Recriweb

« … en deçà d’un monde qui ne sait plus nourrir que son propre cancer, retrouver les chances inconnues de la fureur » (André Breton)

  • En matière de compréhension des enjeux, il n’y a pas pire naze dans l’intelligentsia écologiste que #Pierre_Charbonnier . Donc normal de le trouver dans Libé et au Climat Libé Tour de Paris.

    S’il fallait résumer, en quelques mots, l’histoire du problème environnemental, il faudrait dire que nous sommes plongés dans un dilemme entre développement économique et risque écologique.

    Comprenez-le bien : le problème, ce n’est pas la reproduction du capital, mais comment la rendre écolo-compatible.

    Le premier (donc le système capitaliste)

    est synonyme de prospérité, il émancipe la société des limitations de la nature et il ouvre la possibilité d’un partage des bénéfices du progrès. Le second, ce sont les retombées négatives de ce processus industriel et agronomique, qui peuvent aller jusqu’à nous faire douter de son bien-fondé.

    Douter seulement. Heureusement, Pierre Charbonnier est là pour vous rassurer.

    L’#écologie_politique est née avec la crise du progrès, et c’est la raison pour laquelle elle a si souvent été en porte-à-faux avec les revendications ouvrières et sociales qui conservent pour boussole principale l’accroissement du revenu et la démocratisation du travail.

    En vérité, l’écologie politique est un courant réformiste petit-bourgeois qui 1) est, depuis toujours, étranger aux idées, aux intérêts et aux combats de la classe ouvrière et qui 2) ne vise qu’à réaliser des alternatives au sein même de la société capitaliste (cette absurdité). Elle ne peut donc pas comprendre, à l’instar du naze, que la question écologique dépend, en vérité, fondamentalement du mouvement ouvrier qui, seul, peut mettre fin au capitalisme — qui est l’unique raison du désastre écologique.

    Aujourd’hui, ce clivage entre développement et économie est remis en question. En effet, la gauche est en train d’intérioriser la critique écologique de la productivité à tout prix. Mais ce changement de vision, parfois résumé dans le slogan « Fin du monde, fin du mois, même combat », peine à trouver un véritable aboutissement politique et électoral.

    L’écologie politique est fondamentalement réactionnaire. Et la vieille gauche, déjà idiote, en « intériorisant la critique écologique de la productivité à tout prix », le devient tout autant. Car ce qu’il convient naturellement de comprendre, c’est que le problème ce n’est pas la productivité, dans un sens général, mais seulement les rapports sociaux de production actuels. Qui, à part les nazes, peut prétendre en effet qu’une société débarrassée du capital n’aura pas également le souci de produire le plus efficacement possible ? Bref, le problème, ce n’est pas la productivité, mais le fait que celle-ci n’est aujourd’hui conçue et organisée que pour reproduire le capital et engranger des profits pour une minorité de parasites.

    La gauche française semble désormais avoir attaché son avenir à celui des politiques climatiques.

    Seulement par opportunisme, car cela rapporte des voix — on le sait. Pour le reste, elle ne pourra fondamentalement rien changer à rien.

    […] au-delà des appels parfois quelque peu incantatoires à faire converger justice sociale et justice climatique, la construction de l’offre politique « rouge-vert » reste entravée par d’importants obstacles. Du côté « vert », la culpabilisation des habitudes de consommation et la promotion d’un style de vie moins matérialiste provoquent les réticences des classes moyennes et populaires. Celles-ci y voient souvent un amoindrissement de leurs perspectives économiques, ce qui resserre la base électorale autour des classes moyennes supérieures urbaines et diplômées.

    L’écologie politique est étrangère depuis toujours à l’analyse marxiste des rapports sociaux de production, elle a toujours préféré voir le problème dans les habitudes de consommation. Un vieux contresens qui permet de justifier le seul désir de moraliser l’ordre social.

    Du côté « rouge », les projets de planification écologique et de taxation du capital remettent à juste titre en selle un Etat capable de discipliner les investisseurs. Mais cette stratégie a encore deux points aveugles : quelle intégration de la France à l’économie européenne et mondiale est-il possible d’envisager dans ce cadre ? Et comment concrètement rééquilibrer le sort des « gagnants » et des « perdants » de l’ordre néolibéral sur la base de cette bifurcation ?

    Le naze voit du rouge dans des « projets [capitalistes, donc dérisoires] de planification écologique et de taxation du capital »…

    La question de la transition écologique a pourtant très largement été renouvelée dans les derniers mois par le développement d’une stratégie industrielle agressive aux Etats-Unis. L’« Inflation Reduction Act » de l’administration Biden est une façon (imparfaite mais efficace) de trancher les dilemmes écologiques : il vise à substituer une infrastructure électrique à l’infrastructure fossile, pour préserver le way of life américain, soutenir l’emploi et replacer les Etats-Unis dans la compétition économique mondiale pour les nouvelles filières de transition (solaire, éolien, batteries, etc.).

    L’utopie selon le naze…

    Ce faisant, le Parti démocrate espère renouer avec la lower middle class qui l’avait abandonnée au profit du Parti républicain, et apparaître comme un leader mondial de la lutte contre le réchauffement climatique.

