupes financières, Mimmo Lucano avait entamé une grève de la faim. Le 1er octobre 2018, il avait même été accusé d’aide à l’immigration clandestine et arrêté. Il a également été poursuivi sous prétexte d’irrégularités dans l’attribution de financements pour le ramassage des ordures à Riace et l’organisation de mariages blancs entre les habitants du village et des migrants. Cela lui a valu une interdiction de séjour dans son propre village de 11 mois. En septembre 2021, il a même été condamné à 13 ans de prison pour avoir organisé des mariages blancs pour des femmes déboutées du droit d’asile et pour avoir attribué des marchés sans appel d’offres à des coopératives liées aux migrants.
« J’assume d’être sorti de la légalité, mais la légalité et la justice sont deux choses différentes. La légalité est l’instrument du pouvoir et le pouvoir peut-être injuste », déclarait alors Domenico Lucano.
Le 26 octobre s’est ouvert son procès en appel. Il risque entre dix et treize ans de prison.
Marseille honore l’ancien maire de Riace
Hier, la ville de Marseille a honoré l’ancien maire de Riace. L’italien a été fait citoyen d’honneur de la ville et le maire socialiste de Marseille, Benoit Payan lui a remis une médaille.
L’eurodéputé EELV, Damien Careme qui a assisté à l’évènement a exprimé sur Twitter sa « solidarité avec celui qui est menacé en justice par l’extrême droite italienne qui lui fait un procès politique ».
Un rassemblement a également été organisé en son honneur, au Musée de l’histoire de la ville de Marseille. Le coordinateur des actions du PEROU, Sébastien Thierry, en a profité pour déclamer un discours.
Selon lui, « L’hospitalité vive est le seul projet politique viable pour ce 21e siècle ». « Nous savons combien les bouleversements climatiques s’annoncent extraordinaires ». Nous savons combien les mouvements migratoires seront colossaux durant ce siècle, et ce particulièrement dans le bassin méditerranéen ».
S’adressant à Mimmo Lucano, M. Thierry ajouta : « Nous savons donc que tout ce qui s’oppose à cela, que tout ce qui s’oppose à ce que tu as bâti, que tout ce qui s’oppose aux navires sauvant des vies en Méditerranée, que tout ce qui s’oppose à une Europe massivement accueillante, s’oppose en vérité au seul avenir respirable qui soit ». « Ce ne sont pas des politiques qui te font face, ce sont des cadavres. »