Russell Banks est mort : nous l’avions rencontré il y a 25 ans dans un cadre digne de “Fargo”
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« Mon pauvre ami. Quinze heures de voyage et se retrouver dans Fargo ! J’aime ces gens. Je les connais bien. Ce sont les membres de ma famille. Mon oncle est le chef de la police d’une petite ville du New Hampshire, ma tante est employée municipale. Je pourrais sûrement dénicher parmi eux un vendeur de voitures. Hollywood montre des Américains qui sont bien à leur place dans la société. Les frères Coen, eux, ont compris que la plupart des gens sont incompétents. Même les voleurs. Même les meurtriers. Pas très bons dans leur boulot. Ils n’y arrivent pas. Avec les Coen, on comprend que la vie nous échappe. Et c’est merveilleux. »
Son regard se pose très loin, de l’autre côté de l’immense baie vitrée, sur les sommets arrondis de l’Adirondacks, noyés dans la brume. La maison n’est pas la caricature décrite dans Sous le règne de Bone - « des hectares de pelouse, une piscine couverte, un court de tennis, des garages, des petits chalets pour les invités... ». Non, une vaste mais simple maison de bois, à l’écart du village de Keene, à flanc de colline, perdue au milieu des forêts. En contrebas, près du torrent, le petit chalet est bien là, mais pas pour les invités. « Une simple cabane à sucre. On y brûlait la sève d’érable dans de grandes cuves pour en faire du sirop. Elle a plus de 100 ans. J’y ai mis un peu de confort. C’est là que j’ai écrit tous mes livres ces dix dernières années. »