    Il y a bien le verbe « apparaître » ici, mais le naze, naturellement, croit à ce bullshit.

    Il n’est pas question de copier naïvement ce plan à l’échelle de la France ou de l’Europe. Mais sa logique sous-jacente, qui tient en trois points, mérite d’être considérée.

    Le capitalisme peut être agréable aux animaux, aux végétaux et à nous. À 3 conditions : [ne riez pas]

    D’abord, la réinvention de la productivité axée sur les secteurs d’emploi concernés par la transition énergétique.

    Je résume : de nouvelles subventions en milliards pour le patronat, mais au prétexte de la transition écologique.

    Ensuite, la conquête d’une autonomie stratégique sur ces secteurs clés dans le contexte d’une rivalité économique mondiale accrue et d’une dominance de la Chine.

    Le réformiste est toujours un nationaliste. Et au service de son propre impérialisme.

    Enfin, la formation d’une coalition d’intérêts susceptible de rassembler les différentes fractions de la classe moyenne et de briser les clivages de diplômes, de génération et d’implantation géographique entre villes et campagnes.

    [non, vous pouvez rire, en fait]

    En France et en Europe, chacun de ces trois éléments doit faire l’objet d’une adaptation aux conditions socio-économiques et écologiques locales. D’abord parce que notre économie est structurée par l’Etat social qui, en assurant des missions d’éducation, de formation professionnelle et de prévention sanitaire, est en position pour jouer un rôle clé dans la transition.

    Le naze, par définition, ne peut se prévaloir d’aucune analyse de classe de l’État. Incapable de voir en lui le bras armé de la classe possédante, il n’hésitera donc pas à en faire une solution possible :

    un arbitre du capital privé et une institution régalienne. [mais] aussi
    une structure d’orientation de la société, qui doit être mobilisée pour inventer un welfare vert, c’est-à-dire des services publics qui permettent de faire face collectivement au risque climatique.

    Ensuite…

    … parce que nous n’avons ni les moyens ni l’intérêt de construire une transition en nous contentant de substituer des machines électriques aux machines thermiques. Nous devons développer un usage avisé de l’innovation technologique pour qu’elle serve une véritable réorganisation de la ville, du système productif industriel et agricole, pour intégrer les limites planétaires à nos modes de vie. C’est-à-dire, une transition plus ambitieuse à la fois sur le plan écologique et social que celle engagée aux Etats-Unis [rire], par le biais d’un effort massif pour l’efficacité énergétique et la sobriété des schémas de consommation.

    Marx disait : « les vérités technologiques déjà acquises ne pourront entrer dans le domaine de la pratique que sous un régime communiste » (un régime débarrassé du capital et de l’exploitation). Le naze, lui, imagine un capitalisme vertueux et efficace animé par des consciences vertueuses. #hihan

    Enfin, nous devons nous appuyer sur les forces économiques et géopolitiques de l’Europe pour engager une transition à l’échelle pertinente, qui permettra de réaliser enfin le projet de sécurité collective et de paix porté par cette communauté.

    Delirium tremens

    Mais cette stratégie sociale, industrielle et géopolitique ne pourra véritablement émerger que si un ensemble d’acteurs dessine avec précision ses contours et l’impose dans le débat public. Il faudra en particulier que nos dilemmes socio-écologiques sur le nucléaire, l’ouverture des mines de lithium sur notre territoire, le pouvoir du lobby automobile, l’accompagnement des perdants de la transition vers de nouveaux emplois soient tranchés avec courage et résolution.

    Mais le naze ne sait pas que c’est le capital qui décide, en dernière instance.

    Il faut donc assumer que notre socle énergétique doit être principalement renouvelable et secondairement nucléaire, que nous devons renouer avec les activités extractives longtemps déléguées aux pays du Sud global pour des raisons d’intérêt économique et de solidarité internationale, et que l’Etat ne peut plus subventionner les énergies fossiles et doit utiliser cet argent pour soutenir la transition des mobilités individuelles et collectives.

    Le naze veut donc que le capital investisse dans l’extraction de terres rares et ouvrent de nouvelles mines.

    La gauche, en d’autres termes, doit devenir l’avant-garde d’une stratégie industrielle et sociale à même de forger un équivalent moderne du compromis fordiste et protecteur issu de la Seconde Guerre mondiale.

    Le naze a besoin de s’appuyer sur des mythes pour produites ses propres bullshits.

    Elle se doit de mettre un terme définitif à l’âge néolibéral.

    Mais certainement pas au capitalisme.

    Il ne suffit plus de se complaire dans un projet réservé à la bohème cycliste ou à l’invocation abstraite du peuple. La gauche doit indiquer avec clarté ce qu’elle offre aux travailleurs du soin, de l’éducation et surtout aux opérateurs les plus concrets de la transition que sont les ouvriers et les artisans de l’énergie, du bâtiment, de l’agriculture, des transports. Ceux et celles qui contribueront directement à la construction des infrastructures techniques de demain ne peuvent être laissés à l’écart dans la définition de la stratégie qui les fera advenir.

    Charbonnier : bon pour être ministre au gouvernement de la bourgeoisie ✅

    #réformisme #charlatan #marxisme #écologie